Née à Toulouse d’une maman polynésienne et d’un papa français, Anaïs Koska revient vivre au fenua à ses 5 ans où elle effectue une bonne partie de sa scolarité. C’est au collège de Paea qu’elle rencontre Tetau Tetuamanuhiri. Si le jeune homme est né aux États-Unis, il a toujours grandi et vécu à Tahiti : « Ma maman est juste partie accoucher là-bas parce qu’elle voulait que j’ai la double nationalité » précise-t-il. Anaïs et Tetau se connaissent de vue, mais ne sont pas plus proches que ça. À ses 15 ans, Anaïs retourne vivre en France et perd totalement le contact avec Tetau. Ils se retrouveront plus tard, lors de leurs études supérieures, à Montpellier : « On s’est retrouvé dans un bar, l’Australian Café. À l’époque du collège, il me trouvait un peu snob. Du coup, il ne m’appréciait pas trop. Jusqu’à ce qu’il me découvre et voit que je ne suis pas du tout comme ça. Et à l’époque, Tetau, ce n’était pas du tout mon genre… À aucun moment, je me suis dit qu’il deviendrait mon mari ».
Côté études, Anaïs se cherche encore. D’abord, elle projette d’être dentiste, mais après avoir raté sa première année de médecine, passionnée de parfumerie, elle se tourne vers une licence de chimie : « Il y avait deux grands domaines de chimie dans le cadre de ma licence. La chimie organique, pour justement partir en parfumerie et cosmétique, et la chimie des matériaux. Finalement, j’étais plus passionnée par la chimie des matériaux ». Elle effectue ensuite un master en matériaux spécialisés aéronautiques : « J’étais plus douée en chimie des matériaux qu’en chimie organique. Et l’aéronautique, ça m’a toujours passionnée ». Un milieu qui lui était quelque peu familier : son père avait eu dans le passé une société d’hélicoptères en Polynésie française. Elle ambitionne alors de devenir ingénieure en matériaux dans le domaine de l’aéronautique.
Après deux ans en classe prépa scientifique à Marseille avec pour objectif d’être ingénieur dans l’aéronautique, Tetau intègre quant à lui une licence EEA (électronique, énergie électrique, automatique) à Montpellier. Déçu de ne pas avoir été par la suite accepté à l’École nationale supérieure d’arts et métiers 2016, il rejoint l’armée de l’Air en tant que sous-officier : « Mes études ne me plaisaient plus trop et je voulais ne plus être dépendant de ma mère financièrement ».
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« L’armée de l’Air est l’armée la plus féminisée »
Anaïs Koska
Son diplôme en poche, Anaïs travaille en tant qu’ingénieure-consultante pendant un an avant de finir par s’engager dans l’armée comme son compagnon : « Le milieu militaire m’avait toujours attirée. D’ailleurs, mon père a été pilote d’hélicoptère dans l’armée de Terre. (…) Mais je ne me sentais pas spécialement capable, notamment pour le côté purement militaire. J’avais la vision des gens qui allaient sur le terrain etc. J’avais moins la vision technique qu’on a au sein de l’armée de l’Air. Et puis j’ai rencontré pas mal de femmes militaires. Il faut savoir que l’armée de l’Air est l’armée la plus féminisée ».
En 2020, elle rejoint l’armée de l’Air en tant qu’officier mécanicien : « Ce que j’aime bien dans l’armée, c’est la possibilité de changer facilement de poste. Le statut de mécanicien est très large. J’ai passé 4 ans à l’escadron de soutien technique aéronautique à Nancy. Je travaillais dans la maintenance des avions de chasse. Et il y avait le côté gestion du personnel. Le rôle de l’officier, c’est un peu comme celui d’un manager. Il y a également la gestion de l’activité aérienne ».
10 ans de relation dont 8 à distance
Nancy, Mont-de-Marson, Toulouse, Rochefort, Salon-de-Provence… De par leurs métiers, le couple ne se retrouve jamais dans la même ville. Malgré des longues heures de train, ils se voient tous les week-ends : « Tous les dimanches, je finissais en pleurs, confie Anaïs. Mais on prend sur soi, et on avance. Parce que l’amour, c’est très bien, mais la carrière aussi. Il faut un équilibre entre les deux ». Sans compter les fois où ils partent en mission pendant plusieurs mois. Tetau est ainsi déjà parti en Lituanie, en Lettonie et à Djibouti. Anaïs est, elle, déjà partie deux mois au Tchad.
De temps en temps, ils rentrent même au fenua. « Le ma’a le soleil, la mer… c’est ça qui nous manque le plus » admet Tetau. « Après, en France, il y a quand même une très grosse communauté tahitienne. Que ce soit avec les associations des étudiants polynésiens, les AEPF. À l’armée, il y a aussi une très grosse communauté tahitienne. Donc en fait, on n’est jamais réellement dépaysés » renchérit Anaïs.
En 2023, Tetau est devenu à son tour officier. Il est contrôleur des opérations aériennes : « Je contrôle des avions, la plupart du temps, des avions de chasse, dans une zone au-dessus de la métropole, une zone réservée pour le combat aérien, des zones militaires. (…) Et j’assure la posture de permanence de sûreté aérienne. Ça inclut le contrôle de la police du ciel ». Un travail qui lui plait beaucoup, aux horaires fixes : « Je travaille de 8 à 17 heures. Après, parfois, il y a des vols de nuit ». « Dans l’armée, sur toutes les bases aériennes, tous les mardis et jeudis soirs, il y a des vols de nuit pour que les pilotes puissent s’entraîner en condition nocturne » précise Anaïs.
À 31 ans aujourd’hui, le couple se retrouve enfin dans la même ville, depuis quelques mois seulement : « Toulouse est la seule base en France où nos deux spécialités sont représentées. Il y a du contrôle des opérations aériennes et de la mécanique pour moi. On aime beaucoup le sud-ouest, on y a de la famille, des amis… » nous dit Anaïs. Ils ont même acheté une maison : « Maintenant qu’on vit enfin ensemble, on va profiter un peu, voyager… On aimerait partir en vacances au Japon ».
Tous les deux regardent avec fierté leurs parcours professionnels respectifs. « J’ai choisi cette spécialité parce qu’à la base, je savais que tous les jours n’allaient pas se ressembler. Je savais que mon travail allait être très diversifié, que je n’allais pas faire tout dans la même chose. Et il y a cette excitation. C’est un métier assez stressant, sous tension, mais très satisfaisant en soi » admet Tetau. « Je suis très fière de ce que je fais. Dans l’armée de l’Air, en tant qu’officier, on peut changer plus facilement de poste. Là, typiquement, où je suis maintenant en tant que chef de production, je suis dans une unité qui fait du travail d’ingénierie. On est là pour designer, concevoir, puis produire des pièces qui peuvent aller sur l’avion » ajoute Anaïs.
Anaïs et Tetau se sont mariés civilement en août 2023 à Toulouse, puis quelques semaines plus tard, religieusement à Tahiti.
Prochain grand projet : partir en Outre-mer pour des missions longue durée d’ici 2025. « Ça peut être Djibouti, tout comme Tahiti. On a mis Tahiti en premier, forcément. Quand on fait une demande outre-mer, on est obligé de classer tous les pays d’outre-mer. Mais on a envie d’être dépaysés, de voir autre chose que la France ». Et de rentrer au Pays, surtout.