TNTV : Vous avez présenté hier la stratégie du gouvernement par rapport à la nouvelle fermeture provisoire des frontières et l’impact de cette fermeture au fenua. Trois mois d’arrêt complet du secteur touristique, cela pourrait coûter un peu plus de 60 milliards au Pays. Les mesures pour sauver les emplois sont conséquentes (…) Où allez-vous chercher les finances ?
Edouard Fritch, président de la Polynésie : « (…) Pour répondre à votre question, nous trouverons l’argent. Si j’ai fait cette annonce avec le gouvernement, c’est que nous sommes aujourd’hui sûrs de pouvoir financer en tous les cas pour les trois mois à venir, les mesures que nous avons mises en place. Nous avions prévus une partie du financement puisque le Diese existait encore en début d’année, sur le budget 2021. Nous avons de quoi en trésorerie, pour faire face à ces engagements. »
Bien sûr, il faut aussi le soutien de l’Etat pour ces nouvelles mesures. L’Etat est revenu sur son soutien à l’économie polynésienne depuis le début de l’épidémie. L’an dernier, près de 8 milliards ont été versés aux acteurs économiques du territoire au titre des différents dispositifs de soutien. Le fonds de solidarité des entreprises a représenté à lui seul plus de 98% du montant total des aides versées. Un peu plus de 500 entreprises en ont bénéficié. 869 entreprises ont eu recours au prêt garanti par l’Etat auprès d’une banque de la place avec l’application de nouvelles mesures. Le dispositif a été prolongé jusqu’au 30 juin…
« Et représente aujourd’hui un engagement de l’ordre d’un peu plus de 50 milliards au travers de ce prêt garanti par l’Etat. Il n’y a pas de sujet. Dans la gestion de cette crise, nous faisons ensemble avec l’Etat, le nécessaire d’abord pour nous protéger contre la covid puisque je n’oublie pas que l’Etat nous a envoyé du personnel médical pour accompagner le personnel de l’hôpital. Et puis ces aides à l’entreprise, auxquelles nous viendront nous au niveau des salariés en tous les cas, apporter beaucoup. Donc, je crois que nous sommes prêts. Nous sommes fin prêts parce que, je vais vous dire, la décision a été difficile. Ce que nous souhaitons c’est effectivement, pendant ces deux trois mois où nous allons enfermer le Pays, où nous allons filtrer toutes les personnes qui viendraient en Polynésie française, qui bénéficient de ces fameux motifs impérieux, nous veilleront à ce que ce covid variant ne vienne pas chez nous. Nous voulons protéger cette population et donc limiter la circulation des hommes entre la Polynésie française et l’extérieur. »
Mais comment peut-on être sûr que le variant n’est pas déjà au fenua puisque nous n’étions pas en mesure de le détecter il y a encore peu de temps ?
« On ne peut pas être sûrs. C’est vrai qu’il y a encore peu de temps nous n’avions pas les moyens. Aujourd’hui nous avons les moyens. Et l’institut Malardé et son directeur ont pour mission que, dès qu’il y a un doute, nous procédions aux analyses, des analyses séquentielles. Nous avons aujourd’hui le moyen de détecter les variants. Et, a priori, je puis vous dire qu’il n’est pas encore en Polynésie française. Il faut effectivement que nous fassions tous ensemble l’effort d’arrêter de circuler. Je demanderai aux Polynésiens de rester en Polynésie française (…). Les mesures que nous avons prises seront encore appliquées mais j’espère libérer quelques contraintes mais nous ne seront pas confinés contrairement à d’autres pays qui sont obligés de se confiner à cause de ce variant. Donc on se protège, on continue à porter les masques et on fait attention. »
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Pour revenir sur l’aide de l’Etat, vous parliez de 50 milliards. C’est l’aide que vous espérez de l’Etat après avoir pris la décision de fermer les frontières ?
