Débat sur la reconnaissance de la lettre K dans l’alphabet tahitien

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La langue tahitienne va-t-elle s’agrandir ? Le 13 mars dernier, le Fare Vana’a avait invité des linguistes et des associations culturelles à discuter de l’introduction de la lettre K dans le reo tahiti. Certains y voient un moyen de faire évoluer la langue. Pour d’autres, c’est secondaire…

Publié le 14/04/2024 à 13:33 - Mise à jour le 15/04/2024 à 9:28

La langue tahitienne va-t-elle s’agrandir ? Le 13 mars dernier, le Fare Vana’a avait invité des linguistes et des associations culturelles à discuter de l’introduction de la lettre K dans le reo tahiti. Certains y voient un moyen de faire évoluer la langue. Pour d’autres, c’est secondaire…


L’alphabet tahitien compte aujourd’hui 5 voyelles, longues ou courtes selon la présence ou non du tarava. Il se compose aussi de 9 consonnes, dont le ‘eta, qui est une occlusive glottale. Mais le K pourrait bien devenir la dixième consonne. En effet, l’Académie Tahitienne – Fare Vāna’a envisage sa reconnaissance officielle dans l’alphabet tahitien.

Reconnu comme lettre et comme son par les académies pa’umotu et marquisienne, le K est aussi utilisé dans quelques îles des Australes et aux îles Sous-le-Vent. Mais le projet de reconnaissance officielle du K dans l’alphabet tahitien suscite de nombreuses réactions.

Heimanu Manutahi, originaire de Taha’a et étudiant en reo, estime que les règles de l’Académie ne doivent pas forcément coller à la langue parlée : « Il serait plus que nécessaire de laisser cette lettre K dans le parler, c’est-à-dure dans le langage courant, et ne pas l’intégrer dans l’alphabet de l’Académie tahitienne. Effectivement, dans la graphie de Turo, on voit également cela. Ça a été bien codifié. Il n’y a pas de K ».

Les enseignants, eux, sont nuancés. Mais ils rappellent que l’apostrophe du Tahitien est l’équivalent du K marquisien. Ils craignent que cette lettre ne soit le début d’une longue série de controverses : « katikita, epikopo… Il y a beaucoup de termes de cette confession. Est-ce que les autres confessions ne diraient pas tu’u ato’a paha ia ta mato (il faut aussi mettre nos lettres alors, Ndlr), ietu, iesu, ietu mesia, metia… ça risque, à mon avis, de provoquer des polémiques compliquées. Selon moi, je ne pense pas que ç’ait un intérêt de rajouter le K dans l’alphabet tahitien » indique Lovaina Rochette, professeure certifiée de tahitien.

Emmanuel Nauta, directeur de l’Académie tahitienne, invité du journal :

Selon la linguiste et maître de conférences en langues et littératures polynésiennes Mirose Paia, le K n’est pas considéré comme un phonème : « Si on suit la règle linguistique, normalement, on ne devrait pas effectivement intégrer le K. Le phonème K n’existe pas. Mais il faut savoir que la langue, c’est l’affaire de tous. C’est le moment aussi pour les locuteurs de se dire, on veut décider de ce que sera K dans la langue. C’est vraiment une vision patrimoniale et non plus linguistique ». Elle est favorable à un débat sur l’introduction de la lettre K.

Ancien directeur d’école, Jacky Bryant soutient quant à lui le projet du Fare Vana’a. Notamment pour formaliser la langue employée et mieux la transmettre : « J’ai acheté un ‘iro, ou un tiro de tiwi, de ‘iwi… Enfin, c’est complètement ridicule. Donc d’une familiarisation que l’on a aujourd’hui dans la pratique de tous les jours, on normalise. C’est uniquement un problème de normalisation. Il n’y a pas de débat à avoir là-dessus ».

Pour en débattre, des locuteurs et acteurs culturels sont invités à un séminaire prévu le vendredi 19 avril à la Présidence de 8 heures 30 à 15 heures.

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