C’était en janvier 2017. Des pluies diluviennes s’abattaient sur Tahiti provocant de fortes crues, des inondations et d’importants dégâts. À Pirae, plusieurs centaines d’habitations avaient été détruites et des ponts endommagés.
La prévention de ces crues soudaines et dangereuses a fait l’objet d’une thèse de Garance Tanguy. La jeune femme a étudié avec précision les cours d’eau pour créer un nouveau modèle d’estimation des crues. Il est calibré sur 9 bassins versants, sur l’ensemble de Tahiti. L’ancien modèle n’en comptait que 3, situés sur la côte ouest.
« Il y a une grosse différence entre les bassins urbains et les bassins naturels car sur les bassins urbains, le sol est complètement imperméable et artificiel. Il va donc avoir tendance à plus ruisseler alors que sur les bassins naturels, l’eau s’infiltre », explique Garance Tanguy.
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La jeune docteure a cherché à caractériser la variabilité des rivières, grâce à des mesures concrètes. Celles de la côte Est sont ainsi soumises à sept fois plus de précipitations que leurs homologues de la côte Ouest. Mais les chemins d’écoulement empruntés par l’eau demeurent inconnus. Difficile, dans ces conditions, de déterminer si elle transite par la surface ou s’infiltre dans des roches volcaniques.
« On a essayé d’enrichir les mesures que l’on avait avec des mesures sur l’humidité des sols notamment. Avec mon stagiaire, nous avons fait des prélèvements de sols sur toute l’île de Tahiti, une quarantaine d’échantillons. A chaque fois, on mesurait les propriétés des sols vis-à-vis de l’eau, leur comportement. Par exemple, si le sol est complétement sec, cela aura une influence par rapport à un sol gorgé d’eau. Dans ce cas, c’est comme une éponge gorgée d’eau, l’eau ruissèle plus vite », ajoute Garance Tanguy.
Grâce à cette thèse, l’Université de Polynésie compte élaborer un guide pratique destiné aux professionnels de l’aménagement. « Il va y avoir un manuel d’utilisateur des résultats de modélisation hydrologique de Garance. C’est un outil concret qui est très attendu par les bureaux d’études », se félicite Lydie Sichoix, maître de conférences et enseignante/ chercheuse à l’UPF.
Avec cette nouvelle modélisation hydrologique, les ingénieurs disposent désormais d’une formule qui intègre les débits maximums de pluies auxquels on peut s’attendre sur une période donnée. Des informations essentielles pour déterminer le bon dimensionnement des ouvrages à construire, comme l’explique Gwenaëlle Bouisson, la responsable de la cellule hydrologie du Groupement d’Études et de Gestion du Domaine Public :
« Le travail de Garance a permis de synthétiser et de valoriser toutes les données collectées depuis 2000 et d’actualiser les coefficients utilisés dans le dimensionnement des ponts et des rivières ». Au total, 215 rivières sont répertoriées par le service de l’Equipement, dont 43 qui sont équipés de points de mesure en hydrologie.