Tout le monde a déjà entendu parler du fameux bitcoin, la première monnaie virtuelle, lancée en 2009. Depuis, des dizaines de milliers d’autres cryptomonnaies ont été créées.
Elles permettent de proposer un nouveau mode d’échange de valeurs et de simplifier les transactions monétaires.
Comme tout ce qui implique de l’argent, la cryptomonnaie attire bien sûr les investisseurs. Mais comme tout investissement, elle peut aussi représenter un danger. Hellmouth Banner est le rédacteur en chef de la première revue francophone consacrée aux cryptomonnaies, le Journal du Coin : « Le marché crypto-monétaire, et je pense que même ceux qui le connaissent peu en ont parfaitement conscience, il est volatile. Par exemple, le bitcoin en 2021 a atteint un sommet à 67 000 dollars (environ 7 millions de Fcfp, NDLR). Actuellement il se négocie presque 30 000 dollars de moins. Donc clairement, l’argument spontané qu’on peut avoir, c’est de dire ‘c’est bien gentil, mais je touche 1 million de Fcfp en bitcoin le lundi, si la valeur relative de ce versement n’est plus que de 800 000 le vendredi, qu’est-ce que je fais ?’. Ce n’est pas possible de fonctionner comme ça. Tout le monde en a une absolue conscience. Ce phénomène est bien entendu problématique et surtout dû au fait que le marché crypto-monétaire est dans son adolescence encore. C’est un marché qui est spéculatif. C’est un marché qui est soumis à des forces d’investissement et de manipulation de marché.
Mais le marché des cryptomonnaies, c’est en grande partie un marché autour aussi d’un type de cryptomonnaies qu’on appelle les stable coins. Les stable coins ce sont des cryptomonnaies qui ont pour caractéristiques d’être indexées à une autre monnaie fiable. Une monnaie fiable qu’est ce que c’est ? C’est une monnaie nationale : le franc Pacifique, l’euro, le yen, le dollar… »
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Une cryptomonnaie made in fenua…
Il y a ceux qui investissent, et ceux qui décident de créer leur propre cryptomonnaie. Car le processus est assez simple : « il ne faut pas grand-chose en terme de technologie et il ne faut pas beaucoup de temps dès lors que tu sais un peu comment ça fonctionne. Tu peux littéralement créer une cryptomonnaie en une poignée de minutes. Et c’est très bien parce que finalement la proposition de valeur de bitcoin c’est ça : c’est de remettre du pouvoir entre les mains des individus. Chacun peut essayer de créer de la monnaie, de créer un système. Mais c’est aussi comme tu l’imagines, vecteur d’une multiplicité de démarches dans le meilleur des cas extrêmement amatrices, vouées à l’échec, et malheureusement, bien souvent, de pures et simples escroqueries », estime Hellmouth.
Fabriquer sa propre monnaie virtuelle, à condition d’avoir des intentions louables, ok. Mais encore faut-il la faire connaitre et y faire adhérer une communauté. En Polynésie, plusieurs projets se préparent. Des cryptomonnaies locales ont déjà été lancées ou sont en voie de l’être. C’est le cas du projet Dollar Fenua de Jordan Vedel : « J’ai voulu lancer ce projet il y a quelques mois avec pas mal de monde qui me suit derrière pour mettre en avant la Polynésie dans le monde de la cryptomonnaie (…) Aujourd’hui, actuellement, on a déjà notre première cryptomonnaie d’échange, qui est le FPT, French Polynesia token. Et dans pas longtemps, on doit lancer le Dollar Fenua, qui est le centre de notre projet et de notre ecosystème qu’on veut créer. » Un ecosystème qui pourrait notamment servir aux artistes locaux selon Jordan.
Mais une monnaie virtuelle made in fenua est-elle vraiment nécessaire ? Pour le rédacteur en chef du Journal du Coin, « l’offre actuelle de cryptomonnaies anciennes, notamment bitcoin mais tout un panel d’autres, est amplement suffisante pour pouvoir bénéficier à la Polynésie. Parce qu’elle peut s’en servir la Polynésie. On peut tout à fait (…) échanger de la valeur avec des cryptomonnaies déjà existantes. (…) Ça a vraiment des intérêts, pour de vrai, pour la Polynésie. On parle de tissu économique local, de l’intérêt qu’il y aurait pour les commerçants, pour les professionnels, pour les entrepreneurs ici d’utiliser les cryptomonnaies, clairement il y a tout un tas de pertinences.(…) De là à dire qu’il faut utiliser une cryptomonnaie locale… »
S’informer avant tout
Au fenua, si les institutions commencent à s’y intéresser, aucune règlementation n’existe à ce jour concernant la cryptomonnaie. Contactée, une banque locale admet ne pas maîtriser le sujet et donc, ne pas conseiller ses clients dans ce domaine.
Comme partout, les arnaques sont possibles. « De manière extrêmement catastrophique et triste, la naïveté et l’appât du gain, ce sont les deux mécaniques qui font que les gens vont en moyenne surtout tomber sur des escroqueries. Ces escroqueries, pourquoi ils tombent dessus ? Parce qu’elles sont très visibles. Elles font beaucoup de marketing, elles font beaucoup de marketing de réseau (…) Quelqu’un qui n’y connait rien, il a globalement plutôt deux chances sur trois de tomber tout de suite sur un truc d’escrocs ou dans le meilleur des cas un peu bancal, plutôt que de tomber de suite sur les bons projets, sur les bonnes mécaniques qui permettent de se faire un peu plaisir dans la cryptomonnaie », estime Hellmouth.
Pour éviter de tomber sur une arnaque, l’essentiel est de s’informer avant tout : « Quand on a envie de s’intéresser à la crypto, parce que le sujet est passionnant ou parce qu’on a envie de gagner de l’argent, on commence par une période d’acclimatation le temps nécessaire. (…) le temps passé à se former, à lire, à regarder des tutoriels, à apprendre, à monter en compétences, c’est le meilleur investissement qu’on puisse faire dans un premier temps. »
Et pour ceux qui arrivent à faire fructifier leurs investissements, impossible pour l’instant de réinjecter cet argent virtuel directement dans l’économie polynésienne.
En métropole, certains choisissent de partir, vers des pays plus ouverts à ce système, comme le Salvador où le bitcoin est devenu une monnaie officielle…