Mereana Reid-Arbelot : « le regard sur l’indépendance a déjà changé en métropole »

Publié le

De "sensibilité de gauche", elle siègera avec le Front populaire si elle est réélue. La députée sortante Mereana Reid Arbelot estime qu'en métropole, le regard " a déjà changé" concernant l'indépendance de la Polynésie et rassure : "nous ne demandons pas l'indépendance bêtement, on veut construire notre pays le développer et quand on estimera que ce sera possible, on demandera l'avis de la population." La députée sortante était l'invitée de notre journal dimanche.

Publié le 24/06/2024 à 11:16 - Mise à jour le 24/06/2024 à 14:50

De "sensibilité de gauche", elle siègera avec le Front populaire si elle est réélue. La députée sortante Mereana Reid Arbelot estime qu'en métropole, le regard " a déjà changé" concernant l'indépendance de la Polynésie et rassure : "nous ne demandons pas l'indépendance bêtement, on veut construire notre pays le développer et quand on estimera que ce sera possible, on demandera l'avis de la population." La députée sortante était l'invitée de notre journal dimanche.

TNTV : Vous êtes députée sortante et vous vous représentez dans la troisième circonscription. Si vous êtes élue, vous siègerez avec le Front populaire. Vous vous considérez comme de gauche, ou est-ce avant tout pour faire barrage à Emmanuel Macron et à l’extrême droite de Marine Le Pen ?
Mereana Reid-Arbelot, candidate aux élections législatives dans la 3e circonscription : « Mais écoutez, je suis de sensibilité de gauche, bien sûr, et si ça peut faire barrage à l’extrême droite, ça me va très bien. »

TNTV : Plusieurs candidats nous disent que pour agir, il faut faire partie de la majorité à l’Assemblée nationale. Quelle sera votre marge de manœuvre si vous gagnez à Tahiti, mais que la droite ou l’extrême droite, l’emporte en France ?
Mereana Reid Arbelot : « Nous avons fonctionné dans l’opposition depuis déjà 2017 avec le député Brotherson qui est devenu notre président. Et ensuite, nous, avec mes collègues Steve et Tematai, nous avons fonctionné dans l’opposition et nos dossiers ont toujours abouti. Nous n’avons pas peur de fonctionner dans l’opposition, il suffit de travailler et d’argumenter ces dossiers. »

TNTV : Vous venez de créer une commission sur la question nucléaire. Elle a disparu avec la dissolution. Avez-vous la garantie de pouvoir la relancer si vous êtes réélus ?
Mereana Reid Arbelot : « Alors, c’est une situation quand même qui est inédite. La dissolution, ça s’est passé en 97. Entre-temps, les procédures sur les commissions d’enquête parlementaire ont un peu évolué, ont changé. Donc, je pense qu’on est un petit peu dans le flou. Ceci dit, avant de quitter l’Assemblée, lorsque j’ai fait le tour des bureaux pour dire au revoir, tout le monde m’a demandé de me représenter pour reprendre la commission d’enquête parlementaire. Je pense que ce sera une de mes priorités, en tout cas dans le temps, quand je repartirai à l’Assemblée nationale. »

– PUBLICITE –

TNTV : Quel est l’intérêt de cette commission pour les Polynésiens, les vétérans du nucléaire, mais aussi à ceux qui n’ont pas connu cette époque ?
Mereana Reid Arbelot : « Écoutez, cette commission d’enquête a plusieurs objectifs. Je dirais pour en choisir quelques-uns : retrouver tous les faits historiques, tous les contextes historiques pour comprendre ce qui s’est passé, pour aussi connaître les raisons du choix des sites, l’Algérie puis la Polynésie, pour comprendre et connaître les niveaux d’information qui étaient donnés, à la fois aux militaires, aux travailleurs sur site et à la population, parce que pour réconcilier les Polynésiens avec eux-mêmes. Il y a beaucoup de non-dits aujourd’hui sur les personnes qui ont travaillé à Morourua et qui se sentent plutôt auteurs ou collaborateurs des conséquences néfastes. »

