Depuis le début de l’épidémie qui a fait près de 30 000 morts en France, l’exécutif fait face à un flot de critiques notamment sur la pénurie de masques et a été visé par de nombreuses plaintes pour « mise en danger de la vie d’autrui » ou « homicide involontaire ».
Après examen, la commission des requêtes de la CJR, composée de hauts magistrats et qui fait office de filtre, a estimé que neuf d’entre elles étaient recevables, a annoncé vendredi le procureur général près la Cour de cassation François Molins dans un communiqué.
Aux termes de la procédure, ce dernier est désormais tenu de saisir la commission d’instruction de la CJR, qui agira comme un juge d’instruction.
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Cette annonce intervient le jour même de la démission du gouvernement dirigé par Edouard Philippe et dans lequel Olivier Véran occupait le portefeuille de la Santé. Sa prédécesseure à ce poste, Agnès Buzyn, avait quitté le gouvernement mi-février pour briguer la mairie de Paris.
Les neuf plaintes qui les visent ont été jointes en vue de la saisine de la commission d’instruction du seul chef d' »abstention de combattre un sinistre ».
Dans un communiqué transmis à l’AFP, Edouard Philippe « prend acte » de cette décision et affirme qu’il apportera à la commission « toutes les réponses et informations nécessaires à la compréhension de son action et celle de son gouvernement ».
Au total, 90 plaintes ont été reçues à ce jour par la CJR, seule instance habilitée à juger les membres du gouvernement pour les actions menées dans l’exercice de leur fonction, et 53 d’entre elles ont été examinées.
Parmi elles, 34 ont été déclarées irrecevables car elles ne visaient pas un membre du gouvernement ou car le plaignant n’avait pas d’intérêt à agir. Dix autres, notamment contre les ex-ministres Nicole Belloubet (Justice), Jean-Yves Le Drian (Affaires étrangères) ou encore Christophe Castaner (Intérieur), ont été classées sans suite.
Vaste enquête au parquet de Paris
Les plaintes à la CJR avaient commencé à être déposées quelques jours après le début du confinement mi-mars. Elles émanent de particuliers, de médecins, d’associations, ou encore de détenus.
Le chef de l’État, Emmanuel Macron, est lui irresponsable pénalement des actes réalisés dans l’exercice de ses fonctions.
Les plaignants dénonçaient, selon les cas, des faits de « mise en danger de la vie d’autrui », « homicide involontaire », « non-assistance à personne en danger » ou abstention de prendre à temps des mesures pour endiguer la pandémie.
En parallèle, d’autres plaintes ont aussi été déposées, ciblant parfois nommément des responsables de l’administration, comme le directeur général de la Santé Jérôme Salomon, en première ligne durant la crise, ou encore Santé Publique France.
Le parquet de Paris avait apporté une première réponse judiciaire en ouvrant début juin une vaste enquête préliminaire.
« C’est la première fois que des plaintes sont déposées alors que la crise bat son plein »
Cette « enquête-chapeau » regroupe 13 procédures consacrées aux plaintes d’associations ou d’organisations syndicales et une quatorzième englobant 33 plaintes, pour leur grande majorité de particuliers, issues du site internet plaintecovid.fr.
Elle est ouverte pour « homicides involontaires », « blessures involontaires », « mise en danger de la vie d’autrui », « abstention volontaire de combattre un sinistre », « non-assistance à personne en péril ».
Le procureur de Paris avait anticipé auprès de l’AFP un travail « considérable », dans une « situation historique » : « C’est la première fois que des plaintes sont déposées alors que la crise bat son plein », avait-il relevé, alors que jusque-là « dans les grandes affaires de santé publique (sang contaminé, amiante…), la justice est intervenue bien a posteriori ».
Deux avocats ont rapidement annoncé fin juin le dépôt de plaintes avec constitution de partie civile afin d’obtenir la désignation de juges d’instruction pour enquêter.
« On n’entend plus parler » de l’enquête du parquet de Paris, s’était justifié Me Fabrice Di Vizio, qui représente un collectif de médecins appelé C19.