Cédric Mercadal fait le point sur les avancées de la réforme de la PSG

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Où en sont les travaux de réformes de la Protection sociale généralisée et globalement de la Santé ? Les concertations avec les partenaires sociaux ont commencé depuis peu. Ces réformes doivent notamment participer à l'absorption de la suppression de la TVA sociale. Des changements annoncés pour redresser et pérenniser notre PSG. Le ministre de la Santé, en charge de la PSG, Cédric Mercadal était l'invité de notre journal jeudi.

Publié le 04/10/2024 à 9:47 - Mise à jour le 04/10/2024 à 16:11

Où en sont les travaux de réformes de la Protection sociale généralisée et globalement de la Santé ? Les concertations avec les partenaires sociaux ont commencé depuis peu. Ces réformes doivent notamment participer à l'absorption de la suppression de la TVA sociale. Des changements annoncés pour redresser et pérenniser notre PSG. Le ministre de la Santé, en charge de la PSG, Cédric Mercadal était l'invité de notre journal jeudi.

Tahiti Nui Télévision : Avant de parler des réformes annoncées, comment se portent nos comptes sociaux ?
Cédric Mercadal, ministre de la Santé : « Les comptes sociaux seront à l’équilibre à la fin de l’année, donc il n’y aura pas de soucis. Ils sont même un petit peu excédentaires, très légèrement. Mais quand on a accusé un déficit, on ne parle pas vraiment d’excédent. Mais ils seront à l’équilibre.« 

TNTV : Mais il faut tout de même réformer, d’où la réforme de la PSG. Justement sur la PSG, vous allez dans un premier temps, à travers une loi de Pays, revoir le dossier des longues maladies communément appelées « carnets rouge », cela concernait plus de 46 000 personnes en 2023. Qu’est-ce qui va changer ? On vous a entendu parler d’inégalité.
Cédric Mercadal : « Aujourd’hui, un « carnet rouge » était octroyé avec des listes différentes dans les trois régimes. Ce n’étaient pas les mêmes maladies. La CPS avait décidé de prendre une seule des listes pour éviter les inégalités, mais sans texte légal. On va harmoniser ces listes pour que ce soit les mêmes maladies pour tous, déjà.
Deuxième chose, il n’y avait pas de critère de définition pour tout un chacun de la longue maladie, donc c’était à l’appréciation de chaque personne qui analysait les dossiers. On a posé des critères clairs pour déterminer, de manière objective, qui sera en longue maladie et qui ne le sera pas. Et ensuite, on viendra encadrer les prescriptions, ce qui permettra de limiter que des actes qui ne devraient pas rentrer dans une longue maladie, qui ne sont pas liés à celle-ci, soient pris en charge à 100%. »

TNTV : Pour harmoniser et contrôler le suivi des patients, une loi relative à l’e-santé est prévue. Peut-on en savoir un peu plus ?
Cédric Mercadal :
« La loi relative à l’e-santé est importante parce qu’elle va permettre de toucher des soins au plus près de nos populations des iles. Derrière un écran, avec un protocole de soins partagé, l’infirmier pourra agir à la place du médecin et il pourra être ses mains sur le terrain. Ça permettra de limiter aussi le nombre d’evasans. Il ne faut pas oublier que les evasans, à 75%, c’est un billet d’avion et un hébergement. »

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TNTV : On peut rappeler le coût des evasans ?
Cédric Mercadal : « C’est 5 milliards. Aujourd’hui, on évasanne juste inter-îles, c’est 3 milliards. »

TNTV : La réforme de la PSG sous votre ministère se traduira également par une réforme de l’affiliation aux régimes RGS, RNS et RSPF, une réforme que vous présentez comme plus équitable. Concrètement, le salarié qui est aussi patenté cotisera en fonction de son activité principale la mieux rémunérée. Est-ce bien ça ?
Cédric Mercadal :
« Pas tout à fait. En fait, la PSG aujourd’hui, c’est trois choses et c’est construit depuis 1995. C’est un beau système qui a été mis en place. Quand vous êtes travailleur, salarié, vous avez un contrat de travail, vous n’êtes pas dans les deux autres régimes. Ce qui veut dire que si vous avez une patente à côté, vous ne cotisez pas dessus. À l’inverse, vous avez plus de 87 346 Fcfp. Vous êtes RNS, vous en avez moins, vous êtes RSPF. Ce qui se passe, c’est que nous, on va mettre l’activité au cœur de l’affiliation au RNS. Et ça voudra dire qu’une personne qui a une activité en même temps qu’un contrat de travail devra aussi cotiser sur sa patente. Ses ressources sont soumises à cotisation. Pourquoi ? Parce que quelqu’un qui est au RNS aujourd’hui facture 10% à l’ensemble de ses clients. Alors que la personne qui est salariée et qui a une patente, elle ne la facture pas. C’est l’égalité entre les personnes qui exercent une même activité. »

