Tahiti Nui Télévision : Emmanuel, l’Académie tahitienne a-t-elle un agenda chargé pour cette année ?
Emmanuel Nauta, directeur de l’Académie tahitienne : « En tout cas, nous avons fixé 5 chantiers. En l’occurrence, la remise en état de notre site internet avec le dictionnaire qui l’accompagne pour qu’il soit présentée en double-face. Aujourd’hui, il n’est qu’en français. Maintenant, nous souhaitons le mettre également en tahitien avec d’autres interactivités.
Deuxième chose, nous souhaitons continuer la consultation pour une éventuelle évolution de l’alphabet tahitien. En l’occurrence, il s’agit de la lettre K. Il va y avoir une conférence qui va se tenir le vendredi 25 avril au Cesec auprès des responsables et des acteurs de notre société. Ensuite, nous avons prévu également, ce sera vraisemblablement vers le 18 juin, un séminaire sur la création lexicale. Il s’agit en fait de rassembler toutes les personnes, les institutions, les associations qui contribuent à améliorer et à créer des mots nouveaux qui rentrent ensuite dans le langage. Il s’agit en fait de travailler ensemble pour que nous puissions mettre en place des règles communes et ensuite, à terme, les présenter au Fare vanaa qui puisse les valider, évidemment, chacun ayant la paternité de son mot. Enfin, il y a deux autres objectifs, à savoir l’élection de deux nouveaux vanaa, puisque John Mayer est décédé il y a un an. Et ensuite, Pascalino Tevero a démissionné pour les gens de santé.
Et enfin, une journée porte ouverte que nous avons prévue aux alentours du mois de novembre, durant la semaine des langues polynésiennes. »
TNTV : Justement, Emmanuel, revenons à la lettre K qui pourrait intégrer l’alphabet tahitien. Est-ce que ce projet avance bien ou des réticences fortes continuent de s’exprimer sur ce sujet ?
Emmanuel Nauta : « Selon les consultations que nous avons tenues jusqu’à présent, il semblerait qu’il se dégage une majorité d’avis favorables. Néanmoins, il y a aussi des opposants. Et ce que nous souhaitons même au sein du Fare vanaa, il y a une majorité qui serait plutôt favorable, mais il y a aussi qui sont parfois toujours d’accord. Donc, ils nous ont demandé qu’on consulte et qu’on continue à consulter. C’est notre façon de faire, de façon à ce qu’à la fin, il puisse y avoir, si possible, une unanimité ou du moins qu’il n’y ait pas d’opposition frontale. Ça, c’est notre façon de travailler. Et donc c’est pourquoi nous avons programmé de rencontrer les acteurs de la vie sociale. »
TNTV : Est-ce qu’à vos yeux, la langue haïtienne doit être en évolution permanente et s’imprégner des influences extérieures ?
Emmanuel Nauta : « Alors, ce qu’il faut savoir, c’est que toutes les langues, elles sont en évolution permanente. Et quelquefois même, elles s’imprègnent justement des langues extérieures.
Sinon, elles ne seraient plus vivantes, elles seraient mortes. Et c’est pourquoi nous travaillons aujourd’hui à la traduction du dictionnaire français en tahitien.
Nous venons de terminer les lettres A à D. En tout cas, c’est la révision puisqu’elle existait déjà. Mais comme elle était épuisée, nous avons depuis un an travaillé à sa révision. Parce qu’il y a des choses, il y a des nouveaux mots qui sont rentrés. Et donc, naturellement, il faut qu’on trouve des traductions. Et il y a aussi quelques fautes de frappes. Et puis enfin bref, il y a quelque chose à faire.
Et à partir de la semaine prochaine, nous allons travailler à la traduction de la lettre P. Donc il reste P jusqu’à Z. »
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TNTV : Est-ce que vous n’auriez pas dans vos projets également de travailler peut-être avec quelque chose de très actuel, l’intelligence artificielle ?
Emmanuel Nauta : « C’est totalement dans nos objectifs parce que c’est vrai que l’intelligence artificielle apporte énormément de choses. Mais maintenant, il faut savoir aussi bien maîtriser. Pour quelques mots, nous avons posé des questions à l’intelligence artificielle. Nous consultons aussi Google. Nous consultons les dictionnaires Larousse et le Petit Robret. Mais également, nous consultons nos voisins du Pacifique.
Nous ne nous arrêtons pas à nous. Nous avons par exemple la création du mot « climat ». Nous avons emprunté aux Maoris le mot « āhuarangi » qui est devenu pour nous « ‘ahuāra’i ». »
TNTV : Une de vos missions est de favoriser la publication d’ouvrages en langue tahitienne, mais aussi de favoriser la traduction en tahitien de la littérature mondiale. Estimez-vous aujourd’hui que ce pari est réussi ?
Emmanuel Nauta : « Alors pour l’édition des ouvrages locaux, nous en avons à la disposition. Nous avons à l’occasion justement des 50 ans de l’académie tahitienne en 2022, nous avons édité 12 ouvrages locaux écrits par des Polynésiens, écrits par des membres du Fare vanaa.
Et donc là, je pense qu’on avance bien. S’agissant maintenant des traductions des ouvrages internationaux, ça, c’est un peu plus compliqué parce que ça nécessite une maîtrise notamment des langues étrangères. Nous avons commencé également à faire des traductions pour les livres écrits en français. Donc ça progresse moins vite quand même que les ouvrages écrits par des écrivains locaux. »
TNTV : Ce sera ma dernière question Emmanuel Nauta. L’académie tahitienne est-elle aujourd’hui au complet ? Et qu’est-ce qu’il faut pour justement compléter si elle n’est pas au complet ?
Emmanuel Nauta : « Les statuts précisent que nous devons être 20. Et donc nous sommes actuellement 18. Et donc nous avons prévu des élections vraisemblablement aux alentours du mois d’août ou septembre. Donc les candidatures seront officiellement annoncées juste pendant cette période-là. »