Comme chaque année, l’Observatoire polynésien de l’énergie fait le bilan. Fin 2023, il a dévoilé le bilan énergétique 2022 de la Polynésie. Celui de 2023 sortira fin 2024, un décalage lié au temps de recueillement de toutes les données, que l’on doit à Mercedes Garcia Martearena, la responsable de l’observatoire. « L’énergie, ce n’est pas que la production d’électricité, c’est toute l’énergie nécessaire dont on a besoin pour prendre la voiture, le bateau, pour cuisiner… » précise-t-elle.
L’année 2022 a surtout été marquée par la hausse du prix de l’énergie, et donc du cours du pétrole sur le marché mondial (+57%). « Suite à la crise sanitaire en 2020, la consommation de carburant a augmenté pour les transports routiers, aériens et maritimes » indique Mercedes Garcia Martearena.
Le transport, secteur le plus énergivore
La Polynésie étant isolée géographiquement, elle dépend à 92,5% de l’extérieur pour ses besoins énergétiques : « Notre taux de dépendance énergétique est très élevé encore. On importe l’énergie primaire nécessaire pour nos besoins énergétiques ». Mais ce taux de dépendance énergétique réduit d’année en année. En 2012, il était de 94,4%. La valeur des importations des produits énergétiques a atteint 37,1 milliards de Fcfp en 2022, soit 15% de l’ensemble des valeurs importées. En 2022, 377 millions de litres d’hydrocarbures ont été importés en Polynésie. Toutefois, il est à noter que notre consommation d’énergie finale reste plus faible que dans les autres Outre-mer.
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Le plus gros pôle de consommation d’énergie en Polynésie reste le transport à 68,2% (50,5% pour les transports routiers, 11,6% pour l’aérien et 6,1% pour le maritime). Par ailleurs, le secteur des transports est le principal contributeur d’émissions de gaz à effet de serre territoriales en Polynésie. Il est donc un enjeu politique majeur et une priorité du plan climat 2022-2030. La consommation d’électricité constitue quant à elle le second secteur de consommation.
Les énergies renouvelables pour réduire la dépendance et la facture énergétiques du fenua
La dépendance énergétique de la Polynésie est en fait une dépendance électrique qui peut se réduire grâce aux énergies renouvelables. Toujours, dans le cadre du plan climat 2022-2030, le Pays met en place une politique de transition énergétique afin de valoriser nos ressources locales, limiter notre dépendance aux énergies fossiles et réduire ainsi les coûts énergétiques.
En 2022, la production d’électricité réalisée à partir d’énergies renouvelables (EnR) représente 36% de la production totale permettant ainsi un taux de pénétration (7,3%) d’EnR le plus élevé de la décennie (grâce, entre autres, à l’hydroélectricité et aux SWAC du CHPF, de Bora Bora et Tetiaroa), et à Tahiti, il a atteint 45,4% soit le taux le plus élevé jamais enregistré. La part d’EnR en 2022 dans la consommation d’énergie finale a atteint son maximum, représentant 9% de la consommation totale, surtout grâce à l’hydroélectricité, un taux que l’on explique en partie par des conditions météorologiques très favorables. Pour précision, la production éolienne en Polynésie n’est pas comptabilisée car trop faible, elle est issue de petites éoliennes de faible puissance installée chez quelques particuliers.
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Les infrastructures hydroélectriques représentent la deuxième source de production d’électricité du pays, notamment grâce à Marama Nui : « Nous avons des projets d’augmentation de la capacité actuelle. Il n’est pas question de faire des nouvelles unités. Malheureusement, cela serait compliqué de le faire, par contre, d’augmenter la capacité de production de chaque barrage, de chaque centrale, c’est faisable. Nous avons d’ailleurs un grand projet que nous avons présenté au fonds de transition énergétique, Code 95, sur la vallée de la Papenoo, de monter le barrage de moyenne vallée de 10 mètres en altitude, ce qui permettra d’obtenir une production de 5 Gigawatt-heures de plus par an, soit 700 000 litres de gazole pas brulés par an » explique Didier Pouzou, président directeur général d’EDT.
Le parc de production photovoltaïque constitue la troisième source de production d’électricité, et la majeure partie des installations se trouve à Tahiti. « Nous allons mettre en service à l’horizon 2024 deux fermes solaires pour environ 10 mégawatts au total (…) soit 2 millions de litres de gazole qui ne seront pas brulés, c’est donc bon pour la nature, pour l’économie de la concession et la maitrise des couts de l’énergie sur le territoire. Sachant que nos deux confrères qui vont aussi démarrer dans l’année apportent à peu près la même chose » poursuit le P-DG.
2023 a également été une bonne année pour le développement des énergies renouvelables avec la mise en service du SWAC en CHPF, les lauréats de l’appel à projets pour la construction de fermes solaires, la réussite du test du générateur virtuel Putu Uira au cours duquel Tahiti a été alimentée à 100% par des sources d’énergie renouvelables, ou encore la nouvelle réglementation énergétique des bâtiments en Polynésie française. Et si 2022 avait été marquée par l’entrée en vigueur du dispositif de solidarité sur l’électricité (péréquation tarifaire, contribution Sociale sur l’Electricité CSE) afin de rétablir une égalité d’accès au service public de l’électricité sur l’ensemble de la Polynésie, la facture d’électricité pourrait être réduite en 2024 pour les foyers les plus modestes : « Aujourd’hui, la tarification en place avec les volumes consommés ne permet pas de couvrir les charges de production et de distribution d’électricité. Si le pays n’apportait pas son aide à travers le FRPH, on n’y arriverait pas. Il y a donc deux solutions pour réduire la facture, soit on fait en sorte de réduire notre consommation pour réduire notre facture, soit on réfléchit à la mise en place comme en métropole de chèque énergie pour les familles les plus modestes » a déclaré Didier Pouzou, sur le plateau de TNTV. Une piste de chèque énergie actuellement en réflexion.