TNTV : Donc double cotisation pour les travailleurs patentés à la fois.
Cédric Mercadal : « Ce sera une cotisation sur la partie patente, c’est tout. »

TNTV : Il est également question de soutenir les travailleurs non salariés qui auraient des revenus limités, de les accompagner par exemple par des indemnités journalières s’ils ne peuvent plus travailler.
Cédric Mercadal : « En mettant l’activité au cœur du système, on va se rendre très vite compte qu’il y a des RSPF qui aujourd’hui sont actifs, on en a, et il faut les accompagner. Il faut leur dire, vous savez quoi, le Pays, en dessous de 87 346 Fcfp, paiera vos cotisations, donc vous pouvez vous déclarer au RNS. Et en étant au RNS, en fait, ils auront droit à des indemnités journalières, c’est-à-dire au paiement de leurs arrêts maladie quand ils se seront cassé une jambe. Et moi, je connais déjà trois agriculteurs à qui c’est arrivé. Et au moins, tu ne te retrouves pas dans le no man’s land du RNSPF où tu n’as le droit à rien et tu es puni une deuxième fois alors que tu es actif. Là, on t’accompagne, on te suit et on te donne un salaire de substitution quand tu te casses une jambe.« 

TNTV : Et à combien coûtera cet accompagnement du Pays ?
Cédric Mercadal :
« Cet accompagnement aujourd’hui est chiffré à 600 millions au regard des chiffres qui ont été communiqués par la CPS. »

TNTV : Vous voulez aussi réformer le système d’aide sociale et tendre vers une équité des prestations familiales. Comment cela se traduit-il ?
Cédric Mercadal :
« Parce que quand on touche à l’affiliation, on se rend vite compte qu’en fait, il y a deux régimes. On peut être à mi-temps ou à moins de 87 346 Fcfp et on touche 12 000 Fcfp. Par contre, au RNSPF, moins de 87 346 Fcfp, on touche 15 000 Fcfp. Donc il est plus favorable d’aller au RNSPF et de ne pas déclarer ses activités.
Demain, à moins de 100 000 Fcfp, vous aurez tous 15 000 Fcfp. Peu importe le régime dans lequel vous êtes. C’est une vraie solidarité.
Mais pour arriver à financer ce type de choses, au fur et à mesure de l’évolution d’un certain niveau de ressources, vous aurez un tout petit peu moins de prestations familiales. »

TNTV : Donc des aides sous condition de ressources.
Cédric Mercadal :
« Des allocations sous condition de ressources. »

TNTV : Il y aurait également l’augmentation de la prise en charge des frais de cantine pour tous.
Cédric Mercadal :
« Pour la peine, pour compenser pour ces familles qui ont perdu un petit peu de pouvoir d’achat, on va compenser par la cantine pour tous. Parce qu’on va en faire une prestation légale qui sera la même somme dans les trois régimes, là aussi, et qui sera plus importante. Ce qui permettra à tout un chacun de mettre ses enfants à la cantine, de faire de la cohésion sociale, parce que moi je me rappelle d’une époque où, qu’on soit riches ou pauvres, on mangeait tous à la cantine. On mangeait avec ses meilleurs copains et on se les ai fait pour la vie, peu importe le statut social dans lequel on était. Et l’avantage c’est que, par exemple, le ministère de l’Education, l’an dernier, a mis 150 millions pour des repas plus sains à la cantine. Ce qui permet de dire, au lieu d’acheter une bouteille de coca et un casse-croute au chow mein, mettez vos enfants à la cantine, vous êtes mieux remboursés. On vous accompagne et en plus ils auront des repas de qualité. Et au-delà de ça, on fait de la cohésion sociale et pas de distinction au regard des repas.« 

