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L’agriculture biologique pour « produire plus et mieux »

Marc Dufumier, ingénieur en agronomie (crédit photo : Tahiti Nui Télévision)

L'agriculture biologique pour "produire plus et mieux"

Qu’est-ce que l’agroécologie ?

« C’est une discipline scientifique. Les agro-écologues, ce sont ceux qui étudient les écosystèmes aménagés par les agriculteurs. Et quand on veut promouvoir des formes d’agricultures biologiques par exemple, il faut vraiment bien comprendre toutes les interactions qu’il peut y avoir entre les plantes cultivées, les animaux, les ravageurs et éventuellement les prédateurs des ravageurs, bien comprendre comment fonctionnent ces écosystèmes aménagés par les agriculteurs. Il y a des fondements scientifiques donc à la pratique de l’agriculture biologique ».

Que pensez-vous des méthodes agricoles utilisées en Polynésie ? Est-ce qu’elles sont adaptées au contexte selon vous ou est-ce qu’il faudrait faire mieux ?

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« Avec la crise et la guerre en Ukraine, un certain nombre d’aliments, comme le pain et les pâtes, leur prix va croître. Idem pour les aliments pour le bétail et les poules pondeuses. Donc effectivement, il faut multiplier le nombre de ces activités agricoles pour sa propre consommation ou la vente en circuit court, et pour qu’on puisse effectivement produire des produits de substitution d’importation parce qu’ils vont devenir très chers ».

« Ces formes d’agricultures biologiques sont plus résilientes et plus adaptées à la fréquence et l’intensité accrues des accidents climatiques extrêmes »

Marc Dufumier, ingénieur en agronomie

Il faut donc produire plus ?

« On peut produire plus et mieux, l’agriculture biologique peut faire ça. Mais soyons francs, c’est aussi plus de travail. Parce qu’il faut soigner les plants, c’est artisanal, ce n’est pas de l’agriculture industrielle. Et le surcoût en travail doit être correctement rémunéré. Et le problème, il est souvent là : l’agriculture biologique peut être accessible pour des couches aisées qui veulent une alimentation saine, mais alors qu’en est-il des couches dont le pouvoir d’achat est moindre ? »

Alors comment faudrait-il faire pour donner sa chance à tous ?

« Et bien justement, je pense que c’est la responsabilité des autorités politiques de pouvoir rémunérer les services environnementaux qui sont apportés par ces agriculteurs parce que, non seulement les agriculteurs bio produisent de bons produits sains, sans pesticides, sans perturbateurs endocriniens, sans antibiotiques dans la viande, mais en même temps, rendent des services environnementaux. Par exemple, fabriquer de l’humus et séquestrer du carbone dans les sols, c’est conforme avec le traité de la COP21. On contribue à atténuer le réchauffement climatique. Puis ces formes d’agricultures biologiques diversifiées, elles sont aussi plus résilientes et plus adaptées à la fréquence accrue et l’intensité accrue des accidents climatiques extrêmes. Donc tout ça, c’est du travail supplémentaire qui doit être correctement rémunéré ».

Vous avez rencontré les agriculteurs de Polynésie. Quels ont été leur retour, les attentes, leurs inquiétudes ?

« Je sors d’une réunion où il y avait plusieurs producteurs, les uns bio, les autres non. Et j’ai trouvé l’ambiance très positive dans le sens où ils veulent aider à ce que la majorité de la population puisse avoir une alimentation saine avec des agriculteurs correctement rémunérés ».

Vous allez animer une conférence vendredi à 18h00 au Village de l’Alimentation et de l’Innovation. Qu’est-ce que le public va pouvoir apprendre ce soir-là ?

« J’ai envie de présenter les fondements scientifiques de cette agriculture biologique qui a souvent été présentée comme un retour en arrière alors que non. C’est très savant, et ça progresse beaucoup. Aujourd’hui, en microbiologie des sols, on travaille beaucoup sur des champignons mycorhiziens un peu comme la truffe qui s’incruste dans la racine d’un arbre. Mais ces champignons peuvent débusquer des éléments minéraux coincés dans les argiles, assurer une stabilité structurale des sols et donc leur permettre de résister mieux à l’érosion. Donc il y a les pratiques paysannes parfois portées par des traditions culinaires mais aussi des fondements scientifiques ».

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