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Pour Emmanuel Macron, l’exploitation minière en eaux profondes doit cesser

Emmanuel Macron, à l'océanarium de Lisbonne, le 27 juin 2022. (Crédit photo : Ludovic MARIN / AFP)

La déclaration du Président de la République converge vers la position exprimée récemment par le président Edouard Fritch auprès de la mission sénatoriale conduite par le sénateur Teva Rohfritsch. En effet, le Président Fritch a fermement fait part de son désir d’amplifier les études et recherches sur l’océan afin d’acquérir plus de connaissances sur nos fonds marins. En revanche, il a clairement exprimé, à la mission sénatoriale, sa totale opposition à toute exploitation des fonds sous-marins : « Comme nous l’avons toujoursdit, cette matière c’est de notre compétence […] ça nous réjouit, ceci montre que c’est de notre compétence de décider sur l’exploitation des fonds marins ».   

À Lisbonne, le chef de l’État confirme ainsi les propos qu’il a eu récemment sur ce sujet avec le président Edouard Fritch à l’occasion du Blue Climate Summit qui s’est tenu à Papeete. Il a déclaré jeudi qu’un cadre juridique était nécessaire pour empêcher l’exploitation minière en eaux profondes de continuer, et a appelé les pays à mettre leurs ressources financières et scientifiques pour mieux comprendre et protéger les fonds marins : « Nous devons créer un cadre juridique pour mettre fin à l’exploitation minière en eaux profondes et empêcher que de nouvelles activités ne mettent en danger ces écosystèmes », a déclaré Emmanuel Macron lors d’un événement organisé en marge de la Conférence sur les océans des Nations unies. « Il est également nécessaire que nous donnions les moyens à nos scientifiques de mieux connaître les fonds marins, nous devons mieux les comprendre pour mieux les protéger », a-t-il ajouté.

Du côté de l’opposition, en revanche, les réactions à l’annonce du président de la République sont mitigées :

Pour le leader du Tavini Huiraatira, Oscar Temaru, l’État doit encore honorer certains engagements : « D’abord, j’aimerais dire à la France que l’ONU attend toujours qu’elle fournisse toutes les conséquences des essais nucléaires […] de respecter également les résolutions qui ont été adoptées à New-York par l’ONU, qui rappellent à la France notre droit de propriété, notre droit de souveraineté sur toutes les ressources, ça nous appartient tout ça ». Du côté du parti écologiste Heiura-les-Verts, l’annonce du président de la République ne convainc pas : « Lorsqu’il était en Polynésie, il a dit tout son contraire. À l’intérieur de la Z.E.E , il a bien expliqué que l’exploration devait aboutir sur l’exploitation. Et la position de Heiura a toujours été très ferme là-dessus : il doit y avoir une résolution sur l’arrêt complet de ce qui pourrait être l’exploitation, et même de l’exploration ».

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Bien que le président français ait émis des inquiétudes sur l’exploitation minière des eaux profondes, la France dispose d’un contrat d’exploration valable jusqu’en juin 2026 sur une zone de 75 000 kilomètres carrés (28 958 milles carrés) dans la région de Clarion-Clipperton, dans le Pacifique Nord, avec l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer. Plusieurs régions du Pacifique sont riches en nodules polymétalliques.

Heremoana Maamaatuaiahutapu, à Lisbonne(Crédit photo : présidence de la Polynésie française)

Le ministre de la Culture et de l’Environnement Heremoana Maamaatuaiahutapu a pu par la suite échanger avec Emmanuel Macron à l’issue de la rencontre. À l’occasion de ce sommet de Lisbonne, Heremoana Maamaatuaiahutapu a pu mettre en avant les nombreuses initiatives prises par la Polynésie en faveur de la protection de l’océan, la préservation des ressources et la gestion durable de celles-ci. Les mesures mises en place par la Polynésie française interpellent les participants présents à la conférence de l’ONU sur les Océans qui citent le fenua comme un exemple à suivre pour assurer l’avenir de la planète bleue.

En fermant la porte à une exploitation des ressources minières du fond des océans, notamment en Polynésie française, le président de la République s’inscrit résolument dans la démarche globale initié par le président Edouard Fritch lorsqu’en 2018, il a fait de la Polynésie et de sa zone économique exclusive le plus grand sanctuaire marin au monde et la plus vaste aire marine gérée de la planète.

Opposition des États du Pacifique

Pour rappel, l’Autorité internationale des fonds marins (AIFM), un organisme des Nations unies, élabore actuellement des règlements régissant l’exploitation minière des fonds marins en haute mer -des zones situées en dehors de toute juridiction nationale. Tant que les règles mondiales ne sont pas en place, l’exploitation minière des fonds marins n’est pas autorisée.

Des cheminées hydrothermales dans les fonds marins, qui recèlent du cobalt et de terres rares. (Crédit : Wikimedia Commons/CC BY 4.0/Marum)

Plusieurs nations, comme les îles du Pacifique Palau et Fidji, mais aussi le Chili, ont appelé à un moratoire mondial sur toutes les activités d’exploitation minière en haute mer, invoquant des préoccupations environnementales et le manque de données scientifiques suffisantes. Un moratoire également demandé par de nombreuses ONG dont l’UICN.

Mais tous les pays ne sont pas contre. La Chine est un leader dans l’exploration minière en eaux profondes, et de petites nations se sont également impliquées. La minuscule nation insulaire de Nauru a demandé l’an dernier à l’ISA d’accélérer l’adoption d’une réglementation sur l’exploitation minière des fonds marins.

Le mois dernier, les pays du G7 ont convenu qu’ils ne consentiraient à de tels projets miniers que s’ils ne portaient pas gravement atteinte à l’environnement. Peter Thomson, envoyé spécial des Nations Unies pour l’océan, a déclaré à Reuters qu’il pensait que des réglementations visant à contrer ces préoccupations apparaîtraient bientôt.

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