Marquises à l’Unesco : « Si la validation est faite, cette fierté, on la partagera avec la population polynésienne tout entière »

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C'est le 26 juillet que l'Unesco se prononcera sur le classement des Marquises au patrimoine de l'Humanité. Le maire de Tahuata Félix Barsinas s'envolera lundi avec d'autres Hakaiki, vers la métropole. Il était l'invité de notre journal samedi.

Publié le 21/07/2024 à 12:02 - Mise à jour le 21/07/2024 à 12:02

C'est le 26 juillet que l'Unesco se prononcera sur le classement des Marquises au patrimoine de l'Humanité. Le maire de Tahuata Félix Barsinas s'envolera lundi avec d'autres Hakaiki, vers la métropole. Il était l'invité de notre journal samedi.

Tahiti Nui Télévision : Vous étiez l’un des maires des Marquises présents à la réunion sur la pêche à la présidence. Que demandent les Marquises pour la pêche artisanale ? Une zone de combien de nautiques ?
Félix Barsinas, maire de Tahuata : « Nous sommes constants dans notre démarche, à savoir de maintenir ces 30 000 nautiques des côtes, pour éviter que les thoniers puissent venir, afin qu’on puisse laisser cet espace aux pêcheurs qui utilisent des embarcations de type traditionnel. »

TNTV : On sait que les eaux marquisiennes sont riches, très riches en poissons, mais observez-vous une raréfaction de la ressource ?
Félix Barsinas : « En effet, la raréfaction des poissons est constatée. Et en tout cas, nous nous inscrivons dans un consensus avec les thoniers, donc les armateurs, qui utilisent des moyens beaucoup plus grands pour venir pêcher dans nos eaux. Et nous avons encouragé ces personnes à venir parce que nous avons une vision de développement de notre archipel avec la construction de l’aéroport international, faire en sorte que demain, des initiatives privées puissent s’installer et qu’avec l’étroite collaboration du Pays, de mener à bien, de mener à terme des constructions, des infrastructures permettant justement de développer ce secteur qui nous tient à cœur. »

TNTV : La pêche artisanale et la pêche hauturière sont compatibles ?
Félix Barsinas : « Pas du tout. C’est un des conflits d’usage que nous constatons de plus en plus dans nos eaux. Et c’est la raison pour laquelle nous maintenons cette limitation à 30 000 nautiques pour mieux préserver. En sachant, (…) que ces pêcheurs qui utilisent des embarcations de type traditionnel permettent justement de nourrir nos familles respectives. Ils n’ont pas les moyens qu’ont actuellement, les thoniers, permettant d’avoir des tonages beaucoup plus conséquents. Et il y aura un impact sur les ressources halieutiques. Nous nous engageons ce soir : il n’y a pas d’interdiction, il n’y a pas d’exclusivité réservée aux pêcheurs marquisiens. Bien au contraire, l’espace maritime, donc c’est pour tous les Polynésiens que l’on ne soit Paumotu, Tahitien, Mangareva, des Australes. Donc, ils sont tous les bienvenus. Encore faut-il respecter cette volonté réelle que nous avons les hakaiki, de contenir et d’encourager le Pays, qui est cette volonté politique de la part du Pays, de limiter les zones, de fixer les zones pour l’intérêt de tout le monde, y compris les pêcheurs côtiers et les pêcheurs hauturiers ».

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TNTV : L’idéal pour vous, pour les hakaiki, pour les Marquises, c’est de protéger la pêche artisanale tout en développant sur place une pêche professionnelle ? On parle de l’ancien projet à Hiva Toa, avec un grand port de pêche équipé, des thoniers, vous en parliez tantôt, et un aéroport international pour exporter le temps, peut-être ?
Félix Barsinas : « Alors, ce projet à Hiva Toa que tu viens de citer, c’est une réflexion dans le cadre où la Codim avait pour compétence de réfléchir sur des études d’opportunité en matière de développement, parce que la Codim a pour vocation de réfléchir, sur des études d’opportunité. Malheureusement, ce dossier, il est en instance, mais aujourd’hui, on peut dire que ce dossier, on pourra le réactualiser parce qu’il y a une visibilité à l’horizon avec la construction de l’aéroport international. On va s’y atteler, on va revenir, on va discuter encore avec des porteurs de projets pour faire en sorte que les Marquisiens de demain viennent, s’installent et puissent développer. Nous sommes soucieux en tant qu’élus de faire en sorte que ce soit une pêche raisonnée, dans le souci de préserver et qu’on puisse laisser demain à nos enfants, un héritage responsable. »

