Après deux renvois, le procès du skipper néo-zélandais arrêté avec 9,5 kilos de cocaïne emballés sur son bateau à Faa’a, le 24 octobre 2024, s’est finalement tenu ce jeudi. Repéré par les services anti-stupéfiants d’Australie, où il comptait se rendre après avoir acheté pour 8 kilos de drogue au Panama, il avait expliqué aux enquêteurs qu’il comptait la consommer et non la vendre.
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Ancien manager de plateforme pétrolière, propriétaire d’un motel qu’il a vendu pour 1,5 millions de dollars australiens, l’homme de 57 ans assure n’avoir aucun lien avec les narcotrafiquants d’Amérique centrale, qu’il a sillonnée après l’achat de son voilier dans les Caraïbes en 2023, à Saint-Martin. Il est simplement, dit-il, devenu addict à la cocaïne au cours d’un passage en Colombie, où « tout le monde veut être ami avec vous » . Il indique ainsi avoir refusé de transporter d’énormes quantités de drogue.
S’il reconnaît le « désastre » de sa situation, il prétend avoir toujours rêvé de s’acheter un bateau, « moins cher dans les Caraïbes » , pour passer le restant de ses jours à voyager, notamment en Polynésie française. Seulement, il n’avait pas prévu « perdre son esprit » et devenir « intoxiqué » par la cocaïne, au point de dépenser 32 000 dollars – en cash, sa tentative de passer par un compte crypto échouant – pour s’en procurer autant.
« Vous êtes suicidaire ? »
Aucun des paquets n’ayant été ouvert lors de sa traversée du Costa Rica au fenua, la présidente du tribunal interroge sa dépendance. « Trop dangereux de consommer quand on navigue » , répond-il. « Moyennement crédible » , rétorque-t-elle, penchant plutôt pour la thèse classique d’un convoyage entre le Panama et l’Australie. D’autant plus que l’homme est un skipper peu expérimenté. Au total, il n’a passé qu’une vingtaine de jours en mer avant ce voyage, dont une douzaine « d’entraînement » en Thaïlande. Un détail qui interpelle les juges. « Vous êtes suicidaire ? » , demande la présidente au prévenu.
S’improviser navigateur, se découvrir consommateur de drogue dure sur la route, la procureure Solène Belaouar n’y croit pas non plus. Elle estime en outre que tous les éléments pointent vers une tentative de trafic, et requiert 7 ans de prison plus la confiscation de l’ensemble de scellés, ainsi que du bateau, toujours amarré au port de Papeete.
« Assez surprise » de ce quantum qu’elle juge « excessif » , l’avocate du prévenu Me Isabelle Nougaro plaide la solitude et le désœuvrement de son client, « une personne sans attache » qui n’a rien d’un trafiquant en lien avec des cartel d’Amérique centrale. Elle demande surtout à ce que le bateau, « sa maison » , ne lui soit pas confisqué.
Le tribunal a finalement condamné l’homme à quatre ans de prison pour importation, transport et détention de stupéfiants, et ordonné son maintien en détention. Relaxé des chefs d’offre et de cession, il s’est vu infliger une amende de 10 millions de francs. Quant à son bateau, il ne lui a pas été confisqué.