Violences et psychiatrie, la descente aux enfers de “deux écorchés de la vie”

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Un homme a été condamné, ce mardi, à 18 mois de prison avec sursis pour des violences commises sur sa concubine. Ce ressortissant américain, qui a régulièrement séjourné en psychiatrie, avait lourdement battu sa compagne qui souffre d’épilepsie depuis son plus jeune âge. Une femme qui n’a pas souhaité porter plainte : “Ce n’est pas une mauvaise personne”.

Publié le 19/11/2024 à 18:01 - Mise à jour le 19/11/2024 à 18:03

Un homme a été condamné, ce mardi, à 18 mois de prison avec sursis pour des violences commises sur sa concubine. Ce ressortissant américain, qui a régulièrement séjourné en psychiatrie, avait lourdement battu sa compagne qui souffre d’épilepsie depuis son plus jeune âge. Une femme qui n’a pas souhaité porter plainte : “Ce n’est pas une mauvaise personne”.

Pénible dossier étudié ce mardi par le tribunal correctionnel. Celui d’un couple à la dérive. En février 2023, les agents de la DTPN étaient intervenus dans un immeuble de Papeete. L’homme venait de violement battre sa femme et s’était lui même infligé des blessures aux bras et à la tête, laissant des mares de sang dans la cellule du commissariat.

Sa compagne présentait des hématomes à l’œil et à la lèvre, ainsi qu’un œdème au front, qui lui ont occasionné plus de 8 jours d’incapacité de travail. Auditionnée le soir même, la victime avait déclaré que son conjoint l’avait frappée au visage, puis avait tenté de lui “crever l’œil avec ses doigts” et de l’étrangler, avant de la menacer de mort, armé d’un couteau.

Des propos sur lesquels elle est revenue à l’audience, ce mardi.  “Je n’ai jamais voulu porter plainte. J’ai sorti tout et n’importe quoi (…) Je lui pardonne. Ce n’est pas une mauvaise personne (…) C’était une mauvaise journée pour lui. Il a perdu le contrôle et n’était plus lui même”, a soufflé la jeune femme qui vit des allocations “adulte handicapé” en raison de la lourde épilepsie dont elle souffre depuis son enfance. 

Pour ses proches, sa rencontre avec le prévenu a compliqué encore davantage la situation.  “Il l’isole de sa famille. Elle s’éteint à petit feu”, a témoigné sa sœur. Son père ne porte pas non plus l’homme dans son cœur.  “Il va trébucher dans votre bureau, va se cogner la tête contre le mur et dire que vous l’avez frappé”, a-t-il lancé aux policiers. “Peu importe ce que mes parents disent. Ils n’ont pas à le juger”, a réagi à la barre la jeune femme.

La psychologue qui s’est entretenue avec elle a conclu à une “très forte emprise psychologique” de son conjoint, au point qu’elle “renonce à certains éléments de sa personnalité. “Elle a tendance à être dans le déni et à minimiser les faits (…) Elle est capable de mentir pour protéger la réputation du mis en cause. Elle dit qu’elle même et son compagnon son victime du système judiciaire”, a ajouté l’experte.

Des séjours en psychiatrie depuis ses 6 ans

Natif des États-Unis, le conjoint, qui vit de petits boulots au noir, s’est installé au fenua après sa rencontre avec une Polynésienne avec laquelle il a eu deux enfants. Mais il ne les voit plus depuis de longues années car il est sous le coup d’une enquête pour viol, qui ne connait pas d’avancée notable, comme l’a regretté son avocat.

Il a aussi séjourné dans des hôpitaux psychiatriques dès ses 5 ans aux États-Unis pour avoir dénoncé un viol, fictif, qu’il aurait subi d’un policier. Il a de nouveau été interné de ses 11 à 13 ans, puis à 19 ans pour des tentatives de suicide. A Tahiti aussi, il a séjourné à Tokani.

A la barre, l’homme a reconnu avoir “giflé” sa compagne et l’avoir menacé avec un couteau, mais sans en dire davantage. “Je regrette sincèrement. Je lui demande pardon”, a-t-il gémi.

Pour son avocat, Me Teremoana Hellec, le dossier est celui de “deux écorchés de la vie”. “Il fait des aller-retours dans des hôpitaux psychiatriques depuis ses 6 ans. Il cherchait un endroit calme pour mourir. Il n’a pas vu ses enfants depuis 6 ans. Il a les doigts pris dans un engrenage judiciaire dont il ne comprend pas le sens. Il a pété un câble. Il n’a plus la faculté de supporter ce qu’il lui arrive”, a déclaré l’avocat.

Celui de la victime, Me Béatrice Eyrignoux, a marché sur des œufs : “ L’avocat doit aller dans le sens de son client. Elle veut que par ma voix il soit pardonné”. Puis celle-ci de poursuivre : “Mais cette jeune femme me fait de la peine. Il faut qu’elle soit aidée pour sortir de la situation dramatique dans laquelle elle se trouve”.

Sans casier judiciaire jusqu’à aujourd’hui, le conjoint a finalement écopé de 18 mois de prison avec sursis, assortis d’une obligation de soins. Le tribunal lui a également interdit d’entrer en contact avec la jeune femme.

Interrogée peu avant le délibéré pour savoir si elle entendait reprendre une vie de couple avec lui, celle-ci a répondu après un long silence : “Si j’écoute mon cœur, oui. A ce jour, je n’ai pas encore choisi”.

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