TNTV : Ces grands changements dont on vient de parler, à partir de quand seront-ils appliqués ? Combien de temps vous laissez vous ?
Cédric Mercadal :
« Alors on a déjà commencé à faire les réformes. La réforme de la longue maladie a été travaillée en début d’année. Aujourd’hui elle est dans le circuit, elle est à l’Assemblée. Elle a reçu l’avis unanime et favorable du Cesec et du CSPSU, du Comité stratégique pour la protection sociale. Ce qui fait que demain, il va être voté à la commission de l’Assemblée, la commission santé, et puis elle sera dans les rouages d’ici la fin d’année. Et toutes les mesures arriveront pour être applicables pour l’affiliation en 1er juillet 2025.« 

TNTV : Alors parallèlement à la réforme de la PSG, des réformes de santé, ça commence par la modification du statut des établissements hospitaliers en établissement public de santé. Quel est le but visé ?
Cédric Mercadal : « Le but visé est tout autre. Il est d’établir une projection pluriannuelle des budgets, déjà, pour avoir une meilleure légitimité du besoin en soins et de mieux étaler les dépenses sur 3 ans, ce qui permettra de revenir à un meilleur équilibre de ces régimes de prise en charge au niveau des établissements de santé.
Mais c’est surtout d’avoir une meilleure modularité dans le cadre d’emploi de nos praticiens qui en ont vraiment besoin et d’établir de nouveaux types de contrats. C’est un travail qu’on mène avec le ministère de la Fonction publique et qui sera présenté au partenaire d’ici peu, parce qu’on est en train d’harmoniser tous les services pour que tout le monde soit d’accord. Et d’ici la fin de l’année, le présenter au partenaire ou en début d’année prochaine. »

TNTV : Demain, vous partez à Paris pour la convention Etat-Pays relative à la santé sur 3 ans. La dernière a été rallongée, on le rappelle. Vous voulez revoir les dispositions de cette convention, c’est bien ça ?
Cédric Mercadal :
« Oui, aujourd’hui, elles sont fixées quasiment exclusivement sur de l’investissement et de la formation.
On veut plus de choses. On veut que l’Etat revienne à la table de la solidarité nationale parce qu’au final, on va aller discuter des molécules onéreuses. En métropole, dans les établissements de santé, ils sont pris en charge par l’Etat. C’est la solidarité nationale parce que ça vient financer les labos. Et nous aussi, il faut que la solidarité nationale s’étende à nous. Au-delà de ça, il ne faut pas oublier que le cancer, il est dû à certaines choses dans notre Pays.

Aujourd’hui, les travailleurs qui étaient sur le site de Moruroa qui sont rentrés en métropole sont pris en charge par 68 millions d’habitants. Et que nous, les cotisations, c’est 300 000 habitants qui assument pour nos Polynésiens. Il faudra que l’Etat vienne nous accompagner là-dessus.
Et une deuxième chose, les évasans urgentes, aujourd’hui, dans les autres territoires, c’est pris en charge par l’Etat. Il pourrait nous accompagner aussi. »

TNTV : Au-delà de tout ça, il y a d’autres travaux interministériels qui devraient toucher la santé des Polynésiens. On en a beaucoup parlé, la taxe sur les produits sucrés qui sera étendue à d’autres produits néfastes ultérieurement. Les recettes de la TVA sont fléchées au budget général et non vers la PSG. À quel moment vont-elles revenir vers les comptes sociaux ?
Cédric Mercadal :
« Le travail se fera avec Warren (Dexter, NDLR). J’ai un ministre des Finances qui est un vrai technicien et qui connaît très bien son domaine. On va travailler sur une taxation des produits les plus sucrés. La TVA est un des leviers qui permet d’agir là-dessus. Il va discuter avec les partenaires sociaux, je pense, pour faire une TVA juste, mais qui permettra de réduire la consommation en sucre de nos populations. L’objectif n’est pas tant l’affectation, il est de diminuer la consommation de sucre. Il ne faut pas oublier que le coût du sucre en Polynésie, chaque année, il est de 22 milliards sur les maladies issues de celui-ci. »

TNTV : Donc les recettes générées par la hausse de cette TVA ne viendront pas forcément financer la prévention ?
Cédric Mercadal : « Si, elles viendront aider à la prévention via le budget général ou l’équilibre des comptes sociaux. »

TNTV : À travers des dotations, par exemple ?
Cédric Mercadal :
« Tout à fait. »

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