Il est fabriqué à partir d’un granulat de coquilles d’huîtres du fenua, et vous allez sans doute bientôt commencer à le voir utilisé dans des constructions au sol… Le béton de coquillages a été conçu par David Grégoire, professeur à l’université de Pau. Une initiative née d’un constat : « En France on a beaucoup de coquillages, d’huitres comestibles, qui sont moins nacrées mais il y a une grosse production de déchets avec des réemplois qui sont assez compliqués et donc depuis 2018 on a mené des projets pour valoriser ces déchets dans des matériaux cimentaires et on vient de réaliser un chantier pilote sur la dune du Pilat qui vient d’être inauguré en juin 2023 et qui a permis de démontrer qu’on peut faire déjà des structures de génie civil comme des cheminements piétons avec ce béton ».
Plus de 2 000 000 de visiteurs fouleront, chaque année, cette promenade, et la technique devrait s’exporter ici au fenua. Les nacres des huîtres perlières n’ont pas les mêmes propriétés que les coquilles d’huîtres de métropole, et cela s’avère être un atout. « Les nacres polynésiennes sont les coquilles les plus résistantes qui existent sur la planète. L’intérêt, c’est de transférer la méthodologie et de travailler avec un territoire pour savoir quelles sont les ressources, les déchets qui sont générés sur un territoire et voir quelles sont les réutilisations possibles sur ce même territoire. On travaille dans une économie qui est circulaire et une croissance bleue. »
Le projet, soutenu par le Pays, répond à un besoin de valorisation des coquilles de nacres. En Polynésie, la société Polynacre de Hugues Cochard leur donne déjà une seconde vie en les réduisant en poudre pour une utilisation agricole, et elle souhaite se diversifier.
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« Les produits de qualité sont réutilisés dans l’artisanat, mais il y a tout un tas de déchets qui ne sont pas réutilisés, qui sont laissés en stocks et qui sont encore brûlés dans certains endroits ou rejetés en mer alors qu’on peut en faire des produits dérivés qui intéressent et qui évitent d’importer des produits. L’idée, c’est de pouvoir récupérer le matériau sur place pour l’utiliser sur place plutôt que d’importer soit de l’étranger, soit de Tahiti des produits concassés. Ici, on va installer l’équipement de broyage sur place d’ici fin d’année, début d’année prochaine. On va commencer petit avec deux ou trois personnes et puis ça devrait faire travailler une quinzaine de personnes d’ici deux ou trois ans. »
Tematuanui Hantz réalise une thèse sur les coquillages du fenua… Pour cet ingénieur, le « béton bleu » ouvre la voie à d’autres possibilités plus écologiques. « La Polynésie a vraiment un grand potentiel, j’en suis convaincu, et il faut pouvoir l’exploiter ce potentiel dans le respect de l’environnement et des traditions. L’idée, c’est de proposer une formulation de béton avec plusieurs utilisations possibles comme un cheminement piéton, des pots de fleurs, des côtés de trottoir etc. »
Pour l’heure, ce béton coquillé est utilisé pour des aménagements piétons. Mais il pourrait se retrouver dans du béton armé ou fibré. De déchet à matériau d’exception, la nacre des huitres perlières n’a pas fini de nous étonner…