« Dans les îles, le défi de la continuité territoriale commence en effet dès le domicile, pas seulement à partir de l’aéroport international de Tahiti ». C’est ce que préconise le rapport des sénateurs de la Délégation aux Outre-mer rendu public jeudi 30 mars à Paris. Des conclusions qui sont loin d’être tendres avec la politique de continuité territoriale de l’État. « Pour les étudiants ou les personnes en formation, bénéficiant de la prise en charge complète du billet d’avion entre l’aéroport international et l’Hexagone, le trajet intérieur devrait l’être aussi » souligne le texte.
« Dans le rapport d’information que nous avons préconisé, il y au moins une mesure qui concerne directement les Polynésiens, c’est que quand vous avez à prendre un aéroport international et que vous devez avant ça prendre un avion ou un bateau, qu’on ait un dispositif complémentaire de continuité territoriale (…) qui, pour nous, pose la question de la place de la Polynésie dans la République » interpelle le président de la Délégation sénatoriale aux Outre-mer, Stéphane Artano.
Du côté des compagnies partenaires (Air Tahiti Nui, French Bee et Air France), l’augmentation le 17 mars de 76 372 Fcfp à 111 575 Fcfp est toujours bonne à prendre. Même si les bénéficiaires de cette aide représentent une minorité de clients. Auditionné dans le cadre du rapport, le président-directeur général de la compagnie au tiare en a profité pour sensibiliser sur le rôle de l’Etat. « Il m’appartenait d’expliquer que les compagnies aériennes ne peuvent pas se substituer à l’Etat sur le tarif des billets d’avion et sur les aides à ceux qui en ont besoin ».
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Également auditionné, le directeur d’Air Tahiti a rappelé ce qui est une évidence pour les Polynésiens, mais qui semble plus compliqué à comprendre du côté de l’Hexagone. « Avant de parler de continuité vers la métropole il faut aussi exprimer la préoccupation que les habitants des îles peuvent avoir, à savoir le transport interne vers Papeete. C’est sur ce point-là que nous avons insisté, en disant que s’il fallait parler de continuité territoriale, la Polynésie était l’exemple parfait » indique le directeur général d’Air Tahiti, Manate Vivish.
En attendant une participation de l’Etat sur les trajets internes, le pays a mis en place une délégation de service public pendant la crise sanitaire pour maintenir les liaisons « vitales », Air Tahiti ne pouvant plus assumer à l’époque les pertes engendrées par certaines lignes. Un fonds alimenté par une contribution sur chaque billet d’avion payé par l’ensemble des passagers, selon deux tarifs : l’un pour la zone de libre concurrence, l’autre pour les îles les plus éloignées. De quoi équilibrer 34 lignes déficitaires en particulier vers les Marquises, les Tuamotu et les Australes.
Aujourd’hui doté de 1,2 milliard, ce fonds permet d’envisager une baisse des tarifs en 2023 sur les lignes qui desservent les îles éloignées selon le gouvernement. Une initiative qui mérite un geste de l’Etat pour le ministre des Transports aériens dans le cadre de la continuité territoriale. « Il y a surtout un manque aujourd’hui sur les billets des étudiants qui partent des îles vers Papeete pour reprendre un billet vers l’hexagone. Ce segment-là n’est pas pris en charge aujourd’hui par l’Etat. Cette une évolution à mon avis qui se fera », assure le ministre des Transports aériens, Jean-Christophe Bouissou, qui a demandé à l’État une participation d’environ 360 millions de francs.
Mais le rapport appelle également à relever « très significativement » le plafond des ressources, cantonné en Polynésie aux personnes ne touchant pas plus de 1,6 million par an.