Pas de vols annulés pour l’instant, mais à défaut d’un accord dans la journée, les PNC en grève menés par A ti’a i mua et la CSIP, comptent bien durcir le ton dès demain. Au premier rang des revendications : une hausse des salaires de 30% pour le personnel naviguant commercial. La rémunération des stewards et des hôtesses de l’air étant composée d’un fixe (soit minimum 200 000 Fcfp net selon ATN, Ndlr) et d’une part variable, plus ils volent, plus ils gagnent. Ainsi, plus la compagnie a un programme de vols ambitieux, plus leurs revenus s’améliorent. C’est donc sur le fixe que ces derniers attendent une augmentation, afin que leur salaire ne soit pas trop amputé lorsqu’ils travaillent moins.
Or, selon les syndicats, non seulement le personnel navigant commercial montre des signes de fatigue, mais « leurs salaires de base sont quasiment gelés depuis 2008 » et « leur pouvoir d’achat ne cesse de se dégrader ». Plus question de multiplier les vols « au détriment de leur vie de famille ». « Aujourd’hui, les conditions de travail sont telles que certains PNC en sont à embarquer avec eux des paquets de soupe bleus » écrivent les syndicats dans un communiqué de presse. Ces derniers pointent d’ailleurs du doigt le directeur de la compagnie. « Il convient de rappeler que la grille salariale des PNC n’a jamais été revalorisée, et ce, depuis 2008. L’arrivée de Michel Monvoisin aux commandes en 2011 n’a de toute évidence apporté aucune amélioration à cette grille salariale ». Les syndicats rappellent par ailleurs qu’une revalorisation est intervenue pour les pilotes en 2016 et pour le personnel administratif d’encadrement en 2018.
« Ces 30%, on ne pourra pas les répercuter sur les billets d’avion. Ça veut dire qu’on va creuser le déficit d’ATN. Et après, on fait quoi ? On demande une subvention au Pays ? »
Michel Monvoisin, directeur d’ATN
De son côté, le directeur de la compagnie au tiare veut bien reconnaître la légitimité des revendications liées à la fatigue des équipes. D’autant qu’une partie du personnel a intégré la compagnie à ses tout débuts il y a 25 ans. Il rappelle cependant qu’une entreprise « c’est un tout » et que la demande des syndicats est bien au-delà de ce que la compagnie peut endurer : soit une hausse de 30%. « Si on accepte, on risque de perdre en compétitivité dans les prochaines années face à la concurrence. Ces 30%, on ne pourra pas les répercuter sur les billets d’avion. Ça veut dire qu’on va creuser le déficit d’ATN, et après on fait quoi ? On demande une subvention au Pays ? » interroge Michel Monvoisin. « Cet argent, il n’est pas à moi. Il est financé par la contribution des Polynésiens ».
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Le directeur cite notamment les tribulations récentes de la ligne vers New York. « Si demain nos charges sont élevées et que nous sommes amenés à réduire le programme de vols, c’est-à-dire moins voler et éventuellement fermer une ou deux routes, on va se retrouver dans une situation délicate avec une surpopulation comme on a connu quand on a fermé New York. »
« En réalité ils proposent aux PNC de passer de 67 heures de vol minimum à 75 heures, c’est donc les obliger à voler plus de huit heures. »
Cyril Le Gayic, représentant de la Confédération des syndicats indépendants de Polynésie française (CSIP)
Pour autant, le directeur indique avoir formulé deux propositions. La première concerne une hausse du salaire fixe de 9% « sans contrepartie, c’est-à-dire sans toucher à leurs heures ». Proposition déclinée par les syndicats. La deuxième proposition consiste à transférer du fixe sur du variable, soit de relever les seuils. « Aujourd’hui on leur achète 67 heures par mois, on leur a proposé de leur racheter 75 heures, mais avec une augmentation de 9 à 15% » précise le directeur. Offre également déclinée.
« Ils nous donnent d’une main pour reprendre de l’autre main » s’impatiente le représentant de la Confédération des syndicats indépendants de Polynésie française (CSIP), Cyril Le Gayic. « En réalité ils proposent aux PNC de passer de 67 heures de vol minimum à 75 heures, c’est donc les obliger à voler plus de huit heures. C’est inadmissible. Il y a des pilotes qui ont un 14e mois alors que les PNC se sont sacrifiés depuis 2008 ».
La direction rappelle cependant avoir signé en 2018 une revalorisation de l’activité, qui a permis d’ajouter 300 millions à la part variable des salaires des PNC. Mais la crise sanitaire est passée par là. En 2020, la signature d’un protocole d’accord par la très grande majorité des syndicats avait acté une baisse générale de 5% des salaires dès le mois de novembre, et pour trois ans. De quoi économiser 200 millions Fcfp supplémentaires chaque année. Un protocole qui prendrait donc fin cette année.