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Edouard Fritch prêt « à réduire » la TVA sociale

Tête de liste du Tapura Huirratira pour les Territoriales, président du Pays et candidat à sa propre succession, Edouard Fritch était l’invité des journaux de TNTV, ce jeudi.

TNTV : Vous êtes la tête de liste du Tapura Huiraatira, président du Pays et candidat à votre propre succession. Avant d’aborder la campagne, votre bilan et votre programme, on l’a entendu en début de journal, certaines associations de jeunesse ne se sentiraient pas assez écoutées par le gouvernement. Un colistier de A Here Ia Porinetia déclare, je cite : « on a l’habitude de les voir octroyer des aides financières à leurs amis ». Qu’est-ce que vous répondez ?

Edouard Fritch : « C’est complètement faux. Je peux vous dire qu’aujourd’hui nous faisons beaucoup d’efforts pour notre jeunesse. Au gouvernement, deux ministres s’occupent de la jeunesse : Naea Bennett, à qui j’ai confié ce portefeuille important, mais aussi le ministère de l’Education avec Christelle Lehartel qui accorde beaucoup de subventions, en particulier pour le secondaire, afin que les enfants veuillent venir à l’école, qu’elle ne soit pas un repoussoir pour ces enfants. Nous avons aussi mis en place, pour aider et accompagner nos jeunes qui viennent des archipels, et on fait de même dans les collèges des archipels, ce qu’on appelle les WEI, les week-ends passés en internat pour éviter que ces jeunes aillent dans la nature. Cela nous coûte près de 450 millions de francs. Nous payons des associations pour qu’elles viennent entretenir ces enfants. Je dis bien entretenir parce qu’il faut parler de beaucoup de choses avec les enfants. Certaines associations qui se plaignent aujourd’hui… bon… nous sommes dans une période politique. Si elles n’arrivent pas à avoir leurs subventions, je pense qu’il doit y avoir de vraies difficultés de constitution de dossiers ou simplement par ignorance. Mais nous intervenons parce que la jeunesse est un sujet. Et la jeunesse commence pour nous dès le jeune âge à l’école et se termine à l’université ».

TNTV : On revient à présent à cette campagne des Territoriales. On vous voit assez peu finalement dans les médias. Pourtant, vous vous présentez à votre propre succession. Peut-on y voir une stratégie politique, ou vous partez déjà gagnant ?

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Edouard Fritch : « Le terrain m’a beaucoup manqué. Nous avons eu deux années d’emprisonnement puisque nous ne pouvions plus tenir de réunions publiques, nous ne pouvions même plus sortir à certains moments. Et j’ai effectivement fait le choix de faire mieux connaitre mes colistiers au travers des médias et au grand public. Moi-même, j’ai fait beaucoup de terrain depuis 2 mois. Tous les soirs, je suis en réunion publique. Comme ce soir, où je vais à Pirae après votre interview. Donc, c’est un choix que j’ai fait. Mais ce choix n’est pas simplement lié à moi. Je voulais aussi que le grand public connaisse les candidats que nous mettons sur les listes. Ils sont 28 à avoir fait des interviews, à avoir participé aux débats au sein de notre équipe. Et parmi ces 28, il y a 10 nouvelles têtes que nous avons mises sur nos listes et qui sont venues s’exprimer au nom du Tapura Huiraatira ».

TNTV : Vous souhaitiez mettre de nouvelles personnes en avant…

Edouard Fritch : « C’est ça. Nous faisons partie d’une génération qui commence à être classée dans les archives ».

TNTV : Être le candidat sortant, est-ce un atout ou une difficulté ?

Edouard Fritch : « Je n’étais pas sûr de pouvoir me présenter en tant que successeur à ma fonction de président. Mais j’avais décidé, dès le mois d’octobre, de mener la liste du Tapura Huiraatira parce que j’estime que nous venons de passer 5 années de difficultés sans nom. Avec la crise économique qu’il a fallu relever, en 2013, 2014, c’était très compliqué. En 2019, nous avons commencé à connaître des records puis est arrivée la crise du Coronavirus. Nous avons dû repartir, et nous affichons aujourd’hui de bons résultats. Je ne veux pas abandonner mon pays. A la vue des différents programmes présentés aujourd’hui à la population, je ne vois pas vraiment ce qui peut être apporté de plus pour aider notre pays à sortir de l’ornière. Parce que nous n’en sommes pas complétement sortis, même si les feux sont au vert. Nous sommes encore dans une situation fragile. Donc, il nous faut avoir, demain, une majorité qui travaille dans la stabilité, qui mette en exercice son expérience. Et, surtout, je crois qu’il faut beaucoup de proximité pour ce pays ».

