Il a 25 ans et a déjà choisi son combat depuis longtemps. Jason Man Sang a quitté ses études en ingénierie environnementale il y a plusieurs années pour se lancer plus vite dans le combat pour la protection de l’environnement, chez lui au fenua.
Investi dans plusieurs associations, vice-président de la Fédération des associations de protection de l’environnement de Polynésie (Fape), Jason est sans arrêt en recherche d’idées pour sensibiliser la population. Dans les écoles, dans la rue, sur les réseaux sociaux… il use de tout ce qui est possible pour toucher son public. Jason est à l’origine d’une marche pour le climat mais aussi du tour de Tahiti à brouette. Il est aussi, avec un ami, derrière le collectif « Extinction rébellion » et la mise en place d’une « butte sauvage » devant l’assemblée.
Son dernier défi ? Manger local pendant un mois, « minimum ». « J’ai commencé il y a un peu moins de deux semaines. L’idée c’est de promouvoir nos produits locaux, de montrer que c’est possible de manger 100% local ou ne serait-ce que manger beaucoup plus local. (…) Montrer qu’on peut faire beaucoup de recettes, que ça ne se réduit pas au ma’a Tahiti du dimanche, que c’est viable économiquement aussi. C’est une grande expérience pour montrer qu’on a tout ce qu’il faut ici. »
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Jason se fournit le dimanche matin au marché de Papeete ou auprès des vendeurs de bord de route. Il a aussi un fa’a’apu. « Juste avec le marché du dimanche, j’ai mes courses pour la semaine. Je ne m’embête pas à faire plusieurs magasins.(…) J’ai aussi pas mal d’amis qui me donnent des choses. On est une petite communauté où, quand on a besoin, on demande et voilà. »
Jason admet que depuis le début de son défi, des produits importés comme l’huile d’olive, les pois chiche ou certaines épices tel que le curry lui manquent. « En vrai c’est ok. L’idée n’est pas de dire à tout le monde de se retreindre comme ça. Je fais le cobaye donc j’accepte mais l’idée c’est de dire qu’on peut manger beaucoup plus de local. »
Le militant écologiste, végétarien depuis 6 ans déjà, ne mange donc pas de viande, ni d’oeufs, ni de poisson pour ce défi… « Je ne dis pas aux gens de ne pas manger de poisson. Ce serait ridicule. Mais juste, j’aimerai dire qu’on peut vivre sans manger de poisson ou en en mangeant moins. Parce qu’actuellement on mange trop de poisson. Il y a trop de pression sur les océans. On le voit bien : nos lagons sont en train de se vider, au large pareil, dans le monde entier ça se vide. Donc il faudrait qu’on mange moins de poisson pour sauver nos océans. C’est un fait. Moi je montre qu’on peut vivre en mangeant moins de poisson. »
D’après lui, il est possible de manger local pour environ 6 000 Fcfp par semaine, sans avoir de fa’a’apu ni de dons d’autres personnes. Mais l’idéal selon Jason, serait que chacun puisse avoir un accès à la terre pour cultiver. « On devrait faire en sorte que les gens aient accès à la terre : des jardins partagés, au niveau des communes, de l’île, des autres îles aussi. Les gens devraient avoir accès à la terre pour cultiver, ceux qui n’ont pas trop les moyens de s’acheter à manger. »
« Notre grand levier en tant que nation insulaire, c’est ça, c’est de manger local »
Jason Man Sang
Pour lui, manger local est vraiment la solution pour protéger l’environnement et la santé des Polynésiens : « Nous les Polynésiens on a une emprunte écologique gigantesque sur les émissions de gaz à effet de serre parce qu’on importe tout. Aujourd’hui on est à plus de 80% d’importation pour l’alimentation. Donc c’est trop. (…) Notre grand levier en tant que nation insulaire, c’est ça, c’est de manger local. En plus ça promeut nos agriculteurs locaux, ça fait qu’on va utiliser nos terres, parce que nos terres sont extrêmement fertiles (…) Si on cultivait toutes nos terres ici, il n’y aurait plus de gens qui auraient faim (…) Au lieu de planter des immeubles, il faudrait planter des arbres. »
Après ce mois de repas 100% made in fenua, Jason fera un bilan sanguin, « pour voir si tout va bien. Pour que ce soit un peu plus rigoureux et en terme d’expérience, il faudrait que je continue encore quelques mois pour voir si ça se stabilise. Et après le but serait de faire des ajustements (…) L’idée serait de faire des ajustements jusqu’à trouver quelque chose de bien et que je puisse proposer aux gens une alimentation viable 100% locale. »
L’écriture d’un livre de recettes pourrait être envisagé. En attendant, pour ceux qui voudraient le suivre dans son défi, Jason partage ses recettes et aliments chaque jour sur les réseaux sociaux.