Plusieurs raisons ont conduit à cette situation. La première : une enquête pénale visant un juge d’instruction diligentée par le procureur de la République « à la demande de son procureur général ». Ce même juge avait sollicité un congé d’adoption après avoir accueilli un bébé avec son conjoint. Un enfant fa’a’amu.
Or, selon l’article du Monde, le procureur général Thomas Pison « est subitement parti en guerre contre cette tradition » polynésienne et a donc ordonné une enquête pénale contre son collègue du siège pour « provocation à l’abandon d’enfant ». L’affaire a finalement été dépaysée en Nouvelle-Calédonie où elle a abouti à un classement sans suite faute d’infraction établie.
Selon Le Monde, le procureur général aurait son collègue du siège « dans le viseur depuis longtemps » car l’intéressé avait un nombre de dossiers en retard considérable et avait, en outre, multiplié les erreurs de procédures. Pour ces manquements, le magistrat a d’ailleurs été muté d’office en métropole en octobre dernier après un passage devant le Conseil Supérieur de la Magistrature.
– PUBLICITE –
Mais les relations entre magistrats du parquet et du siège ne se sont pas apaisées. Autre grief de ces derniers à l’égard du chef du parquet général, le fait qu’il leur ait donné des « consignes » après le départ à la retraite du premier président de la cour d’appel, et avant l’arrivée de son successeur. Or, le procureur général n’est pas censé avoir autorité sur les magistrats du siège.
« Après l’enquête administrative contre le juge d’instruction, la chancellerie a dû envoyer une seconde inspection sur le fonctionnement de la juridiction » de Papeete, écrit ainsi Le Monde. Ses conclusions sont encore confidentielles mais, selon le quotidien, elles mettent « en évidence de profonds désaccords et des positionnements juridiquement contestables de la part du procureur général », qui ont « contribué à fragiliser la dyarchie », c’est-à-dire le partage des attributions entre siège et parquet.
Toujours selon Le Monde, le premier président de la cour d’appel de Papeete et le procureur général ont été convoqués le 15 décembre au ministère de la Justice à Paris pour s’expliquer. Ils ont indiqué que ces dissensions n’avaient pas eu d’incidence sur le bon fonctionnement du palais de justice.
Reste qu’une troisième inspection a été diligentée par la Chancellerie, cette fois, après une visite au fenua de la contrôleuse générale des lieux de privation de liberté (CGLPL). Celle-ci pointait notamment du doigt un taux d’incarcération deux fois plus élevé en Polynésie qu’en métropole ainsi que des dossiers mal tenus et un mauvais suivi de l’exécution des peines. Les conclusions de cette mission n’ont, elles, pas encore été rendues mais cette nouvelle inspection écorne encore un peu plus l’image de la juridiction.