Quand on les rencontre dans la vie de tous les jours, on ne croirait pas que Dimitry, 7 ans et demi (« J’aurai 8 ans en avril », tient-il à préciser), et sa sœur Emmy, 6 ans, sont deux terreurs des tatamis. Le grand frère est plutôt sociable et bavard ; la petite sœur un peu plus timide et réservée. Des enfants assurément épanouis, qui se font même chouchouter chez le coiffeur la veille d’une compétition. Coupe à la mode pour Dimitry et mèches aux couleurs de licorne pour Emmy.
Mais ce sentiment de bien-être n’a pas toujours été une évidence pour Dimitry. « Il avait des problèmes à l’école, confie leur papa Timothé. Il était timide, pas sûr de lui, et tout le temps seul dans son coin. Il n’arrivait pas à dormir le soir. C’était difficile. Il faut dire aussi qu’il ne parlait pas un mot de français quand il a commencé l’école. Leur maman est Malaisienne, donc on ne parle qu’en anglais à la maison. »
Timothé, grand fan d’arts martiaux, avait déjà la volonté de mettre Dimitry au jiu-jitsu brésilien alors que ce dernier ne marchait pas encore. « Dimitry n’avait qu’un an quand j’ai commencé à chercher une école et contacter des coachs. Ils n’acceptaient les enfants qu’à partir de 4 ans et s’ils étaient parfaitement autonomes. »
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Le moment venu, le petit garçon de 4 ans et demi a donc rejoint la Tahitian Top Team, coachée par Marere Coquil. « Et puis ses problèmes à l’école se sont réglés, sourit le papa. Il a commencé à gagner en confiance, à être plus sûr de lui, même si au début ça a quand même été un an de souffrance. Il rechignait à aller à la salle. Et puis il a commencé les compétitions, a gagné une médaille d’or dès la deuxième, et c’était parti. »
Troquer son tutu contre un kimono
De ses deux ans d’écart, la petite Emmy observait son grand frère remporter ses combats et rapporter de jolies médailles à la maison. Elle, c’est à la danse classique qu’elle a d’abord été initiée, mais son esprit de compétition inné était loin d’être satisfait par le ballet. « J’ai vu que mon frère avait gagné une médaille, et je voulais aussi une médaille », explique-t-elle. C’est donc tout naturellement qu’elle a demandé à ses parents de pouvoir troquer son tutu contre un kimono dès ses quatre ans. « Et le jour de son anniversaire on était à la salle de ‘jiut’ avec son gâteau ! », confie le papa, tout sourire.
Et puis Emmy s’est révélée aussi impitoyable que son frère dans les trois sports de combat de préhension qu’ils pratiquent : le jiu-jitsu brésilien, le judo et la lutte. Souvent surclassée, faute d’adversaire de son âge, Emmy se retrouve fréquemment face à des enfants plus âgés de 1 à 3 ans. Ce qui ne l’empêche pas de rafler elle aussi de nombreuses médailles. Depuis fin 2019, le frère et la sœur sont champions du monde de jiu-jitsu brésilien.
« Je ne m’attendais vraiment pas à ça en les mettant au jiut, souffle leur papa. Je voyais plus ça comme une activité à pratiquer en loisir, mais ce sont deux compétiteurs… Donc le projet a évolué. On commence à penser à les orienter en sport-étude, s’ils arrivent à avoir une bonne bourse universitaire. »
Le frère et la sœur ont d’ailleurs déjà cinq sponsors locaux, qui seront bientôt rejoints par deux sponsors internationaux.
La fibre du combat
Les enfants ont suivi leur coach lorsqu’il a monté son propre club, Seasiders BJJ, à Titioro. Pour Marere Coquil, « ils ont les capacités et peuvent aller très loin dans cette discipline s’ils en ont envie et s’ils ont le soutien de leurs parents ». « Dimitry a montré des aptitudes dès le début ; pour Emmy, il a fallu être un peu patient, poursuit le coach. Elle a du mal à s’ouvrir dans un environnement qu’elle ne connaît pas, mais je sentais que c’était une fighteuse née. Elle a la fibre du combat. Emmy est plutôt rentre dedans, alors que Dimitry est plus dans la réflexion. Il va réfléchir avant de se lancer. »
Si, chacun dans son style, le frère et la sœur ne font pas de quartier face à leurs adversaires, la donne change lorsqu’ils se retrouvent face à face. Ce qui est arrivé en novembre dernier lors d’un championnat de lutte. Encore une fois surclassée, Emmy s’est retrouvée opposée à son frère en finale. Ce dernier, très protecteur envers sa sœur, lui a offert la victoire de bon cœur. « C’était normal que je laisse ma petite sœur gagner », sourit-il.
Se concentrer sur l’entraînement
Dimitry et Emmy s’entraînent tous les jours : du lundi au samedi à la salle, et le dimanche à la maison. « Ce qui est normal, explique Dimitry, du haut de ses 7 ans et demi. Il faut se préparer avant d’aller combattre. Il ne faut pas aller sans être prêt, sinon on va se faire défoncer. »
Le mois dernier, ils ont brillé lors de plusieurs trainings et compétitions aux Etats-Unis, dont la Pan Kids, la compétition pour enfant la plus dure au monde. Dimitry a rapporté une médaille de bronze, et Emmy une médaille d’or.
Ce sont les dernières compétitions internationales qu’ils feront en 2020, l’objectif étant de se concentrer à présent sur les entraînements afin d’être bien préparés pour les Pan Kids de 2021 et huit autres compétitions aux Etats-Unis cette même année.
Leur palmarès international
2018
Championnat du monde SJJIF
Dimitry : médaille d’argent en nogi et médaille d’or en gi
Emmy : médaille d’argent en nogi et médaille de bronze en gi
2019
Championnat du monde SJJIF
Dimitry : médaille d’or en nogi et médaille d’or en gi
Emmy : médaille d’or en nogi et médaille d’or en gi
2020
All America SJJIF
Dimitry : médaille d’argent en nogi et médaille d’or en gi
Emmy : médaille de bronze en nogi et médaille d’or en gi
Contest 1 (Dream BJJ)
Dimitry : médaille d’or
Emmy : médaille d’or
Pan Kids (IBJJF)
Dimitry : médaille de bronze
Emmy : médaille d’or