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Des ruches de Papenoo à celles de Nouvelle-Zélande, le périple de Tauturuhe « Bee » Rey

Le miel néo-zélandais Manuka, produit par le Tahitien Tauturuhe Rey (dit "Bee Rey"), s'est fait une place chez les connaisseurs après dix ans d'un travail passionné (Crédit Photo : Bee Rey)

Vous en avez peut-être goûté au détour d’un périple chez les voisins kiwis : le miel Manuka, produit par le Tahitien Tauturuhe Rey, s’est fait une place chez les connaisseurs après dix ans d’un travail passionné. C’est après ses études universitaires en France que l’histoire entre « Bee Rey » et le miel bourgeonne. De retour à Tahiti, il s’initie au monde des abeilles au fond de la Papenoo avec Raiarii vanffaut, y prend goût, et souhaite développer ses compétences. « Je commençais à avoir mes premières ruches, mais j’ai tout de suite senti que je plafonnais et qu’il me fallait parfaire ma technique et ma compréhension du monde apicole« , se souvient-il.

Il enchaîne avec une formation spécialisée du CEFI et capture ses premiers essaims sauvages. « La collecte était assez simple, explique-t-il. J’allais les chercher dans un tronc, à hauteur d’homme, et on prélevait calmement les abeilles en les aspergeant d’eau, pour qu’elles n’aient plus la capacité de voler. Ensuite, on les plaçait dans la ruche« . Au bout d’un jour, et si la reine est bien capturée, les abeilles restantes suivent ses phéromones et rejoignent la ruche. Un procédé qu’il maîtrise, et dont il sait que l’exploitation est importante chez les cousins maohi, en Nouvelle-Zélande. « Ils sont qualifiés niveau savoir-faire, gestion du rucher. J’ai préparé mes affaires et je suis parti à l’aventure là-bas pour m’y faire une place, à 21 ans« .

Au début, tout n’est pas évident pour Tauturuhe, qui parle un anglais dont le niveau est « proche de zéro« , et ne connaît ni la culture ni les saisons néo-zélandaises. « Je suis venu tout seul avec mon petit bâton de pèlerin, rigole-t-il. Ça a été tout un processus d’adaptation, mais je suis parvenu à me mettre en contact avec des professionnels de l’industrie, que ce soit des apiculteurs, des chercheurs ou au niveau institutionnel« . Il ne lâche rien et parvient à se construire un petit réseau, au fil des années. Un pari judicieux, dans un pays où l’exportation de miel représente plusieurs milliards de dollars locaux chaque année.

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Il parvient à développer son rucher personnel dans son pays d’adoption. De simple passionné, il passe à semi-commercial et se prête au jeu des démarches marketing pour écouler sa production de miel. Un choix qui, là encore, est le bon pour le jeune entrepreneur. « C’est à travers nos publications sur les réseaux sociaux que le comité organisateur du Paris International Honey Award 2024 nous a remarqués, raconte-t-il. Il est invité à y participer, les 2 et 3 février dernier. On était très surpris, parce que c’est une toute petite entreprise familiale avec ma femme. Nous n’avons qu’une centaine de ruches, qui nous donnent une activité complémentaire à côté de nos métiers » . Lui est ingénieur en climatisation et elle, également Tahitienne, est secrétaire dans une compagnie de construction.

Les échantillons qu’ils envoient au concours leur donne une nouvelle ampleur. Au milieu d’une centaine de miels de tout horizon, ils tapent dans les papilles du jury composé de chefs étoilés, d’apiculteurs, ou de scientifiques « Ça nous a donné beaucoup de crédibilité sur le marché international. On avait déjà commencé à exporter un peu en Asie, et timidement en Europe. Ce genre de prix nous conforte vraiment sur la qualité de notre miel, assure Tauturuhe.

(Crédit Photo : Bee Rey)

Le couple mise sur la qualité de son miel, bien plus que sur le volume produit. Une approche traditionnelle qu’il veut en phase avec la santé de ses abeilles. « Ça ne sert à rien de gérer 1000 ruches si on n’est pas en mesure de donner de l’attention que demandent les abeilles pour pouvoir produire un miel de qualité, avance-t-il. Contrairement à l’international, la Nouvelle-Zélande a su gérer le déclin de leur population, en limitant l’usage de pesticides et l’agriculture intensive sur son territoire. On surveille tout de même les maladies, qu’il s’agisse de la loque américaine ou le varroa, deux principaux facteurs qui affectent l’industrie ».

Le prix glané à Paris apporte à Tauturuhe une nouvelle source de motivation. « Je veux faire en sorte de devenir producteur de miel à plein temps. Ce serait l’idéal, confie-t-il. Reste les limites pécuniaires, difficiles à ignorer dans un pays où la vie est chère. Si dans un futur proche, dans les deux ans, on a de bons retours au niveau de nos exportations, je pourrai peut-être me lancer ! », conclut-il.

Benjamin Franklin disait que « Rien n’est plus doux que le miel, sauf l’argent« . Puisse Tauturuhe avoir les deux.

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