Steve Chailloux : « Le Tavini n’est pas comme d’autres partis politiques où il y a des tentations dictatoriales »

Publié le

Candidat aux élections législatives dans la deuxième circonscription pour le Tavini Huiraatira, Steve Chailloux était l’invité du journal de TNTV, ce mercredi. Le député sortant ne croit pas en la convergence des votes autonomistes vers l'alliance Amui Tatou. "Je ne crains pas le vote de nos compatriotes" , assure-t-il.

Publié le 27/06/2024 à 10:45 - Mise à jour le 27/06/2024 à 15:45

Candidat aux élections législatives dans la deuxième circonscription pour le Tavini Huiraatira, Steve Chailloux était l’invité du journal de TNTV, ce mercredi. Le député sortant ne croit pas en la convergence des votes autonomistes vers l'alliance Amui Tatou. "Je ne crains pas le vote de nos compatriotes" , assure-t-il.

TNTV : Contrairement aux élections de 2022, vous vous retrouvez face à une alliance des autonomistes, qui étaient divisés lors du dernier scrutin. Craignez-vous que leurs voix s’additionnent ?
Steve Chailloux, candidat Tavini Huiraatira aux élections législatives dans la deuxième circonscription :
« Je ne crains pas le vote de nos compatriotes. Je crains la non-cohésion de cette plateforme autonomiste d’opportunisme, puisque nous le savons, il y a à peine quelques mois, il y a eu déjà cette tentative de mettre en place une plateforme qui n’a pas abouti parce que le principal point d’achoppement était le statut proposé par Gaston Flosse, l’alliance d’État souverain associé à la France, mais Mme Nicole Sanquer était contre. Et nous voyons aujourd’hui qu’au lendemain de la dissolution, de manière opportuniste, les uns et les autres qui s’insultaient mutuellement et généreusement, ont réussi à se marier de nouveau. Nous savons très bien que le lendemain des élections législatives, chacun repartira et qu’il n’y aura plus aucune plateforme autonomiste (…) Le thème de campagne de nos amis, c’est « vive l’autonomie ». Mais de quelle autonomie parle-t-on ? Il y a différentes visions de l’autonomie et ils ne s’accordent pas (…) Mme Nicole Sanquer a combattu vent debout contre le Tapura Huiraatira, contre le Amuitahiraa, il y a à peine quelques mois, voire une année » .

TNTV : Celle-ci déclarait sur notre plateau hier soir que le Tavini s’est engagé à parler « au nom de tous les Polynésiens et à travailler pour améliorer leur quotidien. Malheureusement, deux ans après, nous nous rendons compte que ce n’était qu’un programme écrit, que les actions ne sont pas là » . Que lui répondez-vous ?
S.C : « Oh, que les actions ne sont pas là, vous savez, les commentaires des uns et des autres… C’est comme quand on dit, par exemple, que nous n’avons fait que parler d’indépendance. Moi, je pense que les autonomistes nous ont habitués au mensonge, tout simplement. Concrètement, lorsque nous nous sommes levés pour défendre les militaires polynésiens face à la guerre qui allait se produire en Ukraine, c’est nous, le Tavini Huiraatira, nous n’avons pas fait d’idéologie. Lorsque nous nous sommes levés pour contrer la loi sur dégel du corps électoral en Kanaky, nous ne l’avons pas fait parce que nous étions des indépendantistes, puisqu’il y a une partie des députés qui étaient également contre. Lorsque j’ai réussi à faire voter la loi sur la reconnaissance des langues et civilisations et cultures régionales, je ne l’ai pas fait parce que j’étais indépendantiste. Il faut être pondéré, même quand on est en campagne électorale, regardant ce qui a été dit et prononcé dans l’enceinte de l’hémicycle de l’Assemblée nationale, parce que c’est ce qui compte lorsque nous sommes députés, lorsque nous siégeons dans ce bel hémicycle » .