TNTV : Le « respect » est le mot d’ordre du Tavini pour ces élections. Comment percevez-vous votre principal adversaire, sorti vainqueur des dernières Législatives ?

Edouard Fritch : « J’ai du respect pour eux. S’ils sont sortis vainqueurs, c’est que la population en a décidé ainsi. Je respecte le vœu des électeurs. J’en tire les leçons, parce qu’il y a des leçons à tirer de cet échec. Le respect, je suis un peu étonné qu’ils utilisent ce mot, parce qu’en fin de compte, composer un gouvernement avant que les élections ne soient terminées, faire fi de ce que feront les électeurs demain, je pense que c’est aussi un manque de respect par rapport à la population. Qui vous dit, demain, qui va gagner ? Je ne sais pas ».

TNTV : Redoutez-vous ce duel du deuxième tour ?

Edouard Fritch : « Non, je ne le redoute pas. Je vais au combat. J’ai travaillé avec mes coéquipiers et je pense qu’on a mis le maximum de notre côté. Je pense gagner. J’espère que je vais gagner. Cela dépendra de nos électeurs. Mais nous avons mis en route, en tous les cas, une machine à gagner ».

TNTV : L’une de votre stratégie est de vous appuyer sur les maires qui sont proches de leurs administrés. Sont-ils selon vous l’atout qui fera la différence ?

Edouard Fritch : « Depuis le début de ma prise de fonction en 2014, j’ai effectivement appelé les maires à travailler avec le gouvernement. Cela fait un moment que je suis dans les différents gouvernements, depuis 1986. Et j’y trouve une faiblesse à laquelle j’ai voulu apporter une solution. La faiblesse provient de l’éclatement de notre pays.  Si vous m’interrogez aujourd’hui sur ce qu’il se passe sur une île des Tuamotu, à Nukutavake par exemple, qu’est ce que je vais vous répondre ? Si je n’ai pas d’informations qui remontent des maires, je ne peux pas vous répondre. Il ne faut pas cacher la vérité. Ce que je souhaite faire, et c’est effectivement une stratégie, c’est qu’un certain nombre de maires puissent venir à l’assemblée de la Polynésie française, puissent être le relais de ces populations qui sont tellement éloignées de nous et qui ne sont pas audibles, y compris par les médias. Mon espoir, c’est que ce changement qui sera apporté à l’assemblée de la Polynésie française ira vers une meilleure connaissance de nos îles et de nos populations. C’est la raison pour laquelle j’ai pris les maires sur ces listes. Car je crois qu’ils ont toute leur place au sein de cette assemblée ».

TNTV : Parlons maintenant d’une mesure décriée depuis que vous l’avez mise en place : la TVA sociale. La majorité des partis en lice pour ces élections désirent la supprimer. Cette mesure est également décriée par les économistes. Comptez-vous la maintenir en cas de victoire et, si oui, pour combien de temps ?

Edouard Fritch : « Ce 1% de taxe pour la CPS (Caisse de prévoyance sociale, ndlr) est indispensable aujourd’hui. Je vous renvoie aux déclarations du président du Conseil d’administration de la CPS, au mois de septembre ou octobre dernier, où il avouait que s’il n’y avait pas cette taxe CPS (Contribution Pour la Solidarité, ndlr), on ne paierait plus les allocations familiales, ni vieillesse, ni pour les handicapés. Lorsque j’ai pris cette décision au mois de décembre 2021, je savais le risque que je prenais. Cela fait un moment que je suis en politique et je sais très bien qu’une année d’élections, il ne faut surtout pas créer de taxe. Mais comment faire lorsqu’on sait, en début d’année, qu’au mois de septembre ou octobre, on ne pourra plus payer les allocations à ces personnes du RSPF, du régime de solidarité, qui n’ont pas d’autre revenu que ces minimas sociaux. On ne peut pas les abonner. Il faut prendre le risque ».

TNTV : L’idée, c’est qu’ils retrouvent du pouvoir d’achat ?

Edouard Fritch : « Bien sûr. Qu’ils retrouvent du pouvoir d’achat et, surtout, de pouvoir augmenter ces minimas sociaux puisque le coût de la vie augmente pour tout le monde ».

TNTV : Le coût de la vie, tout le monde le subit…

Edouard Fritch : « Tout le monde le subit, mais je vous demande de vous référer au taux d’inflation en Polynésie française qui n’est pas pire qu’ailleurs ».

TNTV : Ce ne sera pas une de vos priorités en cas de victoire ?

