« Automne, comme la saison » . Simple, la présentation n’en est pas moins empreinte d’une légère mise en scène. Cet alias, la jeune chanteuse, danseuse, peintre et animatrice de 27 ans ne l’a pas choisi au hasard. Transgenre assumée, née au mois de septembre, elle aime les couleurs vives des feuilles qui tombent, notamment le rouge, sa couleur préférée.
Une couleur qui sied également au feu des projecteurs. Car c’est sur scène que le cœur d’Automne bat le plus fort. « En chantant, j’arrive à m’exprimer, à faire taire les gens pour qu’ils m’écoutent » , confie-t-elle. Celle qui a commencé à chanter enfant à l’église, entourée de musiciens et d’amateurs de bringues du côté de Pueu, sur la Presqu’île, déclare avoir toujours voulu « assurer la relève » musicale à sa façon : la plus spectaculaire qui soit.
Au-delà du simple plaisir de chanter, la musique est l’exutoire d’Automne, qui commence à se tailler une réputation de performeuse hors pair au fenua. À O² Coco, Bar restaurant de Moorea où elle gagne sa vie, il lui arrive souvent de faire le show en dehors de ses shifts. Ailleurs, sa verve d’animatrice est parfois sollicitée pour de l’animation : d’abord pour des kermesses et des galas, puis pour des mariages et autres événements festifs.
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Mais sa progression artistique n’a pas été évidente. « Dans ma famille, ça ne s’est pas très bien passé » , glisse-t-elle. Dès l’âge de 5 ans, elle ressent son identité différemment et se heure à l’incompréhension de certains de ses proches. Elle trouve du soutien ailleurs, auprès de ses amis les plus fidèles. « Ils m’ont toujours dit : ‘Ne change pas, reste tel que tu es’ » , se souvient-elle.
« Au fond de moi, j’ai gardé beaucoup de choses par rapport à ma transsexualité. Par la musique, j’ai pu exprimer qui je suis et montrer que nous, personnes LGBT, trans, avons le droit d’exister et d’être acceptés » . La force d’Automne, c’est qu’elle ne laisse justement pas d’autre choix que d’être acceptée quand elle performe. Invitée à se produire aux côtés de Man’s Tahiti au vernissage de l’exposition Anuanua d’Océane Fouet, du 18 au 22 février à la Maison de la Culture, elle a offert à un public conquis un échantillon de son talent.
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Un style caméléon
Sur scène, Automne se distingue par sa polyvalence vocale et artistique. « Je chante en tant qu’homme et en tant que femme » , tient-elle à rappeler, revendiquant cette dualité comme une force. Son répertoire est tout aussi varié. « Je chante du rap, du R’n’B, du tahitien, de l’italien, de l’espagnol » , liste-t-elle.. Et une bonne dose de Rihanna, popstar mondiale venue des Barbades et source d’inspiration majeure. « Elle m’a donné l’envie de continuer. Elle est partie d’une petite île et est devenue célèbre dans le monde entier. Pourquoi pas moi ? » , suggère-t-elle.
Car plus grande est la scène, plus relâchée Automny s’y sent. Même si elle ne regrette pas sa participation à un concours comme le Nescafé Star, elle s’épanouit plus dans un registre international. « C’était pas fait pour moi, c’était plus orienté vers la musique locale, reconnaît-elle. C’est pas comme The Voice ou Amrica’s Got Talent, ils ont du se demander ce que je faisais là, que je devais être en Amérique normalement » , sourit-elle.
Cap sur la métropole avec It’s Nave
Mais loin de se laisser abattre, elle continue à se produire et attire l’attention du groupe mythique It’s Nave, avec qui elle chante tous les vendredi soir au BBL. Ce sont eux qui, la voyant s’extasier sur Believe de Cher, l’invitent un soir à chanter avec eux. « Depuis, ils ne m’ont jamais lâchée, confie-t-elle avec enthousiasme. Je suis un peu comme leur mascotte » . Une tournée en France est même prévue en avril. Des mini-concerts sont prévus à Paris et dans plusieurs villes. Une première expérience en Europe pour elle, qui la remplit d’excitation. « Tant que je chante et que j’ai un public, j’ai réussi » , considère-t-elle.
Et Automne de conclure par un jeu de mot de son cru : « Si nous n’existions pas, le monde serait monotone » .