Dr Maya Ella Marza Brugada : médecin et enfant du fenua, elle milite pour une médecine intégrative

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Médecin généraliste, le docteur Maya Ella Marza Brugada milite pour une médecine intégrative, à l'écoute des patients. Enfant du fenua, sa pratique lui semble couler de source. Mais dans l'Hexagone, elle constate de nombreux freins. Rencontre.

Publié le 13/04/2025 à 9:56 - Mise à jour le 13/04/2025 à 9:56

Médecin généraliste, le docteur Maya Ella Marza Brugada milite pour une médecine intégrative, à l'écoute des patients. Enfant du fenua, sa pratique lui semble couler de source. Mais dans l'Hexagone, elle constate de nombreux freins. Rencontre.

Faire connaitre la médecine intégrative, c’est le cheval de bataille du Dr Maya Ella Marza Brugada. Enfant du fenua, Maya née et grandit dans une famille de commerçants. Mais ce type de métiers ne l’attire pas. « Je n’aimais pas la qualité des rapports humains dans ces métiers. Je me suis dit qu’il fallait que je fasse un métier où il n’y a pas de commerce. J’aimais faire des massages, le fait d’amener du bien-être à mes proches. Au début, je voulais être kiné, et puis ma curiosité a grandi. L’entourage, surtout les profs me disaient « tu as des bonnes notes, tu pourrais faire médecine ». ‘J’ai rencontré aussi des médecins femmes qui avaient une vie de femmes et de parents et qui profitaient et ça m’a rassurée ».

Rapidement, elle s’intéresse à la médecine intégrative. La médecine intégrative désigne la une combinaison de traitements conventionnels et de médecines complémentaires. « Pourquoi faire de la médecine intégrative ? Pour être plus efficace que la médecine conventionnelle seule, ça parait assez évident, compréhensible, et parce qu’on veut se rapprocher de la définition de la santé qui va intégrer aussi la notion de bien-être psychique, émotionnel, social, environnemental. Pour ça évidemment la médecine conventionnelle est très limitée. Donc, on va aller vers une médecine individualisée, préventive… »

Maya s’intéresse à l’hypnose, à l’acupuncture, et même au yoga et à la micro-nutrition. Elle ne cesse de se former et renvoie ses patients vers d’autres professionnels. Mais en pratique, la médecine intégrative a ses limites : « dans la loi le médecin doit aussi prescrire uniquement des thérapeutiques qui sont éprouvées par la science. Donc, on est un peu face aux limites de la science, et puis il y a plein de médecines qui n’ont jamais étudié, qui n’auront jamais le budget pour être étudiées scientifiquement. (…) Au niveau de la loi, il manque peut-être un positionnement venant de la part de chaque pays pour dire est-ce que la médecine conventionnelle garde le plein pouvoir, on va dire, en ce qui concerne la médecine. Est-ce qu’il n’y a qu’un médecin qui a le droit de faire un diagnostic et de dire qu’il va donner un traitement ? Ou est-ce qu’une médecine traditionnelle, je ne sais pas, africaine, tahitienne, est-ce qu’elle a les mêmes droits ? En même temps, chaque patient, heureusement, est propriétaire de son corps. »

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Maya estime qu’il y a aujourd’hui « des lacunes pour pouvoir vraiment asseoir ma manière de répondre aux besoins culturels, spirituels ou juste cognitifs du patient ».

Le fenua est aujourd’hui un exemple en termes de médecine intégrative. L’hôpital de Taaone fait régulièrement appel à des tradipraticiens. Mais Maya exerce dans l’Hexagone, et les mentalités sont bien différentes. « C’est difficile de rendre la médecine intégrative comme un choix numéro un. Ce qui est sûr, c’est que les études petit à petit montrent que si on regarde juste le besoin d’efficacité et donc de répondre en tant que médecin à son devoir d’aider son patient, oui normalement la médecine intégrative devrait prévaloir. (…) Je pense que d’avoir grandi à Tahiti, d’être dans un mélange culturel, cette ouverture culturelle fait que ça a rendu ma perception d’une médecine interculturelle comme quelque chose de normal et bienveillant aussi pour le patient ».

(Crédit Photo : Maya Ella Marza Brugada)

Si elle sait que la pratique de la médecine intégrative serait plus simple au fenua, Maya n’envisage pas de revenir tout de suite au fenua. Elle devrait d’abord déménager avec son compagnon, au Canada. « La médecine au Canada, à Montréal, j’ai l’impression, en tout cas quand je vois les postes qui sont proposés, que dans la manière de travailler, on peut être médecin et faire une médecine intégrative, ou ne serait-ce que juste prendre du temps avec son patient. »

« Simplement le défaut de ne pas pouvoir écouter son patient, à mon avis, amène à des erreurs, ou juste à pas de diagnostic.« 

Pour exercer là-bas, Maya devra faire un stage et passer une équivalence. Mais une chose est sûre, continuer d’exercer la médecine tel qu’elle la conçoit dans l’Hexagone devient compliqué. Maya pointe un système de santé vieillissant et une mentalité bien moins ouverte. « Je ne sais pas ce qu’il faudrait pour que les médecins soient dans l’acceptation de travailler main dans la main avec des thérapeutes. (…) Il y a plusieurs questions à poser sur la table, je ne crois pas qu’il y ait déjà une volonté à ce stade-là. Il y a beaucoup de freins actuellement, il y a eu récemment une chasse aux naturopathes, comme il y a pu y en avoir pour les ostéopathes il y a 60 ans, je crois. On a l’impression qu’on part de loin.
Aujourd’hui, il y a beaucoup l’argument qu’il y a des charlatans, que les thérapeutes sont dangereux. Je trouve qu’on ne dit pas assez que les médecins aussi sont dangereux, les chiffres ne manquent pas. Il y a suffisamment d’études par exemple sur les effets secondaires des médicaments, comme les anticoagulants qui ont été responsables de beaucoup d’hospitalisations. Alors évidemment ce n’est pas directement la faute du médecin, mais parfois les médecins aussi font des mauvais choix, ou pour moi simplement le défaut de ne pas pouvoir écouter son patient, à mon avis amène à des erreurs, ou juste pas de diagnostic. Je pense qu’il y a beaucoup de patients qui pourraient aller mieux si leur médecin était plus positif et donnait de l’espoir. »

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