Lorsqu’on évoque le Matavaa avec Georges, il nous parle tout de suite du rôle qu’il a joué en tant que représentant de sa vallée de Hohoi : « J’étais en charge de tout ce qui se passait à Mauia ». Et il revient sur les dernières années de travaux qui ont permis de rendre de sa superbe au site archéologique. Georges nous précise qu’il aura fallu 3 ans pour remettre sur pied les structures de pierre du tohua et accueillir le Matavaa de 2007. La deuxième étape de restauration des cases, ou haè, s’est achevée fin 2019, juste à temps pour la 12e édition du festival.
« Ce qui fait que quand toutes les délégations ont été réunies à Mauia, on pouvait sentir le mana sur le site. Le tohua passait le message suivant aux groupes : Bienvenue, vous êtes chez vous. »
Le conseiller municipal nous précise d’emblée que les cases ont été construites à partir de bois locaux, mais que les toits sont en palmex (feuilles de palmier synthétiques en polyéthylène). « Cela résiste 30 ans, contre trois ans pour le pandanus, et le rendu visuel est très similaire au végétal. » Georges connaît parfaitement le site et nous explique que les cases représentent la légende de Oatea et Atanua, la fameuse légende de la création des îles Marquises. « On ne sait pas expliquer avec certitude la forme angulaire tout à fait particulière du site, même si on pense que la présence d’une rivière sur les lieux a certainement causé l’agrandissement du site originel, qui aurait subi des crues fréquentes. »
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Pour Georges, maintenant que le site est totalement réhabilité, l’objectif est bien de le valoriser selon une perspective de développement durable. Le tohua Mauia peut accueillir des manifestations touristiques, sportives et paroissiales pour en faire un véritable lieu de vie, sans attendre pour autant le prochain Matavaa. Aujourd’hui, le site historique est d’ailleurs déjà un lieu de syncrétisme où des messes sont célébrées.
Comme beaucoup d’ènana de la Terre des Hommes, Georges mène plusieurs activités de front : il est également agriculteur, tailleur de pierres, et cultive de la vanille sur sa terre Ataua. Au sein de la délégation de Ua Pou, Georges présentait ses créations au village pendant les 4 jours de festival. Le reste du temps, il fait partie de la fédération des artisans de Ua Pou et participe régulièrement au Salon des Marquises de Tahiti. Sauf bien sûr ce mois de décembre, car « on ne peut pas être partout ».
Lorsqu’on demande à Georges quelles peuvent être les difficultés de son village de 92 habitants et 75 votants, il répond sans hésiter : « Le manque d’eau, la gestion de l’eau, et la poussière, notamment pendant les périodes de grande sécheresse comme en ce moment, ainsi que les animaux en divagation. Un autre enjeu important reste quand même l’école : 4 niveaux pour 7 élèves. »
Un message aux jeunes de sa vallée ? « Ne restez pas bloqués sur vous-mêmes, il faut s’ouvrir, nous, les anciens, nous vous encourageons à porter ce flambeau de la culture marquisienne. » L’enjeu de la transmission lui paraît essentiel : sa fille de 24 ans participait cette année à son premier Matavaa. « C’est celle qui portait une plume noire le jour des koika à Hohoi », dit-il fièrement.
Et s’il fallait s’adresser à son successeur ? « A oho te ìi, bon courage pour l’intérêt général, il faut préserver ce flambeau. » On sait que Georges conserve précieusement bon nombre de savoirs et de légendes à propos de sa vallée et des sites archéologiques qui s’y trouvent, mais cela ne se partage pas n’importe comment et avec n’importe qui.