La Polynésie s’intéresse aux intelligences artificielles. Chercheur en économie de l’environnement, Léopold Temoana Biardeau s’intéresse aussi aux intelligences artificielles. Il a développé une application qui a attiré l’attention des institutions. Elle « permet de faire de la traduction en temps réel, avec un ordinateur et de passer entre 9 langues polynésiennes, en plus de l’anglais et du français, explique-t-il. L’idée, c’est d’insérer ce projet-là dans une plateforme plus large de recherches en intelligences artificielles sur plusieurs thématiques, sur la cybersécurité, mais l’aspect humain de la cybersécurité. Et pourquoi pas aussi sur les questions de liens entre culture et intelligence artificielle. »‘
Lire aussi : L’intelligence artificielle au service des langues polynésiennes
Un centre de recherche associé au laboratoire du CNAM, le Conservatoire national des arts et métiers en Polynésie, va être créé. Il s’agira donc, entre autres, de prévenir des dérives que peuvent engendrer les IA comme celle de notre chercheur. « Là, nous sommes sur une IA qu’on appelle « générative ». Elle est capable de générer du texte, ou du son. Le son, ça peut être de la voix. Donc on peut imaginer des arnaques au président avec des paroles, la voix en temps réel d’une personnalité connue. Si nous reprenons, par exemple, les extraits vidéo de TNTV, que nous reprenons la parole de certains décideurs politiques, nous pourrions entraîner des intelligences artificielles génératives à générer de la parole avec la voix d’un décideur politique. »
Au-delà de l’aspect cybersécurité, le but est aussi que le fenua ne reste pas en retrait du phénomène, fulgurant, de développement des IA. « L’intérêt de ce centre de recherches associé, c’est de partir du travail de Léo qui a fait un travail remarquable en informatique alors qu’il n’est « que »docteur en économie de l’environnement, et avec des docteurs en informatique, nous allons pouvoir commencer à publier et à faire des travaux autour de cette IA adaptée aux langues polynésiennes. Et l’avantage ça va être de faire d’une certaine façon la promotion de la Polynésie. On entend tous parler de Bard, ChatGPT… les grands modèles d’IA, et même si on va être réalistes : on ne va pas se mesurer aux plus grands parce que derrière, il y a des dizaines de milliards de dollars, nous savons qu’en Polynésie, pour le bassin océanien, nous pouvons faire des choses très intéressantes, et c’est le but de ce centre de recherches. »
– PUBLICITE –
Lire aussi – IA : sensibiliser et encadrer face à un développement fulgurant
Pour Léopold Temoana Biardeau, pas de doute, « la Polynésie peut, si elle le souhaite, s’insérer dans ce grand mouvement, cette grande révolution de l’intelligence artificielle qui a pris son essor ces 6 dernières années avec l’arrivée de nouveaux types d’outils d’intelligence artificielle (…) Six ans c’est beaucoup dans ce monde-là, mais c’est assez peu donc la Polynésie si elle le souhaite, peut (…) apporter sa pierre à l’édifice ».
Un outil pour aider, pas pour remplacer
Plusieurs projets sont en cours. L’IA de Léopold Temoana Biardeau doit notamment permettre d’aider à la traduction du site internet Lexpol qui permet d’accéder aux textes de lois. « Ça fait partie des annonces qui ont été faites par le président Brotherson, rappelle le créateur de l’IA de traduction. (…) Il y a ce désir de traduire le Lexpol pour l’instant en reo Tahiti, mais aussi dans les différents reo de Polynésie. C’est un objectif assez noble et en même temps, une tâche herculéenne. L’idée ce serait -parce qu’on n’est pas dans une logique de remplacement des gens- de pouvoir aider les juristes, les linguistes, à qui on va demander de faire ces efforts de traduction. Pouvoir les aider, notamment pour les tâches répétitives, pouvoir automatiser, sous supervision humaine. Ce ne sera pas au modèle de créer de nouveaux mots. »
Oubliez donc (pour l’instant) le scenario dans lequel les intelligences artificielles contrôlent le monde. Le but est ici de faire des IA des outils au service de l’Homme. Et non l’inverse.