C’est ce mardi que la délégation du Tavini s’exprime devant la 4e commission de l’ONU. Les pétitionnaires réclament un programme de travail sur la Polynésie pour entamer un processus de décolonisation. Pour rappel, la Polynésie est réinscrite sur la liste des pays à décoloniser depuis mai 2013.
« Le programme de travail permettrait de se faire une opinion », a déclaré devant la commission Richard Tuheiava qui estime que la « France continue à violer la charte en ne reconnaissant pas la décolonisation (…) Nous sommes profondément préoccupés par le fait que le non lancement d’un programme empêche le processus de décolonisation relancé en mai 2013. »
Argument principal des Indépendantistes pour justifier leur présence, une nouvelle fois, devant la 4e commission de l’ONU : la victoire aux élections législatives des trois candidats Tavini, Moetai Brotherson, Steve Chailloux et Tematai Le Gayic.
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C’est « fort de cette victoire démocratique » que nous venons devant vous, a déclaré à l’ONU Tony Géros qui demande à la France « de ne plus pratiquer la politique de la chaise vide et d’entamer une négociation sur la décolonisation. »
Pour le leader indépendantiste Oscar Temaru, « il n’y a pas de démocratie dans un territoire où la démocratie est gérée par un autre pays »…
19 pétitionnaires… et René Temeharo
19 pétitionnaires indépendantistes dont Steve Chailloux et Tematai Le Gayic, sont en ce moment à l’ONU. Le Pays est représenté par une seule personne : René Temeharo, ministre des Grands travaux et des Transports terrestres.
« Tout n’est pas parfait. Beaucoup reste à faire », a reconnu le ministre qui souligne que « comme dans beaucoup de pays, la crise covid 19 et la hausse des prix ont obligé le gouvernement à faire des choix souvent impopulaires. » Selon lui, « le résultat des élections ne traduit en rien un changement idéologique des polynésiens. Il s’agissait d’un vote sanction. » Pour lui, les membres du tavini viennent « chercher avec opportunisme un soutien politique extérieur. (…) Seul le Polynésien décidera de son avenir. Nous respecterons son choix le moment venu (…) Le peuple se prononcera chez lui. Pas à paris, pas à new York. »
C’est depuis la présidence, ici en Polynésie, que le président du Pays Edouard Fritch s’est quant à lui exprimé. Une absence de l’ONU qui s’explique « par sa défaite » aux législatives selon le Tavini.
« Je me suis rendu à l’ONU à 4 reprises ces dernières années pour plaider le fait que la Polynésie n’est pas sous le joug de la colonisation« , a déclaré Edouard Fritch. Il en veut pour preuve le fait que la Polynésie soit désormais membre à part entière du Forum des îles du Pacifique. Le Forum « n’aurait pas accepté de nous accueillir si nous étions colonisés », argue-t-il.
Devant l’ONU, Hinamoeura Cross a de nouveau parlé de son combat contre la leucémie. Pour elle, la France a abandonné la Polynésie et a laissé des terres « polluées » et la « maladie ». Dans ces conditions « tourner la page » comme le souhaiterait l’Etat, semble impossible.
De son côté, Edouard Fritch estime que des efforts de « réparation » sont entamés avec l’Etat concernant les essais nucléaires.
Pour le président du Pays la Polynésie est libre de prendre des décisions. « Je reviens de Washington (…) J’y étais au même rang qu’un chef d’Etat de pays indépendant. Heremoana Maamaatuaiahutapu est allé à New York représenter la Polynésie (…). Le vice-président s’est rendu à Brisbane (…) La Polynésie est clairement dans le concert des nations reconnues dans le monde(…) Le combat du Tavini à New York est dépassé, d’arrière garde, et la Polynésie n’en tire aucun bénéfice » a-t-il estimé.
Tematai Le Gayic, député indépendantiste, interrogé par TNTV
« On a été reçus Moetai, Steve et moi par l’ambassadeur de France aux Nations Unies pendant une heure. Donc c’est la première fois que l’ambassadeur de France à l’ONU accepte de rencontrer les indépendantistes dans le cadre de la 4e commission des Nations unies. Ce n’est pas anodin. C’est parce qu’il rencontre avant tout des députés, des parlementaires nationaux. Et donc il nous a rappelé que la mission parlementaire était à disposition des parlementaires nationaux et qu’il fallait de toute façon les contacter s’il y a quoi que ce soit. Nous on a rappelé les raisons pour lesquels nous sommes présents dans le cadre du processus de décolonisation. On aimerait au moins que la France accepte de rester durant l’item de la Polynésie pour que symboliquement la France accepte de discuter du processus. Ce qui n’a pas été le cas. Il nous a dit qu’il recevait des ordres de Paris et que pour Paris le processus de réinscription de la Polynésie n’était pas très démocratique.
Comme lorsqu’on a rencontré le ministre des Outre-mer, l’Etat français se positionne sur les échéances électorales de l’année prochaine. Ce qui est sûr c’est que les échéances électorales de 2023 définiront le cadre de discussion qu’il y aura avec la France. C’est ce qu’on nous a dit. (…)
Que ce soit avec le ministre des Outre-mer ou avec l’ambassadeur de France aux Etats-Unis, ils sont tous les deux d’accord pour dire que ce statut est limité. Que la France a évidemment des compétences parce que nous sommes français. Et d’ailleurs ils ont certaines craintes par exemple sur une potentielle extension de la Chine dans le Pacifique, qui pourrait nous nuire à nous et c’est la raison pour laquelle la France continue de nous expliquer qu’il est bon de rester français. C’est venir faire peur aux indépendantistes. (…) Nous ne voulons pas une rupture. Nous voulons être traités d’égal à égal. »
René Temeharo, ministre des Grands travaux et des Transports terrestres, interrogé par TNTV
« Etant donné qu’on n’avait 10 minutes de discours en live et que sur place je découvrais avant même que j’intervienne qu’on avait réduit à 8 minutes. (…) Il a fallu reprendre le discours et mettre de côté pas mal de passages importants. (…) Je n’étais pas dans une bataille électorale contrairement à nos amis indépendantistes présents. (…) Je trouve dommage qu’on se retrouve dans cette situation où on se permet d’être à l’étranger, à New York, à l’ONU, et déballer ce que nous pouvons déballer au sein même de notre institution, comme la santé. Nous avons une assemblée en Polynésie (…) Je n’ai pas retrouvé l’âme polynésienne, maohi, entre ses pairs (…)
Ce qui est nécessaire, c’est de dire devant l’ONU que nous ne sommes pas colonisés. Nous sommes un peuple libre de nous exprimer, libre de faire un choix de nos représentants. On l’a vu dernièrement au niveau des législatives. C’est un droit que d’autres pays nous envieraient à ce niveau là.
(…) L’événement d’aujourd’hui, je n’ai même pas envie de l’aborder avec l’ambassadeur de France parce que dès le départ déjà on les a mis de côté. Pourquoi aujourd’hui lui demander des comptes ? De facto il a été écarté par les indépendantistes (…) Je comprends la position de la France concernant les assises au niveau de l’ONU.
(…) Tant mieux s’ils ont pu le rencontrer pour discuter mais je tiens quand même à leur rappeler que « dès le départ ils l’ont mis de côté. Donc aujourd’hui demander des comptes à ceux qui ont été mis de côté par les indépendantistes, je pense que ce n’était pas la bonne méthode d’un maohi. »