TNTV : Justement, en parlant de cette loi sur la langue, quel a été l’impact en Polynésie, où la politique linguistique relève d’une compétence du pays ?
S.C :
« Le combat que je mène avec le Tavini Huiraatira est bien évidemment celui des langues régionales et langues autochtones, la nôtre en l’occurrence. Nous avons un statut qui nous permet d’avoir cette compétence, mais ce n’est pas parce que nous avons la compétence que le combat pour la reconnaissance des autres langues régionales, et notamment en Outre-mer, est obsolète. C’est un combat commun parce que lorsque nous voulons que notre langue, par exemple le tahitien ou les langues polynésiennes, soient un jour reconnues comme langue officielle, il nous faut absolument rentrer dans un processus où toutes les autres langues s’unissent (…) pour porter la même voix au sein du Parlement, pour essayer en tout cas d’infléchir l’article 2 de la Constitution française qui déclare que seule la langue française est la langue officielle sur le territoire de la République. Un combat tout seul dans son coin pour le tahitien est inutile. Il nous faut nous allier avec les Bretons, avec le Pays basque, avec toutes les autres langues régionales d’Outre-mer pour faire avancer ce combat » .

– PUBLICITE –

TNTV : À l’échelle locale, croyez-vous que les actions de votre parti, mais aussi les propos tenus par certaines figures vous portent préjudice pour cette campagne ?
S.C : « Au Tavini Huiraatira, nous avons toujours prôné la liberté. Le Tavini n’est pas à l’instar d’autres partis politiques où il y a des tentations dictatoriales, où dès qu’il y a un mauvais pas, ou lorsqu’il y a un crime de lèse-majesté, on avait la tête coupée (…) Les électeurs ne sont peut-être pas coutumiers, mais il y a une liberté de parole entre nous. Ce que je retiens, par contre, c’est qu’à partir du moment où la décision est prise, nous sommes en ordre de bataille et le message est clair. Concernant la question de l’indépendance, nous n’avons pas changé de posture. Nous sommes réinscrits depuis 2013 parce que nous voulons mettre en place, sous l’égide des Nations Unies, un processus de décolonisation qui nous mènera, le moment venu, vers un référendum où ce sont les Polynésiennes et les Polynésiens qui pourront voter en leur âme et conscience par rapport à ce projet. L’indépendance ne se décrète pas, ni par un parti politique, et certainement pas par un député » .

TNTV : Vous parlez du fonctionnement en interne du Tavini Huiraatira. On rappelle quand même que Hinamoeura Morgant-Cross a été un peu mise de côté pour ses propos tenus.
S.C :
« Je dirais plutôt que c’est Mme Hinamoeura qui s’est mise de côté de la majorité. Vous savez, dans une majorité, il faut discuter avec ses collègues. Il n’y a aucun sujet tabou, mais il faut parler avec ses collègues de la majorité. Il y a forcément, dans toutes les majorités que nous avons pu avoir, autonomistes ou indépendantistes, de la discipline (…) À partir du moment où ces sujets-là n’ont pas été discutés de manière respectueuse avec les collègues de la majorité et avec les instances du parti, forcément, il y a des conséquences. Et non, ce n’est pas nous qui l’avons mise de côté » .

TNTV : On fait le lien avec le cumul des mandats, sujet qui a souvent été abordé lors de cette campagne. Quel est votre avis à ce propos ?
S.C :
« La loi, elle est la loi. La loi permet le cumul de deux mandats législatifs (…) À mon avis, ce qui perturbe beaucoup notre population, c’est surtout la question des indemnités, soyons francs. La plupart des gens pensent que lorsqu’on cumule deux mandats, ça veut dire que nous cumulons deux indemnités fortes. Ce n’est pas le cas. Il y a un plafond et la moyenne de ce que touche un député représentant est en deçà de ce que certains chefs de services de l’administration touchent. Donc, la question du cumul des mandats et notamment des indemnités, les élus ne touchent pas deux indemnités. Il y a ce qu’on appelle l’écrêtement avec un plafond, il n’y a pas deux indemnités à 100 %. Il y a une indemnité, et une autre écrêtée » .

TNTV : Sans parler des indemnités, pensez-vous que, pour vous, le cumul de vos deux mandats vous est handicapé dans votre travail de parlementaire ?
S.C :
« Le cumul de ces deux mandats législatifs entre députés et représentants à l’Assemblée de la Polynésie est un cumul qui fait sens. Là où nous ne sommes pas d’accord, c’est quand le cumul ne fait pas sens. Il fait sens dans le sens où, par exemple, lorsque nous avons été élus en 2022, les huissiers de l’Assemblée nous disaient que la plupart des députés étaient des députés hors sol. Les députés de la Polynésie ne sont pas des députés hors sol. Ce sont des députés ancrés dans nos institutions polynésiennes pour porter la voix de nos institutions au Parlement français » .

Dernières news