« C’est le montant des emprunts dans le cadre du prêt garanti par l’Etat qui sont mis à disposition de nos grosses entreprises. Air Tahiti Nui va en bénéficier, Air Tahiti va en bénéficier, d’autres grandes entreprises du Pays vont bénéficier de cet emprunt qui leur permet de répondre à des contraintes de trésorerie puisque, rappelez vous qu’ils étaient obligés de payer le mois de congés pendant le premier confinement. Il y a eu des dépenses qui ont puisé effectivement dans les capacités des entreprises à faire face dans leur trésorerie. Et aujourd’hui avec cette seconde mesure, effectivement ils risquent d’être en difficulté donc l’Etat va continuer à nous accompagner. »
Vous vous orientez vers un second prêt alors que vous aviez affirmé devant l’assemblée il y a quelques mois que vous ne souhaitiez pas endetter la Polynésie sur des années. Vous avez changé d’avis ?
« Non, je n’ai pas changé d’avis. Je suis précautionneux, je dois faire des prévisions. J’espère que, si cette fermeture des frontières chez nous durait 6 mois comme je disais hier dans la conférence de presse, là ce sont les faillites, ce sont les licenciements qui vont faire du mal à la Polynésie française. Ce ne sera plus le covid. Je ne veux pas arriver à ce stade-là bientôt, mais je prévois toujours le cas où malheur nous arriverait. C’est la raison pour laquelle nous allons préparer le second emprunt, par précaution. Et, puisqu’on en parle, on va même avec le ministre de la Santé, prévoir une capacité supplémentaire pour les salles de réanimation à l’hôpital. Je ne sais pas ce qui peut se passer. Nous avons eu très peur au mois de novembre dernier. Je ne veux plus avoir peur demain. Donc on va se préparer. »
Emmanuel Macron espère vacciner tous les volontaires majeurs d’ici juin, pourquoi votre objectif n’est-il que de 40% au fenua ?
« Parce que avec 40% de la population nous sommes aux alentours de 80 000 vaccins. Je pense qu’avec ce nombre de vaccins nous arriverons, en tout cas dans la zone urbaine ici à Tahiti et Moorea, nous pouvons arriver à immuniser, en tout cas à protéger un grand nombre. Mais bien sûr que nous continuerons la campagne de vaccination jusqu’à ce que nous puissions inoculer le vaccin à tout le monde. C’est l’objectif mais comme vous le savez aussi, nous ne maîtrisons pas complètement le ravitaillement en matière de vaccins.
Je voulais vous dire aussi : pour ce qui est de la quatorzaine (…) effectivement un avion arrivera encore demain matin (ce jeudi, NDLR). Les deux derniers avions ont quitté la métropole juste avant les mesures prises par le Premier ministre qui ont été reportées au mardi. Donc nous voulons organiser une quatorzaine dans notre pays, dans l’objectif de pouvoir suivre pas à pas ces personnes qui vont bénéficier de motifs impérieux pour pouvoir encore voyager. J’espère qu’ils ne seront pas nombreux, je crois qu’ils ne seront pas nombreux. Les voyageurs américains ne pourront pas accéder chez nous puisque les Etats-Unis sont inaccessibles, reste à gérer le problème des voyageurs européens. »
Des sites d’isolement ont été mis en place ?
« Nous sommes à peu près à 80-90 chambres de disponibles, que nous avons. Nous avons loué un hôtel en ville et nous avons pris l’ancien hôtel de Puunui qui est à Vairao et qui était inoccupé. Donc nous avons ces deux sites. Je cherche un troisième site sur lequel nous tomberons d’accord je pense d’ici la fin de la semaine et vraisemblablement, les mesures d’application de la quatorzaine ici en Polynésie, débuteront soit dimanche soit lundi (…) Mais, ce qu’il faut savoir c’est que les vols qui viennent en provenance de métropole seront des vols qui seront chargés avec des personnes qui ont le motif impérieux pour pouvoir se déplacer. J’ai demandé au haut-commissaire qu’on soit très vigilants sur ces motifs, qu’on vérifie le bien fondé des motifs invoqués : professionnel, médical ou familial et qu’on restreigne au maximum le nombre de personnes qui voyages dans les jours à venir. »