Dans le premier dossier, l’homme de 48 ans et sa compagne avaient été appréhendés le 24 février dernier à l’aéroport de Los Angeles par les agents américains. Ils transportaient 189 grammes d’ice cachés dans leurs sous-vêtements. Informés par leurs collègues californiens, les douaniers avaient interpellé le couple dès sa descente de l’avion à Tahiti-Faa’a.
En garde à vue l’homme a expliqué avoir agi pour le compte d’un trafiquant, actuellement incarcéré à Tatutu, qui lui avait promis en retour 2 millions de francs. Le prisonnier, qui a nié être le commanditaire, n’a finalement pas été poursuivi faute de suffisamment d’éléments à charge.
“J’ai décidé de faire appel par rapport à mon travail. Je ne conteste pas ma culpabilité (…) Avant ça, je n’ai jamais fait de trafic. Je ne suis pas un consommateur d’ice, ni un revendeur”, a déclaré ce jeudi le quadragénaire. Un technicien audiovisuel, en CDI, aux confortables revenus, également vice-président d’une fédération de sport.
Sa compagne, guide touristique, a pour sa part expliqué avoir accepté de transporter deux boulettes de drogue “par amour” pour son conjoint. Mais la jeune femme, actuellement enceinte de 5 mois, a assuré qu’elle n’était “au courant de rien” jusqu’à ce qu’elle se retrouve devant le fait accompli à l’aéroport.
Le second couple avait, lui, été arrêté à peine trois jours plus tôt, le 21 février, à l’aéroport de Faa’a. Le chien des douanes avait “marqué” leurs bagages. 440 grammes d’ice s’y trouvaient dissimulés dans cinq chaussettes.
L’homme, un fonctionnaire de l’administration polynésienne, a été condamné à 4 ans de prison ferme en comparution immédiate, mais n’a pas fait appel. Il avait expliqué s’être risqué à cette importation illégale pour rembourser une importante dette de jeux. Seule son épouse a donc de nouveau été jugée ce jeudi.
“Pourquoi pas ? C’est bien d’être riches”.
“Je suis innocente monsieur le juge. Je n’étais au courant de rien. Si je l’avais su, je lui aurais interdit de le faire. Il m’a utilisée. C’est impardonnable. Ce sont mes enfants et moi qui payons (…) A cause de lui, nos enfants sont seuls, dehors. Je lui en veux tellement”, a -t-elle dit, ajoutant qu’elle entendait “demander le divorce”. “Laissez-moi rentrer auprès de nos enfants”, a encore supplié la prévenue.
Une “position de victime” pour l’avocate générale persuadée que la jeune femme savait que de la drogue se trouvait dans les valises et qu’elle avait participé au trafic “en toute connaissance de cause”.
Au-delà des faits, la magistrate a pointé deux dossiers “révélateurs de la situation actuelle en Polynésie française” où des personnes bien insérées agissent avec pour seule motivation “l’appât du gain”.
“Des gens qui n’ont aucune condamnation sur leurs casiers judiciaires mais qui se disent : ‘Pourquoi pas ? C’est bien d’être riches’. Des gens qui sont parfois instituteurs, infirmiers (…) gardiens de prison. Des gens comme monsieur payés 425 000 francs par mois et qui n’ont pas de dépendance à la drogue mais qui veulent plus d’argent. Tout ça au mépris de la santé publique, de la santé des enfants polynésiens”, a-t-elle fustigé.
Et la magistrate de rappeler que selon une étude de 2022, plus de 10 000 habitants consommeraient de l’ice au fenua. Une situation qui, selon elle, “s’est aggravée” en 2 ans.
Concernant le premier couple, elle a requis une peine de 4 ans ferme pour l’homme et de 3 ans pour sa compagne, ainsi que le paiement d’une amende de 45 millions de francs. Dans le second dossier, elle a demandé que l’épouse soit condamnée comme son mari à 4 années de détention ainsi qu’à une amende solidaire de 40 millions de francs. La cour d’appel rendra les deux jugements le 1er août.