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Une parade fluviale, déjantée et diluvienne pour ouvrir les Jeux

L'allumage final de la vasque a été confié à deux légendes du sport français: la plus importante figure de son athlétisme, Marie-Josée Pérec, et la star du judo Teddy Riner. . (Photo by Ben STANSALL / AFP)

« Je proclame ouverts les Jeux de Paris célébrant la XXXIIIe olympiade des temps modernes« , a déclaré Emmanuel Macron sur l’esplanade du Trocadéro, aux côtés du patron du Comité international olympique (CIO), Thomas Bach, et de 85 chefs d’État et de gouvernement, qui ont supporté stoïquement le déluge.

En sortant pour la première fois le défilé des athlètes et la cérémonie d’ouverture d’un stade, les organisateurs voulaient casser les codes, réinventer un exercice qui pouvait paraître poussiéreux, tout en respectant le rituel olympique jusqu’à l’allumage final de la vasque par deux légendes du sport français: la plus importante figure de son athlétisme, Marie-Josée Pérec, et la star du judo Teddy Riner.

Le metteur en scène Thomas Jolly a bâti un spectacle en immersion dans la Ville-Lumière dont il a fait une scène globale. Avec un final en apothéose quand la Canadienne Céline Dion, éloignée de la scène depuis 2020 par une maladie aux crises paralysantes, a offert une version puissante de « L’hymne à l’amour » d’Edith Piaf du premier étage de la tour Eiffel.

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Pendant près de quatre heures, dans un mélange d’images enregistrées et de spectacle vivant le long de la Seine, Thomas Jolly a convoqué l’histoire de France – parfois violente comme est venue le rappeler une Marie-Antoinette tenant sa tête ensanglantée -, ses écrivains comme Victor Hugo, ses artistes, Serge Gainsbourg, Jacques Tati, Eugène Delacroix ou Georges Bizet, ses sportifs comme Zinédine Zidane.

Communauté LGBT+ en lumière

Mais il entendait aussi célébrer la modernité, la diversité, le respect de la différence et l’inclusivité. La communauté LGBT+ a été mise en lumière, avec le baiser de deux hommes ou une Cène jouée par des drag queens, au gré de douze tableaux animés par 2.000 artistes.

Ils ont été rythmés par les voix de l’Américaine Lady Gaga (qui a chanté en différé selon une source proche de l’organisation) et de la Franco-Malienne Aya Nakamura accompagnée de la Garde Républicaine, par les notes du pianiste Sofiane Pamart accompagnant Juliette Armanet, les guitares brutales du groupe de métal français Gojira.

Ou encore le tempo de « Supernature », morceau légendaire de l’un des parrains de la scène électro française, Marc Cerrone, sur lequel s’est produit le danseur américain Shaheem Sanchez, qui souffre de surdité, pendant que la tour Eiffel se parait de mille feux.

Philippe Katerine, extra-terrestre de la chanson française, coutumier des excentricités et des provocations, n’est pas passé inaperçu, apparaissant en Dionysos, le corps peint en bleu pailleté de doré, pour chanter son morceau « Nu ».

La cérémonie a aussi mis à l’honneur des femmes dont l’apport historique a souvent été occulté, avec des statues appelées à rester dans les rues de Paris: les héroïnes du droit à l’avortement Simone Veil et Gisèle Halimi, la révolutionnaire guillotinée Olympe de Gouges, la Communarde exilée Louise Michel, ou encore la pionnière du sport féminin Alice Milliat, tant méprisée par le père de l’olympisme moderne, Pierre de Coubertin.

« Les prestations sont époustouflantes, j’aurais juste aimé qu’il ne pleuve pas« , dit Said Pauline Brett, 69 ans, venue de Chicago, avec son mari et sa fille. « Le spectacle est fantastique. Juste un peu humidifiée par la météo…« , s’amuse Mike Smith, 57 ans, un consultant. 

Travelling sur la Seine

Beaucoup n’ont pas eu ce flegme. Les secteurs du haut des berges, réservés aux 220.000 invités (pour 100.000 payants), sont souvent apparus clairsemés. Beaucoup ont déserté avant la fin. Sitôt passé le bateau français, la dernière des 85 embarcations transportant les 205 délégations, les spectateurs ont souvent jeté l’éponge, comme Brahim, 19 ans: « Je vais essayer d’arriver à temps pour regarder la fin à la télé.« 

Selon les organisateurs, 6.800 sportifs étaient prévus. Ceux qui sont venus ont conservé leur enthousiasme sous la pluie, souvent protégés par des capes, profitant d’un lent travelling de six kilomètres au pied des monuments emblématiques de Paris: Notre-Dame et sa flèche restaurée après l’incendie de 2019, le Louvre, les Tuileries, la Concorde, le Grand-Palais puis la tour Eiffel.

Sur les lieux mêmes où, dans ces Jeux qui se targuent d’être les premiers paritaires de l’histoire, certains tenteront dès samedi de décrocher l’or: des épreuves comme le tir à l’arc, le beach-volley ou l’escrime, seront organisées sur ces sites de cartes postales.

Pendant deux semaines, jusqu’au 11 août, les légendes du sport mondial, Simone Biles, Sha’Carri Richardson, Eliud Kipchoge ou Léon Marchand, vont écrire l’histoire olympique dans la ville qui attendait d’organiser des Jeux depuis 1924, quand Johnny Weissmuller y avait été sacré roi de la natation.

Ils marcheront sur les traces de légendes du sport et des Jeux mis à l’honneur vendredi, Rafael Nadal, Nadia Comaneci, Serena Williams et Carl Lewis. Cette odyssée s’est faite sans la trentaine de Russes et de Bélarusses autorisés à participer à titre individuel, sous bannière neutre, mais privés de parade en raison de l’invasion de l’Ukraine. 

Défi sécuritaire

Hors norme, ce pari artistique était aussi sécuritaire et logistique, préparé depuis quatre ans. Jamais autant de forces de l’ordre n’avaient été mobilisées en France, avec 45.000 policiers et gendarmes déployés, et 10.000 militaires.  Depuis plusieurs jours, l’hypercentre de Paris était bouclé, accessible seulement à qui dispose de son sésame, accréditation ou QR Code.

Outre la pluie, les autorités françaises ont dû gérer le sabotage organisé de leur réseau ferroviaire: dans plusieurs régions, des infrastructures de la SNCF ont été la cible de dégradations, notamment des incendies volontaires. Les auteurs et les commanditaires de cette attaque ne sont pas connus pour le moment.

Mais selon une source policière, « aucun incident majeur » n’a été à déplorer lors de cette soirée dont « on reparlera dans 100 ans« , selon un message sur X d’Emmanuel Macron. 

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