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« Il faut changer le regard sur l’endométriose »

« Ce n’est peut-être pas le cancer, mais la maladie est aussi dramatique. » Sur un banc du parc Paofai, Ruita noue ses doigts autour de son bas ventre. La mère de famille de 40 ans revient non sans peine sur des années de douleurs et de traitementspour faire face à sa maladie : l’endométriose.

Le mal qui la ronge n’est pas visible. Mais à l’intérieur, la douleur est telle que, parfois, la Polynésienne ne peut se lever ou bouger. Elle se rappelle : « J’ai été diagnostiquée à l’âge de 25 ans. Mais les douleurs étaient bien plus anciennes. Je ne savais plus quoi faire. Je suis allée voir beaucoup de médecins, même des rhumatologues pour comprendre ce qu’il m’arrivait… »

Mettre un mot sur ses maux a permis à Ruita de relever la tête. A force de consultations avec les spécialistes, elle avait commencé à perdre pied, à ne plus savoir si la douleur était bien réelle. Cette maladie a joué sur son moral, sur sa vie professionnelle et sur sa vie de couple. Ruita confesse : « Avec l’endométriose, on a même des douleurs pendant les rapports. Ce n’est pas facile à dire, mais c’est la vérité. »

 « Il faut qu’on en parle » 

Depuis trois ans, la Tahitienne raconte sans détour son chemin et détaille sa maladie. La quadragénaire a décidé de ne plus se cacher. « Je suis malade. Et quoi alors ? Il faut qu’on en parle. Je vais arrêter de vivre dans cette angoisse, dans cette honte. »

Soutenue par le club Soroptimist de Tahiti, Ruita participe à des temps d’échanges sur l’endométriose. Jeudi, elle sera à l’Université de Polynésie française pour une conférence sur cette maladie aux côtés du docteur Al Wardi. Ruita souligne : « C’est une maladie qui revient tout le temps (NDLR : ce n’est pas le cas pour toutes les femmes), même après de nombreuses prises en charge. Il est important de savoir ce que tu as pour pouvoir être suivie. Beaucoup de femmes ne disent rien alors qu’elles souffrent, ce n’est pas normal… »

> Plus de retard de diagnostic 

Le gynécologue Nédim Al Wardi abonde dans son sens. Selon le spécialiste, la moitié des femmes qui souffrent pendant la période hormonale en sont atteinte. Si, pendant un temps, les patientes ont pâti d’un retard de diagnostic, ce n’est plus vrai aujourd’hui. Le docteur Al Wardi souligne : « En revanche, il y a encore un certain nombre de refus de la maladie. Certaines personnes ne veulent pas entendre parler de la maladie… Certaines femmes pensent que c’est normal de souffrir, mais ça ne l’est pas. »

Pour Ruita, accepter et comprendre sa maladie n’est possible qu’avec l’aide de l’entourage. Les parents, les enfants, le conjoint restent des maillons importants de la chaîne. La malade explique : « Ce n’est pas évident à vivre, il faut que l’on soit soutenu. Nous traversons beaucoup de moments difficiles : douleurs, stress, fatigue… C’est important d’être comprise. »

Pour aider les femmes dans sa situation, Ruita souhaite monter une association avec l’aide des Soroptimist. Elle veut créer un espace d’échanges entre les femmes malades, leur entourage et les gens qui s’intéressent à l’endométriose. « Le but, c’est qu’on puisse en parler, s’aider. Il faut changer le regard sur l’endométriose. »
 

Rédaction web 

PRATIQUE

Conférence Savoirs pour tous : l’endométriose

  • Jeudi 20 septembre à 18 h en Amphi A3 de l’Université de la Polynésie française, campus d’Outumaoro, à Punaauia.
  • D’une durée d’une heure à une heure et demie, les conférences « Savoirs pour tous » sont suivies d’un débat avec l’auditoire.
  • Entrée libre sous réserve des places disponibles. 

Trois questions sur l’endométriose
 
Qu’est-ce que l’endométriose ?

Toutes les femmes sont porteuses de cellules endométriales dans la cavité abdominale. Elles sont transformées par le péritoine et sont éliminées par un phénomène de résorption. Mais dans certaines circonstances, ces cellules se fixent aux organes et se multiplient. L’incapacité du péritoine à éliminer ces fragments d’endomètre, muqueuse qui recouvre la face interne de la cavité utérine et qui réagit au cours du cycle menstruel, est à l’origine de l’endométriose. Elle existe exclusivement de la puberté à la ménopause.
C’est une maladie très répandue qui touche une personne sur 10, mais qui reste assez peu connue, voire taboue.

Quels en sont les signes ?

L’endométriose est une maladie très complexe. D’une patiente à l’autre, les symptômes sont différents. Le docteur Al Wardi explique : « Il n’y a pas de solution globale. » Les manifestations de l’endométriose peuvent être :
– la dysménorrhée : douleur qui survient au moment des règles et qui s’aggrave au fil des ans. Elle entraîne parfois une incapacité à assurer ses activités pendant les règles et la nécessité de consulter aux urgences ;
– la dyspareunie : il s’agit d’une douleur qui apparaît au moment des rapports sexuels ou au décours de ceux-ci ;
– la dyschésie : cette douleur est entraînée par l’émission de selles. Elle peut s’associer à des groupes du transit digestif ;
– la dysurie : cette douleur apparaît lors de la miction ;
– des douleurs au niveau du bassin, de l’abdomen et de la région lombaire peuvent être aussi être ressenties ;
– la stérilité : elle est fréquente chez les femmes qui souffrent d’endométriose mais ce n’est pas une constante ;
– l’existence de règles abondantes ;
– des douleurs dans l’épaule droite voire un pneumothorax pendant les règles.
L’endométriose reste une maladie dont on ne guérit pas.
 

Comment la diagnostiquer ?

Selon les spécialistes, l’endométriose est souvent diagnostiquée tardivement : entre 8 à 10 ans par rapport au début de la symptomatologie. Pour savoir si la patiente en est atteinte, un examen clinique doit être fait : interrogatoire, examen des voies génitales, toucher vaginal ainsi qu’une imagerie.  

 

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