Un jour avant la période de forte houle sur la Presqu’île, c’est à Vairao, le mardi 12 juillet lors du Taiarapu Ouest Horue Festival, que Gilbert Teave se met à l’eau. Sur un petit swell, il domine sa série dans la catégorie junior. Mais c’est bien dans la mâchoire de Teahupoo qu’il se sent le plus à l’aise et qu’il s’est fait connaître : « Je me rappelle la première fois que j’y suis allé, j’avais 10 ans. J’étais carrément nerveux ! Il y avait des pros, et moi je ne savais pas encore bien surfer, je savais juste me lever. Mais bon, c’est passé. À l’aise (rires) ! »
Avec le temps et quelques sessions d’exception, il se fait repérer, au point de taper dans l’œil d’Oxbow en 2022. Toujours grâce à sa vague préférée : lorsque les conditions s’y prêtent, elle tutoie la dizaine de mètres de haut et offre un tube ultra spectaculaire. Tout ce dont Gilbert raffole : « Demain [le 13/07, jour du code red à Teahupoo], il y a un gros swell, ça va être vraiment énorme. Il faut s’entraîner un peu avant, faire un petit footing, en tout cas il faut être prêt et ne surtout pas rater ça ! Je me vois évoluer avec Teahupoo, avec cette vague. C’est elle qui va m’emmener haut. Je crois en elle, it’s on ! »
Comme beaucoup de chargeurs polynésiens, c’est très tôt qu’il prend ses premières vagues, du côté de Punaauia. « J’ai appris à surfer à Sapinus, à Punauuia. Je regardais les autres se lever sur leur boogie, j’ai acheté ma première planche, et c’est venu très naturellement ». Parmi ses modèles, il cite volontiers Heiarii Williams, lui aussi originaire de Punaauia et partie intégrante du paysage de la pointe Sapinus.
– PUBLICITE –
Il grandit ainsi entouré de surfeurs de choix, accompagné par ses parents. Son père, taxiboat, est le premier à suivre ses exploits et à croire en lui. « C’est simple, mon objectif, c’est de percer et vivre du surf. Je veux en profiter à fond. Mes parents me soutiennent, ils sont tous les deux derrière moi ». Sa mère l’aide aussi à accomplir ses rêves. Fin 2021, toujours sur la Presqu’île, il mettait de l’argent côté en vendant des noix de coco glacées avec elle.
« Ce qui me plaît dans le surf, c’est le danger. J’aime ça. »
Gilbert Teave Tehuritaua
Financer un surf trip n’est pas une mince affaire. C’est néanmoins un pallier à franchir pour aller chercher, pourquoi pas, d’autres sponsors. « Je suis concentré à fond sur le surf. J’ai déjà un sponsor, Oxbow, mais j’essaie d’en trouver d’autres ». Parmi les destinations les plus prestigieuses, Gilbert égrène Pipeline à Hawaii, et la gauche de Skeleton Bay, son « dream spot. Que du tube tout le long ».
Gilbert n’a pas froid aux yeux. Quand on lui demande ce qui l’anime dans le surf, il répond du tac au tac : « Ce qui me plaît dans le surf, c’est le danger. J’aime ça ». Une bonne dose de cran qui ne l’empêche pas de rester humble. Il y a quelques semaines, il s’est essayé à la rame sur une énorme vague, toujours à Teahupoo. L’un de ses pires wipeout, qui marquent le corps et font partie de l’expérience.
Humble, donc, et toujours conscient des progrès qu’il lui reste à faire pour se faire une place chez les pros. « J’ai encore beaucoup de choses à apprendre. Disons que j’ai appris le plus difficile, mais il y a toujours plus à travailler. Il n’y en a jamais assez ».
L’an passé, il devait participer aux trials de l’Outerknown Tahiti Pro, étape tahitienne de la World Surf League (les championnats du monde de surf). La pandémie avait entrainé l’annulation de l’événement. Une déception pour tout le secteur, particulièrement pour Gilbert : « J’attendais ça avec impatience. Ça devait être ma première participation, parce qu’avant, j’étais trop jeune ! ».
Finalement, il ne profitera pas longtemps de la grosse houle du 13 juillet, le surf étant vite interdit par le Pays pour des raisons de sécurité. Malgré tout, ses aînés Matahi Drollet et Eimeo Czermak auront réussi à charger les plus belles vagues de la session, le tout devant le champion du monde de surf de gros Billy Kemper. Une source de motivation en plus pour Gilbert, en attendant le prochain swell.