Le ton est monté jeudi matin dans l’hémicycle. « C’est pas une histoire de porter plainte, c’est juste une histoire de constat de ce qu’il se passe dans ce pays ! » scande Lana Tetuanui. Les débats, qui devaient initialement porter sur un projet de loi de pays incitant les opérateurs privés à construire des logements intermédiaires, ont rapidement dévié.
Après une série d’interventions de plusieurs élus, et quelques amalgames entre logements intermédiaires et logements sociaux : l’Office Polynésien de l’Habitat est arrivé au cœur des prises de paroles.
Le président du Pays Moetai Brotherson a révélé un chiffre qui a fait l’effet d’une bombe : plus de 340 millions de charges (eau potable et eaux usées), hors loyer, n’ont pas été facturées aux locataires de l’OPH entre 2019 et 2022 : « Je crois que chacun assumera ses responsabilités et notamment ceux qui étaient à la direction de l’OPH à ce moment-là. Enfin, je ne sais pas, il y en a peut-être parmi vous qui étaient dans le CA de l’OPH de 2019 à 2022. Moi, je n’y étais pas, mais ça s’appelle un délit de concussion de ne pas facturer ».
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« Bien sûr, ce que le président a essayé de faire c’est de mettre ça sur le dos de notre gouvernement. Et la réponse, c’est que l’OPH est un organisme où il y a un directeur et où il y a un receveur. Donc il y a des personnes qui comptablement sont responsables de cette facturation. Après, il est vrai que quand le président actuel a l’air de traiter les gens comme des chiffres et des loyers, nous, effectivement à l’époque, quand on écoute bien la période 2019 – 2022, on était en plein dans la Covid. On a toujours assumé cet aspect social de dire que quand des gens ne peuvent pas payer pour des réelles raisons… après il y a des choses qui n’ont pas été recouvrés ni perçus. Mais c’est totalement assumé » explique Tepuarauri Teriitahi, représentante Tapura Huira’atira à l’APF.
C’est la première fois que le montant précis de ces irrégularités est dévoilé à l’Assemblée. Selon l’article 40 du Code de procédure pénale, toute autorité publique ayant connaissance de faits frauduleux est tenue de les dénoncer à la justice. Cet article n’a pas échappé à l’élu non-inscrit Nuihau Laurey, qui l’a rappelé à Moetai Brotherson : « Il dégoupille une grenade, il la jette au sein de l’hémicycle et ensuite, il dit que c’est pas de sa faute et que ça c’était passé en un autre temps et que finalement, ce n’est pas à lui à faire ce travail. Si, il est président du Pays, et il dénonce des faits graves qui peuvent aller jusqu’à 10 ans de prison et ensuite il dit ‘ben non, ça c’était avant, moi je ne sais pas’. Finalement, il a répondu de manière assez générale, je pense qu’il s’est rendu compte lui-même qu’il avait mis les pieds dans le tapis ».
Maintenant que ces faits sont publics, la justice pourrait s’en saisir si aucune action n’a encore été entreprise.