Edouard Fritch : « Si, bien sûr que c’est la priorité parce que c’est ce qui ressort de toutes nos réunions publiques : le coût de la vie. Mais nous avons beaucoup fait. Nous avons pris une vingtaine de mesures pour essayer de contenir l’augmentation des prix dans ce pays. Nous avons enlevé la TVA sur ce qui est consommé quotidiennement par les familles. Les PPN ne sont pas soumis à cette taxe de 1%. Nous avons retiré ce 1% sur ce qui est consommé quotidiennement par les familles. Je pense que tant qu’on n’aura pas d’autres solutions à proposer pour faire face aux difficultés que connait la CPS…Je maintiens, sauf si demain… »

TNTV : Donc, l’idée en cas de victoire c’est de poursuivre vos actions. Il n’y aura pas de changements ?

Edouard Fritch : « Continuer les actions qui ont été mises en place, parce que je pense que l’inflation va continuer à nous tomber dessus, que ce soient les produits achetés à l’extérieur ou le fret. Mais j’ai espoir car, avant ces élections, j’étais en discussion sur une participation de l’Etat à la solidarité, ici en Polynésie française. On exercerait la solidarité nationale pour venir au secours de la Polynésie française. Et j’ai demandé au gouvernement central de venir nous accompagner. La réponse a été : ‘attendons la fin des élections’. Si nous sommes aidés par la métropole, je peux m’engager au moins à réduire cette taxe de 1%, voire à aménager les taux qui sont appliqués aujourd’hui à la CST, c’est-à-dire sur les salaires les plus élevés ».

TNTV : Justement, quels sont vos rapports avec l’Etat actuellement ?

Edouard Fritch : « je n’ai pas souvent l’occasion d’aller à Paris donc je ne les vois pas souvent. Je sais qu’ils ont confiance en moi parce qu’en fin de compte, je me retrouve seul à me battre pour l’autonomie. Ils attendent avec hâte, comme moi, les résultats de dimanche ».

TNTV : Parlons tourisme, à présent. Il a toujours été un secteur clé pour soutenir l’économie du pays. Dernier grand chantier en date : le Village Tahitien. Le dossier a bien avancé mais il n’y a encore rien de fait aujourd’hui. Le tourisme s’était effondré durant la crise Covid, tout comme l’économie. Comment s’assurer d’un meilleur avenir dans ce secteur ?

Edouard Fritch : « En continuant à croire, d’abord, comme les investisseurs continuent à croire. La grande différence entre le Village Tahitien sous Edouard Fritch et ce qui s’est fait avant, c’est qu’aujourd’hui tous ceux qui vont investir dans le Village Tahitien sont polynésiens. Ce sont des sociétés polynésiennes alors que nous avions pensé, à l’époque, que les Chinois, ou d’autres, pouvaient venir investir chez nous. Nous avons rétabli la confiance dans ce pays. C’est important. Les entrepreneurs de ce pays ont confiance dans le Tapura Huiraatira parce que nous avons eu une gestion saine des deniers publics. Il n’y pas eu de problèmes avec la justice, pas de détournements de fonds. J’ai la confiance de ces investisseurs et je pense qu’effectivement il nous faut augmenter nos capacités d’accueil des touristes, comme nous allons augmenter vraisemblablement les capacités de transports. Mais les touristes veulent venir chez nous, comme le montrent les chiffres de 2022 ».

TNTV : Qui dit plus de touristes dit plus de circulation sur les routes. Le quotidien est déjà très compliqué pour les Polynésiens. Après deux mandats, on n’a pas l’impression que vous prenez vraiment ce problème à bras-le-corps…

Edouard Fritch : « On l’a pris à bras-le -corps à un moment donné. Rappelez-vous, juste avant les municipales. Mais nous avons eu une opposition forte d’une des communes concernées par la route sur la côte ouest. Des études sont en cours pour que cette route soit construite mais à un niveau un peu plus élevé que celui qui était prévu au départ. Plus en plaine, mais en montagne ».

TNTV : Cela pourrait-il entrainer des expropriations ?

Edouard Fritch : « Quelques expropriations, vraisemblablement. Moins qui fasse mal surtout parce que ce qui faisait mal, ce sont les expropriations de terrains et maisons. On déstabilise des familles dans leur vie. J’ai complément compris le problème mais on construira un peu plus haut. Et, surtout, développer d’autres moyens, et je pense en particulier aux transports maritimes. J’espère que, dans les jours à venir, nous pourrons avancer un peu plus rapidement sur ces projets même si c’est un projet qui va nous coûter excessivement cher ».   

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