TNTV : L’ambassadeur de France a affirmé qu’il n’existait pas de processus entre l’État et le territoire polynésien qui réserve un rôle aux Nations Unies. Que peut-on attendre des Nations Unies alors que la France ne veut pas que l’ONU intervienne ?
Sémir Al Wardi, politologue : « Il faut remarquer que la France est présente pour la seconde fois, ce qui est déjà un progrès. La France n’assistait pas à la 4e Commission lorsqu’il s’agissait de la politique française. Mais il est évident que la Polynésie française n’est pas dans un processus de décolonisation, contrairement à la Nouvelle-Calédonie (…) La France n’a pas changé sa position et estime qu’on n’a pas à réclamer une décolonisation à partir du moment où on n’est pas dans un processus de décolonisation » .
TNTV : Les visions des autonomistes et des indépendantistes sont totalement opposées, à part sur un point : la demande d’une mission d’information de l’ONU au fenua pour y faire ses propres constats. Que pensez-vous de cette proposition ?
S.A.W : « C’est une proposition qui est tout à fait logique. Les indépendantistes estiment qu’il faut venir ici pour constater que la Polynésie française est une collectivité qui n’a pas encore obtenu son indépendance, alors que les autonomistes veulent démontrer que la Polynésie française est développée, que la France ici n’a pas à rougir de son action et que, comme ils l’ont dit et expliqué devant la quatrième commission, 30% de son PIB vient des transferts de la métropole, que la Polynésie est dans le progrès économique » .
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TNTV : Moetai Brotherson a demandé une co-construction d’un programme de travail pour tendre vers l’autodétermination. Les autonomistes ont tendance à assimiler la décolonisation à l’indépendance, mais concrètement, qu’entend-on par décolonisation ?
S.A.W : « Il faut prendre la définition de l’ONU, qui estime que la décolonisation, c’est 4 choses. Soit on est intégré totalement à un État, soit on est totalement indépendant, soit on est en self-government – pratiquement un État associé – , soit toute autre relation décidée entre les partis. C’est-à-dire que le champ des possibles est considérable. Il ne faut pas réduire cela à une pleine souveraineté. On peut imaginer toutes sortes de relations entre une métropole et un territoire » .
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TNTV : Pendant cette quatrième commission de l’ONU, une autre délégation importante s’est exprimée, celle de nos voisins calédoniens, frappés par une crise économique, sociale et politique sans précédent. L’État a-t-il un autre choix que de céder face aux indépendantistes canaques ?
S.A.W : « L’État est appelé à amener les différentes parties à négocier. En fait, il faut négocier. Pourquoi l’État ne doit-il pas, dans tous les cas, répondre à une seule des parties ? Parce que nous avons sur ce territoire différentes communautés. Il y a les victimes de l’histoire, il y a les peuples premiers. L’État doit amener les différentes communautés à s’entendre. Il faut trouver un juste milieu pour que ces différentes parties amènent une solution » .