Tematai Le Gayic : « nous souhaitons faire reconnaitre l’existence du peuple maohi »

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Tematai Le Gayic était l'invité de nos journaux lundi. Le député est revenu sur son actualité. Il a notamment déposé une résolution à l'Assemblée nationale qui vise à faire reconnaitre la particularité du peuple polynésien. Son interview complète :

Publié le 30/01/2024 à 17:37 - Mise à jour le 31/01/2024 à 9:19

Tematai Le Gayic était l'invité de nos journaux lundi. Le député est revenu sur son actualité. Il a notamment déposé une résolution à l'Assemblée nationale qui vise à faire reconnaitre la particularité du peuple polynésien. Son interview complète :

Tahiti Nui Télévision : Vous allez déposer une proposition de résolution qui vise à supprimer l’indemnité d’éloignement des fonctionnaires qui sont mutés ici en Polynésie. L’idée n’est pas nouvelle : elle a déjà été développée par Lana Tetuanui en 2022. Qu’est-ce qui va changer concrètement aujourd’hui avec votre proposition.
Tematai Le Gayic, député :
« (…) Cette proposition de loi qui vise à supprimer l’indemnité, il faut d’abord rappeler son contexte. Elle a été créée par l’État français en 1950 quand la Polynésie n’était accessible que par bateau. Quand on commençait à mettre en place l’administration d’État. Et donc il fallait une attractivité pour que ces fonctionnaires, considérés comme expatriés, puissent venir dans notre pays. En 2024, et comme l’a bien défendu la sénatrice en 2022, il n’y a plus de raison pour que cette prime d’éloignement, cette indemnité supplémentaire soit versée à ces fonctionnaires. Je le rappelle, ce sont uniquement les fonctionnaires considérés comme expatriés qui bénéficient de cette prime d’éloignement, et il n’y a pas de principe de réciprocité pour nos fonctionnaires polynésiens qui doivent être mutés en France. L’État français ne souhaite pas qu’il y ait une prime spécifique pour les Polynésiens lorsqu’ils sont mutés en France, et donc par principe de non-réciprocité, par principe où il y a une création d’effet d’aubaine, parce que nous voulons faire revenir nos Polynésiens, nous souhaitons cette suppression. »

TNTV : Qu’est-ce qui va changer concrètement par rapport à la proposition qui avait été déposée par Lana Tetuanui ? Est-ce qu’il y a des nouveautés ?
Tematai Le Gayic : « C’est le même fondement. La seule différence, c’est qu’aujourd’hui, il y a un argument supplémentaire qui est la modification de l’ITR (indemnité temporaire de retraite, NDLR). Parce qu’aujourd’hui on nous explique qu’on souhaite supprimer l’ITR et proposer un outil compensatoire qui a déjà été déposé dans le PLF (Projet de loi de finance, NDLR) 2024, mais qui ne compense pas du tout la suppression de l’ITR, pour des raisons budgétaires. Et finalement, on vient proposer au gouvernement cette suppression de cette niche par le biais de cette prime d’éloignement. On la supprime, parce qu’elle n’est pas octroyée aux Polynésiens qui vivent sur le territoire. On préfère que vous transfériez cet argent pour l’ITR, pour que les Polynésiens retraités pour lesquels on veut lutter contre la précarité, puissent bénéficier d’une retraite digne. »

