TVA sociale : qu’est-ce que c’est, comment ça marche et pourquoi c’est urgent ?

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Plutôt que de relever les cotisations sociales et alourdir le coût du travail, principal contributeur de la PSG, le ministère des Finances mise sur cette taxe assise sur la consommation. Présenté vendredi aux acteurs économiques, le toilettage de la fiscalité prévoit la mise en place d’une TVA sociale dès 2022. Il s'agit de sauver en urgence la protection sociale généralisée qui vit à crédit depuis 2020.

Publié le 27/10/2021 à 17:32 - Mise à jour le 25/04/2022 à 14:19

Plutôt que de relever les cotisations sociales et alourdir le coût du travail, principal contributeur de la PSG, le ministère des Finances mise sur cette taxe assise sur la consommation. Présenté vendredi aux acteurs économiques, le toilettage de la fiscalité prévoit la mise en place d’une TVA sociale dès 2022. Il s'agit de sauver en urgence la protection sociale généralisée qui vit à crédit depuis 2020.

Un impôt à la consommation pour financer la santé, l’idée a fait son chemin jusqu’au fenua et figure dans la proposition de loi fiscale cadre, aujourd’hui en phase de relecture. Mesure phare du plan de modernisation de la fiscalité (sur un total de 22 recommandations) présenté vendredi par le ministre des Finances, Yvonnick Raffin, aux acteurs économiques, cette TVA sociale devrait voir le jour dès l’année prochaine, mais sous une autre dénomination. Car le temps presse. Essentiellement supportée par les 80 000 travailleurs du fenua, soit un tiers de la population, la PSG a subi avec la Covid une saignée économique sans précédent.

Avec des recettes inférieures aux dépenses et plus de 20 milliards de Fcfp de prêts à rembourser, il s’agit de trouver rapidement de nouveaux financements sans renchérir le coût du travail, déjà élevé en Polynésie. « Soit on augmente les cotisations (…) soit on baisse les dépenses de santé, » résume le ministre des finances, Yvonnick Raffin. Hors de question cependant pour le Pays de dégrader l’offre de soin. Ce qui viendrait se répercuter in fine sur l’état des comptes. « Sinon, on imagine un autre moyen de financer, et c’est la fiscalité : la TVA sociale » poursuit le ministre.

Si son taux reste à définir, le Pays table pour l’instant sur 1%. Sur une dépense de 100 Fcfp, 1 Fcfp irait donc dans les caisses de la PSG. Chaque consommateur deviendrait alors « acteur » dans l’opération de sauvetage de la PSG. Seule certitude aujourd’hui : cette taxe ne sera pas appliquée aux produits de première nécessité (PPN). Mais contrairement à une TVA classique, elle serait non-déductible afin de viser un meilleur rendement et donc des recettes plus importantes. « Si ce n’est pas déductible, ça se répercute à chaque niveau dans l’achat/revente, dans toute la chaîne de valeur. Ça va toucher en fait un nombre de transaction plus élevé que si l’on prend juste la comptabilisation des transactions finales » explicite le professeur des universités en sciences économiques, Florent Venayre. Un « péage » à chaque transaction qui favoriserait mécaniquement les circuits courts et donc la production locale indique-t-on au ministère. « Ce qui permettrait de venir baisser les taux de cotisations de la maladie et redonner un peu de pouvoir d’achat aux salariés et aux patrons » poursuit le ministre.

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Avec des transactions estimées à 900 milliards de Fcfp, l’enjeu sur le caractère déductible ou non de cette TVA est pris très au sérieux. « On peut toujours discuter du bien fondée de cette proposition, mais quoi qu’il arrive il faut faire quelque chose. Si on ne fait rien, le système s’effondre » assène l’économie. Reste à savoir comment introduire cette TVA dans la fiscalité. Faudra-t-il ajuster la TVA actuelle, ou en créé fléchée spécifiquement sur la protection sociale généralisée ? « Moi je suis plutôt pour la seconde option, parce que c’est beaucoup plus facile d’identifier et de rendre compte ensuite » répond Yvonnick Raffin.

Et pour affecter cette TVA à la PSG, deux mécanismes sont à l’étude. Soit elle se déverse dans le budget social du Pays avant d’être transférée vers la protection sociale généralisée. Soit, elle est fléchée directement dans un compte spécial -en l’occurrence le Fonds pour l’emploi et la lutte contre la pauvreté (Felp)- qui viendrait directement alimenter la PSG. « Il y a des effets positifs et négatifs dans les deux cas. D’un côté il y a plus de souplesse si on ne flèche pas, mais de l’autre il y a une acceptabilité sociale plus importante, puisqu’on va expliquer aux gens que ce point-là va financer des prestations sociales dont ils vont bénéficier eux-mêmes » commente Florent Venayre.

Si à terme, la création d’une TVA sociale doit permettre d’alléger les cotisations, le risque inflationniste qu’elle présente n’est pas tout à fait nul. « Ça reste quand même une TVA supplémentaire », rappelle le professeur Venayre, « il est évident que ça va peser sur le prix final des produits importés ». Tout dépendra du taux de référence qui sera retenu. « Mais si on répercute ça positivement sur le coût du travail, on peut effectivement avoir une compensation sur le prix final » précise l’économiste. Au ministère des Finances, on cite ainsi le modèle allemand ou danois, dont la TVA sociale adopté dans les années 80 n’a pas entraîné de flambée des prix.

Urgence oblige, ce nouvel impôt sera intégrée au projet de loi fiscale présenté avant la fin de l’année en conseil des ministres, puis à l’assemblée de Polynésie. Il s’agit de le mettre en œuvre dès 2022, afin d’assurer la solvabilité des régimes et d’éviter une rupture de paiement qui déboucherait sur une crise sociale sans précédent.  

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