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Coral Gardeners projette de planter un million de coraux d’ici 2025

(Crédit photo : Coral Gardeners)

La minute verte - Coral Gardeners


Depuis 2017, Coral Gardeners participe à la sauvegarde des récifs coralliens de Polynésie. Ses missions : la restauration corallienne, la sensibilisation, la recherche et le développement. L’organisation, basée à Moorea, est composée d’une trentaine de jeunes tous très motivés et très impliqués. Ils plantent des coraux et nous permettent même d’en adopter. « Tout a commencé quand j’avais 16 ans. On est partis surfer avec mon petit frère et quelques amis. On est arrivés au spot et on a réalisé que les récifs coralliens étaient en train de mourir alors qu’ils nous donnaient énormément dans notre vie. On avait envie d’agir, de démarrer une initiative, et ne pas attendre que ça vienne de l’extérieur » confie Titouan Bernicot, fondateur de Coral Gardeners.

Le jeune homme a arrêté ses études pour se lancer pleinement dans son projet avec ses amis pêcheurs et surfeurs : « Beaucoup de personnes me disaient que je n’avais pas assez de connaissances et que donc, ça ne pouvait pas marcher. Alors on a travaillé comme des fous, nuit et jour. On s’est entouré des bonnes personnes… Et on a essayé de voir les choses un peu différemment et de mettre en place des choses qui paieront sur le long terme (…) Aujourd’hui, on arrive à des résultats parmi les plus avancés au monde dans le domaine de la restauration corallienne ».

« Mon rêve, c’était de créer un nouveau métier. Le métier de jardinier du corail. On plante des arbres sur terre depuis des millénaires, alors pourquoi on ne peut pas planter des coraux sous l’eau ? »

Titouan Bernicot, fondateur de Coral Gardeners

Le corail est un organisme vivant. Aussi appelés « forêts tropicales aquatiques », les récifs coralliens sont les poumons de nos océans. Les océans absorbent une bonne partie du CO2 de notre planète et ils produisent plus de la moitié de l’oxygène qu’on respire. La pêche, le tourisme… dépendent de la bonne santé des écosystèmes récifaux qui pourraient être les premiers écosystèmes à disparaitre à l’horizon 2050. Sur les trois dernières décennies, près de 30% des récifs coralliens dans le monde ont disparu. Un constat alarmant.

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« Peu de personnes ont la chance de pouvoir côtoyer les récifs coralliens, et toute la vie marine. Chez les Polynésiens, la mer et la terre ne font qu’un. Tout ce qui affecte la terre va affecter la mer, et vice versa. On a vraiment besoin qu’il y ait un maximum de personnes autour du monde qui savent ce qu’est un corail et pourquoi les récifs coraliens sont aussi magnifiques et importants, et qu’ils aient cette envie, cette curiosité, de faire quelque chose. (…) C’est un problème mondial. C’est vrai que la situation est alarmante, ce sont les écosystèmes les plus impactés par le réchauffement de la planète, la surpêche, les pressions humaines… La restauration corallienne n’est pas la seule solution. Il faut aussi faire de la sensibilisation pour arriver à inspirer la population locale » indique Titouan.

Lors de la sensibilisation avec des enfants de l’île (Crédit photo : Coral Gardeners)

Coral Gardeners a des programmes de restauration corallienne à Moorea, mais aussi à Tikehau, à Ahe, ou encore à Teahupoo. L’organisation a déjà planté 24 700 coraux depuis sa création, et prévoit d’en planter 15 000 rien qu’en 2022.

Côté finances, elle peut compter sur des donations de philanthropes et des partenariats avec National Geographic ou encore la World Surf League, et le soutien du co-fondateur de Google Larry Page ou encore du cousin d’Elon Musk, mais pas seulement : « On a eu la chance au début d’avoir une subvention de la DIREN et du gouvernement polynésien, mais après, on ne voulait pas dépendre des programmes de financement traditionnels, et des appels à projets. On voulait créer un site internet, avoir une communauté en ligne qui puisse suivre nos avancées et nous soutenir. Aujourd’hui, Coral Gardeners a un modèle économique assez unique. On a levé en 5 ans plus de deux millions d’euros grâce aux adoptions de coraux sur notre site, de gens du monde entier. (…) Cela nous permet de planter plus de coraux, de restaurer plus de récifs, et investir dans plus de programmes de sensibilisation, d’innovation ».