TNTV : Il y a également une résolution que vous allez déposer à l’Assemblée nationale. Elle vise à faire reconnaitre la particularité du peuple polynésien. Votre objectif derrière ce dépôt, c’est de continuer à alimenter le débat autour de ce sujet, c’est bien ça ?
Tematai Le Gayic :
« Aujourd’hui, depuis 2022 et jusqu’à ce jour, nous avons été élus en plus de combattre le coût de la vie, en plus de combattre les difficultés du quotidien, de pouvoir avoir un bras sur la mise en place de ce processus de décolonisation et d’accession à l’indépendance, et d’un autre côté de trouver des moyens légistiques rapides pour protéger l’emploi et le foncier. Aujourd’hui, nous ne pouvons pas voter de textes pour protéger l’emploi, que ce soit dans le privé comme dans le public. Ce n’est pas dans le public aujourd’hui cette loi sur l’emploi local. Et on ne peut pas protéger le foncier parce qu’il n’y a pas aujourd’hui de possibilité de définir sur quel type de population, nous allons faire bénéficier ces dispositifs. Donc, nous souhaitons faire reconnaitre l’existence du peuple maohi afin de pouvoir cibler ce type de population dans notre pays. Ça permet de protéger l’emploi, le foncier, et surtout ça permet, c’est ce que j’espère, de geler le corps électoral pour, dans le cas où c’est un referendum qui est choisi pour l’indépendance, que ce soit le peuple maohi seul qui décide de son avenir institutionnel. »

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TNTV : Autre actualité toujours à l’Assemblée nationale, une mission d’information sur l’évolution du statut des outre-mer a été lancée. Une mission à laquelle vous participez. Quel est votre rôle et comptez-vous porter le message des indépendantistes durant cette mission ?
Tematai Le Gayic : « Nous sommes quatre députés dans cette mission. Il y en a deux d’outremer, le président de la délégation qui est de Guyane, moi-même, et deux de l’hexagone. Nous allons pendant six mois parcourir l’ensemble des territoires d’outremer. Et l’objectif, à l’issue de cette mission, c’est de proposer un rapport à l’Assemblée nationale sur les réalités que souhaite chaque territoire. Il n’y a pas de parti pris. Je pense que c’est une bonne chose qu’il y ait un député de Guyane qui est autonomiste et moi-même qui suis indépendantiste au sein de cette mission d’information et deux députés français qui n’ont pas d’avis particulier sur le développement institutionnel de chaque territoire. Et qu’on puisse, en fonction de nos avis évidemment, et en fonction des retours qu’on a sur le terrain, proposer la formule la plus proche de la réalité de ces territoires. En ce qui nous concerne, cette mission va venir en mars dans notre pays, vers la troisième semaine de mars (du 16 au 20 mars, NDLR). »

TNTV : Quel est le programme ? Vous allez rencontrer les acteurs du terrain, c’est bien ça ?
Tematai Le Gayic : « On n’a pas encore défini précisément, on n’a pas encore contacté officiellement les différents acteurs qui vont être auditionnés. Mais évidemment qu’il va y avoir les acteurs politiques, les institutions. Il va y avoir les présidents de groupe, que ce soit les partis autonomistes comme indépendantistes. Il faut que tout le monde puisse avoir la parole : les instances religieuses, les communes, la Codim, le SPCPF, la communauté de communes des Tuamotu et des Australes vont pouvoir participer à ces auditions. L’objectif, c’est que tout le monde puisse avoir la parole. »

TNTV : La semaine dernière, une loi a été votée à l’Assemblée nationale sur un sujet qui nous concerne particulièrement au fenua : il s’agit des violences conjugales, plus précisément sur l’héritage des biens et le remboursement des dettes. Qu’est-ce qui va changer avec cette loi et va-t-elle être appliquée ici en Polynésie rapidement ?
Tematai Le Gayic : « Les violences conjugales et intrafamiliales sont excessivement importantes dans notre pays. C’est un sujet sur lequel nous devons tous combattre quelles que soient nos idéologies et nos couleurs politiques. Concrètement, cette loi vise à modifier une horreur, c’est-à-dire qu’un homme qui frappe jusqu’à tuer sa femme, condamné, il fait ses années de prison, peut bénéficier, dans le cadre d’un Pacse ou d’un mariage, peut bénéficier de l’héritage de sa femme qu’il a lui-même tuée. Avec cette loi, cet homme, dès lors qu’il est condamné, ne peut plus en bénéficier. Et c’est une justice pour toutes les femmes qui ont été tuées et dont ces hommes ont bénéficié de cet héritage. Ça va être appliqué dans notre pays parce que la justice est de compétence de l’État. C’est une bonne chose et il faut continuer de lutter contre les violences conjugales et intrafamiliales. »

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