L’un des auteurs de la série de cambriolages ayant visé les stations services – et une supérette – de Tahiti entre janvier et début mars a comparu devant le tribunal correctionnel de Papeete ce lundi, pour sept faits de vol aggravé et un d’usage de stupéfiants. S’il a comparu seul, c’est parce que son petit frère et co-auteur des faits est encore mineur. Lui sera jugé par un tribunal pour enfants.
L’âge des deux voleurs, et leur situation sociale interpelle : à 15 et 21 ans, ils vivent dans la rue, le plus petit ayant décidé de partir de chez son père, suivi par son grand frère. Récemment sorti de prison – il a déjà été incarcéré trois fois, notamment pour des faits de vol – , ce dernier décrit un homme autoritaire et brutal, et comprend la décision de son cadet, “fiu” de devoir “travailler de force” pour le compte de l’entreprise paternelle. Et comme ils ne peuvent pas trouver refuge chez leur mère et leur beau-père, qui les rejette, ils atterrissent dehors, sur le pavé.
Commence alors leur court périple : d’abord une station service le 9 janvier à Papeete puis une enseigne de grande surface trois jours plus tard à Papara, puis six autres stations en un mois, entre Pirae et Taravao. Le modus operandi est simple : ils passent par le toit pour s’introduire dans les stations fermées, et emportent un maximum d’espèces ou d’objets peu volumineux : des recharges de téléphone, des tickets de jeu, des vapoteuses, du tabac, des briquets, des écouteurs, quelques denrées alimentaires, des bouteilles alcool, et même des vêtements. Bilan des courses, en ajoutant les dégâts matériels : 7,5 millions de francs de préjudice.
Les enregistrements vidéo de leurs derniers larcins ne permettent pas tout de suite de les identifier précisément. C’est le recoupement des enquêteurs de la police pour des faits similaires, puis le bornage des téléphones et une enquête de voisinage qui mènent à l’interpellation des deux frères à Fare ute, leur implication étant confirmée par les traces ADN et une empreinte palmaire relevées sur les lieux de leurs délits.
Mais la réactivité des enquêteurs n’a pas empêché le prévenu de dépenser une grande partie de son butin. Sur les 2,3 millions de francs en cash volés, celui-ci estime en avoir dépensé 1,5 million en ice. Sa consommation, assure-t-il, est devenue plus régulière depuis qu’il est à la rue. On ne saura pas si son petit frère a aussi consommé.
« J’ai l’habitude, je vais rembourser »
L’argent restant, explique-t-il, a été distribué avec des cigarettes à des sans abris. Il s’est gardé un pécule pour acheter nourriture, vêtements, et un peu de paka, qu’il fume depuis qu’il a douze ans. Le mis en cause est, selon le service pénitentiaire d’insertion et de probation, imperméable à la sanction pénale. “J’ai l’habitude (…) je vais trouver du travail je vais rembourser” , commente-t-il. Le procureur ne s’y trompe pas dans ses réquisitions : 24 mois de prison dont 6 mois de sursis.
“Pour l’instant, rien ne fonctionne. Il faut faire en sorte que ce jeune et son petit frère comprennent qu’il y a d’autres solutions que s’insérer dans un monde délictuel” , le défend son avocat, Me Fromaigeat. Il y a eu une détresse quand il a compris que ce n’était pas seulement lui qui allait indemniser les parties civiles” , ajoute-t-il, pointant des montants de demandes de réparation du préjudice matériel établis à l’ ”emporte pièce” . Le conseil demande en outre à ce que l’examen précis des montants soit renvoyé sur intérêts civils.
Le tribunal a condamné le jeune homme à deux ans de prison dont 6 mois assortis d’un sursis probatoire de deux ans. Il devra indemniser les stations et commerces suivant le renvoi sur intérêts civils fixé au 18 août, suivre des soins, et travailler ou suivre une formation.