Son histoire est profondément ancrée au fenua. Née aux États-Unis où elle habite en partie aujourd’hui, Jessica Vaitiare Chin Foo a grandi à Tahiti, pays de ses « tupuna ». « Mon arrière-grand-père maternel est venu ici vers 1900, et il a fait partie des premiers chinois ici, qui ont fondé la première association philanthropique pour la communauté chinoise. Cela a permis à la communauté chinoise d’avoir des droits, pour qu’ils n’aient pas que des numéros, mais des noms, qu’ils puissent faire leurs rites etc. » Sa mère est née à Pape’ete mais termine ses études aux États-Unis où Jessica voit le jour. Et c’est au fenua qu’elle fait ses premiers pas. « J’étais la première américaine tahitienne de notre branche. Mais entre mes parents, ça n’a pas fonctionné donc ils se sont rentrés quand j’étais encore newborn. J’ai grandi chez ma grand-mère maternelle, avec ma mère, mon grand-père, mon tonton… »
À 17 ans, soutenue par ses grands-parents, elle profite de sa double nationalité pour se rendre au pays de l’Oncle Sam poursuivre ses études. Son diplôme en gestion économique de l’environnement et des ressources naturelles en poche, elle intègre une start-up dans l’immobilier. Là, les choses bougent rapidement. « On a changé trois fois de bureaux, j’ai changé de poste et j’ai bien vu que je voulais avoir plus de connaissances. J’ai donc arrêté mon travail pour suivre un MBA plus global. Et en même temps que je faisais mon MBA, j’ai ouvert une patente, pour faire du consulting. Je travaillais pour l’association du Small Business Administration de Sacramento dans leur programme 8(a) qui est un programme qui aide les entrepreneurs issus de minorités comme les Amérindiens, les femmes de couleur etc. »
« Ma mémé me dit toujours que je ne suis pas un poisson qui reste, je ne suis pas un nato qui reste dans la rivière«
En 2009, elle revient brièvement travailler au fenua comme conseillère technique au ministère de l’Énergie. Jessica n’oublie pas son pays. Après cette expérience, elle poursuit ses aller-retours entre les iles et le continent américain. « Ma mémé me dit toujours que je ne suis pas un poisson qui reste, je ne suis pas un nato qui reste dans la rivière, plaisante-t-elle. Elle me dit, tu es un saumon, tu as besoin d’aller dans la grande mer, de revenir et toujours savoir de quelle rivière tu viens. »
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Accompagner les start-ups polynésiennes

Depuis 2020, Jessica fait partie de la French Tech Polynésie. Elle est également mentor pour les startups de l’incubateur Prism. À l’origine d’un pavillon africain au CES cette année, Jessica espère bien voir un jour des entreprises du fenua dans ce grand événement de la tech. « Pour cette année, j’avais sollicité les membres de la French Tech Polynesie pour monter une délégation polynésienne au CES. Je pense que ce n’était pas dans les priorités. Parce que le marché américain, il faut être prêt aussi. »


L’année dernière, Jessica a monté Manos Capital dans la Silicon Valley, un fonds d’investissement axé sur les startups qui développe des solutions répondant à des objectifs de développement durable. « Depuis que je suis rentrée dans le fonds, je me suis dit que j’allais être plus active. Être un pont pour la Polynésie. »
Pour elle, le fenua pourrait devenir un véritable pôle d’innovation. Mais les schémas directeurs et les visions ne suffisent pas : “Il faut passer à l’action et générer un réel impact. Il est essentiel de structurer un écosystème fort, soutenu par des partenaires engagés qui collaborent intelligemment pour le faire grandir. Aujourd’hui, nous avons beaucoup d’échanges avec la France, mais pourquoi ne pas aussi renforcer nos connexions avec nos voisins du Pacifique ? Notre réalité géographique nous connecte différemment : Nouméa est à seulement deux heures de l’Australie, nous sommes à cinq heures de la Nouvelle-Calédonie et de la Nouvelle-Zélande, et juste après, il y a nos frères au Samoa. Mais au-delà, nous faisons aussi partie de la grande région du Pacifique, ouverte sur l’Asie et l’Amérique latine, qui partagent avec nous un accès privilégié à cet océan commun. Nous avons une forte identité océanienne, des talents qui ont étudié ou travaillé à l’étranger, acquis des compétences et construit des réseaux. Il est temps de mettre ces forces en commun, de rassembler autour d’une table tous ceux qui veulent agir et d’accélérer des initiatives concrètes. Construisons ensemble un avenir où l’innovation océanienne se développe pour et par les Océaniens, en valorisant notre richesse économique et culturelle, tout en protégeant et préservant notre magnifique océan Pacifique.”
Jessica Vaitiare Chin Foo sera l’invitée de votre émission Meta Fenua. Rdv le 11 mars
à 17h30 sur TNTV