Le projet de conservation des récifs coralliens le plus suivi au monde

L’organisation de Moorea est aujourd’hui le projet de conservation des récifs coralliens le plus suivi au monde : « C’est incroyable de se dire qu’au départ, tout a démarré dans ma chambre. Avec mes potes d’enfance, on avait quelques idées, mais surtout des rêves qu’on voulait réaliser. Jamais je n’aurai pensé qu’en 5 ans, on en serait arrivé là » admet Titouan. Âgé de 24 ans aujourd’hui, le jeune homme peut se vanter d’avoir déjà été invité à Genève par l’ONU.

L’une des forces de Coral Gardeners, c’est sa communication. Leur compte Instagram est suivi par plus d’un demi-million de personnes soit le double de la population en Polynésie : « Même du milieu de l’océan Pacifique, on peut arriver à faire passer des messages importants aux quatre coins du monde. (…) On a essayé de redéfinir les codes de la conservation marine, la rendre plus attractive, provocatrice, ‘sexy’ et qui parle à un public jeune. On s’est inspiré du monde de la mode. On voulait aussi créer de l’émotion chez les gens. On s’est plus concentré sur la partie positive, les gens veulent voir la beauté de ces écosystèmes ».

200 millions de personnes ont été touchées en 5 ans par leurs actions via les réseaux et plus de 4 500 sur le terrain lors d’interventions dans les écoles, avec les touristes… Des stars viennent planter leurs coraux comme Mareva Galanter, Italo Ferreira, Vaimalama Chaves, Jack Johnson, Diplo, Lambert Wilson… Des scientifiques prestigieux viennent régulièrement les voir et les suivent de près.

Sauver les océans avec la technologie

Avec son projet baptisé « l’Odyssée 2025 », Coral Gardeners a pour ambition de planter un million de coraux d’ici 2025 et de créer un mouvement de « jardiniers du corail » tout autour de la planète : « Il y a des récifs coralliens tout autour de l’équateur, et il y a même des récifs à Toulon ou à Marseille, ce ne sont pas des coraux d’eaux tropicales. On a besoin que ces coraux qui ne peuvent pas parler aient toute l’attention qu’ils méritent ». L’organisation souhaite permettre aux communautés locales de pêcheurs et de surfeurs d’autres pays de prendre soin de leurs récifs.

« On aimerait développer ce projet démarré par la jeunesse polynésienne autour du monde. »

Titouan Bernicot

L’organisation a aussi créé un centre de recherche et de développement : CG Labs, consacré à l’innovation, la technologie et la science. Elle a mis en place Reef OS, un réseau de caméras connectées qui récolte des données sur les coraux.



Elle travaille sur une application sous-marine qui réalise un suivi scientifique (nombre de poissons, croissance des coraux, température) en temps réel des nurseries connectées. Avec l’université de Hawaii, Coral Gardeners élabore un robot qui va cartographier les récifs coralliens en 3D, et elle a aussi un partenariat avec l’université américaine de Cornell où sont étudiées la bioacoustique et l’intelligence artificielle. « On essaie de trouver les nouvelles méthodes, les nouveaux outils, pour être de plus en plus performants sur le terrain » indique Titouan.

Malgré la situation inquiétante actuelle pour les récifs coralliens, le fondateur de Coral Gardeners reste en tous les cas résolument optimiste : « J’ai l’impression que les jeunes sont plus conscients de ce qu’il se passe. Je reste très optimiste pour les décennies à venir. Cela ne sert à rien de paniquer, au contraire, il faut se poser et réfléchir à ce que l’on peut mettre en place. L’innovation va aussi aider à vivre davantage en harmonie avec la nature. Les méthodes arrivent, cela ne fait que quelques décennies que l’on plante des coraux. Les avancées sont énormes ces 5 dernières années. Il y a une vraie prise de conscience sur la scène internationale qui est en train de se passer ». Et de préciser : « On a rien inventé. Les Polynésiens avant, avaient déjà mis en place le rahui, ils savaient coexister avec la nature, quand il fallait pêcher ou pas… Il s’agit juste de réinspirer, de se réapproprier ce patrimoine culturel et le mettre en place ».

(Crédit photo : Coral Gardeners)

Comme l’indique Titouan, chaque petit geste compte, et « ne rien faire, n’est pas une solution » : « On a tous le pouvoir de réduire notre empreinte carbone au quotidien, d’aider des groupes qui font des actions environnementales… et ça peut commencer par l’adoption d’un corail. Je pense que c’est important que nous, les jeunes, on voit les choses en grand, et qu’on fasse tout pour réaliser nos rêves car on n’a pas le temps. C’est maintenant qu’il faut agir. Les récifs coralliens pourraient être tous condamnés d’ici 2050″.

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