C’est la plainte d’une mère qui a permis ce procès. En février 2019, son fils, en classe de CM1, rentre de l’école avec une déchirure à l’oreille qui lui a valu 2 jours d’ITT. « Il s’était fait tirer l’oreille par son instituteur, raconte-t-elle. Suite à ce certificat médical, je me suis rendue à l’école de mon fils pour voir le directeur. Il était déjà au courant, il me disait qu’il recevait pas mal de parents dans son bureau qui se plaignaient de cet enseignant qui faisait mal aux enfants. Je lui ai dit : si vous êtes au courant, pourquoi ne pas le signaler ? Il m’a dit qu’il attendait que les parents aillent plus loin, aillent à la gendarmerie faire une déposition de plainte. Je suppose que je suis la première mère à faire ça. »
Devant le tribunal correctionnel ce mardi, il n’y avait pas que son fils du côté des victimes. Mais également 20 autres élèves de sa classe, qui ont eux aussi subi les mauvais traitements de l’enseignant. Parmi les sévices infligés, les enfants ont indiqué que l’enseignant crachait dans leur bouche. Il faisait aussi agenouiller celui qui s’était trompé de réponse et demandait aux autres élèves de tirer tour à tour son oreille. Et si l’un d’entre eux refusait de maltraiter son camarade, il devenait à son tour victime et subissait le même sort.
L’enseignant d’une soixantaine d’années, qui comparaissait libre, est reparti menotté du palais de justice. Le tribunal correctionnel l’a condamné à 4 ans de prison, dont 2 avec sursis, avec obligation de soin. Il lui est également interdit d’exercer toute activité liée à l’enseignement et au domaine associatif impliquant des enfants. L’Etat a également été condamné à indemniser chacune des 21 victimes la somme de 300.000 Fcfp.
« Que fait l’Education ? »
Avec cette affaire, c’est tout le système éducatif qui a été remis en question. Car si le cas des élèves de cette classe de l’année 2018-2019 a été portée devant la justice aujourd’hui, il n’en reste pas moins que les premiers signalements de maltraitance remontent aux années 1990…
« Mon fils n’est pas le premier à subir ça, indique la mère qui a lancé la procédure. Il y en a eu bien d’autres depuis des années. Que fait l’Education ? Que fait l’Enseignement ? »
Le directeur de l’école Vaiaha était d’ailleurs également poursuivi dans cette affaire, pour non dénonciation, « c’est-à-dire de ne pas avoir assez rapidement révélé les agissements de cet instituteur qui officiait dans son école, explique Me Loris Peytavit, son avocat. Il a été condamné à une peine de principe de 4 mois d’emprisonnement avec sursis. On est un peu déçus par cette décision. J’avais demandé la relaxe de mon client parce que cet instituteur est bien connu de l’administration. Ça fait des années qu’on sait qu’il a des agissements de la sorte et rien n’a été fait. Et c’est mon client, qui est le dernier directeur de l’instituteur qui a été condamné, qui se retrouve lui traduit devant la justice alors que tous ceux d’avant ne sont pas là et l’administration de rattachement n’est pas là non plus. Donc c’est un peu déplorable de voir cette condamnation… »