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Combien de temps allaite-t-on en Polynésie française ?

L'allaitement, un acte naturel pour nourrir son bébé (Crédit photo : archives Tahiti Nui Télévision)

Quand on se penche sur les derniers chiffres de l’allaitement en Polynésie française, il faut remonter à la dernière étude qui date de 2011… Des chiffres qui indiquaient à l’époque que 89% des femmes allaitaient au moins 1 jour après l’accouchement, et que 61% des enfants étaient allaités exclusivement à 3 mois et 21% à 6 mois.

Au fenua comme en France, la durée de l’allaitement maternel exclusif est également courte. Dans sa dernière enquête nationale périnatale, en France, 56,3% des femmes allaitent exclusivement leur enfant en 2021 en maternité, et seules 38,4% pratiquent un allaitement exclusif à deux mois. En Nouvelle-Zélande, 77,06% des bébés sont allaités exclusivement lors de leur séjour en maternité.

Depuis 1996, un programme polynésien pour la promotion de l’allaitement maternel existe. Dans son plan quinquennal 2015 – 2020, l’objectif du pays était d’atteindre les 80% d’allaitement exclusif à la naissance, les 75% à 3 mois et les 50% à 6 mois. Quatre ans après ce plan, qu’en est-il donc en Polynésie française aujourd’hui ? Difficile de le savoir faute d’étude réalisée depuis 2011. En revanche, une certaine tendance se dégage, et elle semble à la baisse. À l’occasion des assises des sages-femmes, en 2023, le CHPF a mené une petite étude de son côté auprès d’une centaine de mamans. Si elles sont 85% à allaiter leur bébé en sortie de maternité, elles ne sont plus que 33% au bout de 15 jours à toujours allaiter exclusivement leur bébé.

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Du côté de Centre de protection maternelle et infantile (CPMI), sur 12 523 visites effectuées sur les 6 premiers mois, 20,2% des mamans allaitent exclusivement leur bébé et 16,7% font de l’allaitement mixte (lait maternel et lait maternisé). Plus précisément encore, sur les mamans suivies au CPMI de Pirae, elles ne sont plus que 14,5% à allaiter leur bébé à 6 mois, 4,4% à Papeete et 14,2% à Arue.

Des chiffres bas que médecins et sages-femmes expliquent, entre autres, par une fatigue liée à l’allaitement, une mise au sein douloureuse, la pression sociale, un manque d’accompagnement des mamans et de formations du personnel de santé, ou encore par la reprise du travail.


Pourtant, en Polynésie française, la règlementation du travail prévoit un temps d’allaitement maternel rémunéré d’une heure par jour, jusqu’aux 15 mois de bébé. Un temps qui peut être réparti en deux demi-heures, en accord avec l’employeur. Encore faut-il, par exemple, avoir la motivation de tirer son lait afin de maintenir sa lactation ou de rentrer le midi allaiter son bébé… En France, ce temps d’allaitement n’est pas rémunéré et n’est autorisé que jusqu’aux 1 an du bébé.

Les bienfaits du lait maternels sont aujourd’hui indéniables et ont été prouvés par la science, c’est l’aliment idéal pour le nourrisson. Selon le Programme National Nutrition Santé,« la composition nutritionnelle et l’apport en substances biologiques du lait maternel ne peuvent être reproduits. Seul le lait d’une mère peut s’adapter de façon permanente aux besoins du nourrisson ». Appelé « l’or blanc », il contient tous les nutriments et les éléments de défense essentiels à son bon développement et à sa santé. L’OMS le recommande jusqu’aux six premiers mois de vie afin de favoriser, chez les bébés, une meilleure croissance, un développement harmonieux et un bon état de santé. La promotion de l’allaitement maternel est un des objectifs spécifiques à l’enfant du Programme national nutrition-santé (PNNS) en métropole, avec l’arrêt de l’augmentation de la prévalence de l’obésité, la prévention de la carence en fer, en calcium et en vitamine D, et la prise en charge de l’allergie alimentaire.

Infographie TNTV

En Polynésie française, la direction de la Santé suit les recommandations de l’OMS et précise que l’allaitement est également en outre un geste écologique : « il ne génère aucun déchet. Les mères allaitantes fabriquent les quantités exactes de lait que réclament leurs bébés, sans gaspillage et sans peser sur l’environnement. Le lait va directement du producteur au consommateur, sans aucun intermédiaire. L’allaitement ne demande ni eau pour préparer et nettoyer les biberons, ni combustible pour chauffer cette eau. L’allaitement abaisse les pollutions induites par la fabrication, le transport et l’utilisation des laits industriels pour nourrissons. Le lait maternel est une ressource naturelle mondiale à protéger »‘ ».

Aliment privilégié des prématurés, leur système digestif étant immature, le CHPF dispose d’ailleurs d’un lactarium et fait parfois appel aux mamans allaitantes du fenua pour faire don de leur lait.

Contactées, plusieurs sages-femmes expliquent que le soutien et l’accompagnement des mères allaitantes est très important pour la réussite de l’allaitement et déplorent le manque de formations et de référentes en lactation au fenua. En effet, il n’existe pas de réseau de périnatalité en Polynésie française. Une enquête de la périnatalité devrait d’ailleurs se faire d’ici les prochaines années, à l’initiative de l’ARASS (Agence de régulation de l’action sanitaire et sociale). Ce qui permettrait enfin d’avoir enfin un état des lieux plus précis, notamment sur l’allaitement, mais également sur les dépressions et les suicides post-partum.

L’association Te U o te Ora existe en soutien à l’allaitement et répond aux mamans via les réseaux sociaux ou des ateliers organisés en maisons de l’enfance par exemple. Elle mettra en place une ligne de soutien et d’écoute pour les mamans allaitantes à compter du 14 octobre 2024.

Enfin, il convient de rappeler que l’allaitement maternel est avant tout un choix personnel, et que le meilleur allaitement, que ce soit au sein ou au biberon, reste celui choisi par la mère, qui ne doit pas culpabiliser, quelle que soit sa décision.

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