TNTV : Ça pourrait aussi être une base pour les mémoires ?
Mereana Reid Arbelot : « Il y a aussi un autre objectif de la commission d’enquête, c’est de pouvoir créer une mission, parce qu’en 6 mois, elle ne dure que 6 mois, on ne peut pas résoudre l’histoire qui s’est passée, l’histoire commune de ces 30 ans de nucléaire, mais la création d’une mission d’historiens et de scientifiques pour aller fouiller dans le passé et puis refaire notre histoire. »

TNTV : Vous avez aussi un autre combat, c’est la retraite des fonctionnaires d’État, n’est-ce pas, quelque part défendre les plus favorisés ?
Mereana Reid Arbelot : « Alors non, parce qu’aujourd’hui les pensionnés de l’État sont bien mal lotis et ils arrivent à ne plus fonctionner aussi aisément qu’avant et sachez quand même que les fonctionnaires de l’État, actifs ou retraités, souvent gravite autour d’une famille plus élargie puisque les enfants, les petits-enfants, comme c’est un revenu stable, dépendent beaucoup de ces personnes et les pensionnés avant 2018 pouvaient aussi embaucher quelqu’un pour des heures de ménage ou enfin faire des emplois de services et ils ne peuvent plus aujourd’hui. Donc c’est quand même aussi une niche économique pour notre fenua qui n’existe plus aujourd’hui. »

TNTV : Vous regrettez justement qu’une grosse perte pour ces fonctionnaires à l’heure de leurs retraites ?
Mereana Reid Arbelot : « Absolument, en fait avec le travail que j’ai fait sur le dossier, on s’est rendu compte rapidement avec mon cabinet que le droit commun n’était pas appliqué donc c’est tout ce qu’on demande à l’État, c’est d’appliquer le droit commun à traitement indiciaire, pension équivalente exactement comme cela se passe en métropole. »

TNTV : Il y a un autre volet sur lequel vous pouvez agir à l’Assemblée nationale, c’est l’impact du changement climatique. Que proposez-vous ?
Mereana Reid Arbelot : « Effectivement, j’ai fait plusieurs travaux à ce sujet donc depuis juillet, je militais quasiment pour l’inclusion des témoignages d’outre-mer et particulièrement de Polynésie pour qu’il soit annexé un mémoire que la France doit remettre à la Cour internationale de justice, c’est une demande de l’ONU pour que les États pollueurs remettent des mémoires dans le cadre de leurs obligations en matière de changement climatique. Donc, ça a été un premier travail sur les témoignages. On en a recueilli pas mal et on les a donc transmis au ministère des Affaires étrangères qui va la joindre au mémoire de la France. »

TNTV : Quel est le risque le plus immédiat pour Polynésie ?
Mereana Reid Arbelot : « Eh bien, on le sait tous, l’augmentation du niveau de la mer, on est quand même surtout aux Tuamotu des atolls avec deux à trois mètres d’altitude au maximum. L’atoll de Nauru possède déjà un déplacement de ces populations, il y a eu un accord avec l’Australie qui a légiféré pour accueillir des réfugiés climatiques. Il ne faut pas attendre ce moment-là pour réagir, nous devons réagir maintenant. »

TNTV : Et ça, ça peut se défendre à l’Assemblée nationale ?
Mereana Reid Arbelot : « Bien sûr, parce que les déplacements de populations, c’est tout à fait dans le giron de l’État. Et aussi, je parlerai aussi de transition écologique et de transition énergétique qui peut nous aider aussi à limiter peut-être les effets sur le climat. Donc ça aussi, c’est une compétence de l’État et nous travaillons là-dessus également. »

TNTV : Mereana Reid Arbelot, vous aussi, vous allez utiliser votre mandat pour parler d’indépendance ? Ou pour défendre l’indépendance ?
Mereana Reid Arbelot : « Vous savez, il ne faut plus avoir peur de l’indépendance et je dirais que lorsque j’ai remplacé le président Brotherson, le regard a déjà changé en métropole. Il a déjà changé. Tous mes collègues qu’ils soient ultramarins ou hexagonaux ont un regard différent depuis que des parlementaires indépendantistes polynésiens ont été s’asseoir à l’Assemblée nationale parce qu’on a un discours apaisé, on a un discours construit et nous ne demandons pas l’indépendance bêtement, on veut construire notre pays le développer et quand on pourra quand on estimera que ce sera possible on demandera l’avis de la population. »

Dernières news

Activer le son Couper le son