TNTV : Hakaiki, l’actualité brûlante pour les Marquises, c’est aussi son inscription au patrimoine mondial de l’Humanité. Vous et les autres maires des Marquises prenez l’avion lundi pour vous rendre à New Delhi, en Inde. Le 26 juillet, l’Unesco doit se prononcer sur le classement des Marquises. Dans quel état d’esprit êtes-vous et est-ce que vous êtes confiant totalement ?
Félix Barsinas :
« On part sereins, on part sereins parce qu’il y a eu un accompagnement depuis ces dernières années, quand je dis un accompagnement, aussi bien par l’État que par le Pays, les experts mondiaux qui sont descendus au mois d’octobre pour venir et poser des questions intermédiaires pour que le Pays puisse répondre avant le vendredi le 26 juillet. Si demain la validation est faite, cette fierté, on la partagera avec la population polynésienne tout entière, parce que c’est une reconnaissance de l’entité marquisienne, de cet archipel. C’est le Pays qui est mis en exergue à ce moment-là. Donc ça devient une vitrine à l’international. L’archipel qui est un grain de sable dans l’océan Pacifique sera reconnu de par le monde. C’est ça qui est formidable, que cette population marquisienne, qui est fière de sa culture, de son patrimoine, sera reconnue sur le plan international. »

TNTV : Le dossier est porté depuis 30 ans. On est à la toute fin du processus. Si les Marquises sont classées, il se passe quoi ensuite ? Quel est l’enjeu pour vous ?
Félix Barsinas : « On part au nom du Pays. C’est le portage du dossier fait par le Pays. On aimerait bien que par la suite, le Pays nous confie ce document, ce diplôme, cette attestation pour qu’on puisse partir aux Marquises avec et puis faire en sorte que ça soit une fierté pour l’ensemble des Marquisiens et l’ensemble des Polynésiens. Mais il y a du travail à faire par la suite. »

TNTV : Un mot sur votre volonté de faire des Marquises, une communauté d’archipel. Qu’est-ce que ce nouveau statut changerait en termes de compétence et de responsabilité ? Et où en êtes-vous à des discussions avec le Pays et l’État ?
Félix Barsinas :
« Toutes les discussions sont abouties. Mais aujourd’hui, nous attendons le dernier rapport des sénateurs, des délégations sénatoriales et députés qui se sont déplacées aux Marquises. Donc, ces deux rapports sont importants pour pouvoir justement clarifier les leviers juridiques qui incombent justement à cette volonté réelle que nous avons de faire aboutir ce projet de communauté de communes en communauté d’archipels. Pour faire simple simplement, Davidson, c’est comment faire évoluer la Codim en communauté d’archipels tout en restant dans la Polynésie française. On ne demande pas à être séparés de la Polynésie française. C’est une forme de différenciation que nous demandons afin que demain, on puisse avoir tous les leviers juridiques pour pouvoir réagir rapidement sur le terrain.« 

TNTV : Le tout nouveau député marquisien Moerani Frébault, défendra-t-il ce projet au sein de l’Assemblée nationale ?
Félix Barsinas :
« Une bonne nouvelle : j’ai su qu’il fait partie de la Commission des lois. Moerani est là pour faire entendre nos revendications. Mais j’insiste, on continuera à travailler avec le Pays parce que le statut d’autonomie interne l’exige. Il faudra modifier. Ce n’est pas simplement à l’Assemblée nationale, c’est convaincre le partenaire privilégié qui est le Pays de se mettre autour d’une table. Comme je l’ai dit, on n’est pas là pour se séparer de la Polynésie française. On est là justement pour qu’il y ait une différenciation au sein de cette Polynésie afin que demain, on puisse avoir tous les leviers juridiques pour le bien de notre population. Et c’est tout ce que nous voulons. Moerani n’est qu’un levier justement pour faire en sorte que les choses avancent avec bien évidemment un consensus avec le Pays. Et l’État n’a pas pour rôle de s’immiscer dans cette démarche. Donc, j’insiste là-dessus. »

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