« Au bout du rouleau », les praticiens de l’hôpital de Uturoa se préparent à la grève

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Plusieurs services de l'hôpital de Uturoa pourraient fermer très prochainement, par manque de praticiens. Des médecins "au bout du rouleau", dont les heures supplémentaires ne sont plus payées et qui travaillent dans un hôpital où les travaux de rénovation ont été suspendus, dénonce le docteur Dubois. Une grève pourrait démarrer la semaine prochaine.

Publié le 03/07/2024 à 11:19 - Mise à jour le 04/07/2024 à 15:48

Plusieurs services de l'hôpital de Uturoa pourraient fermer très prochainement, par manque de praticiens. Des médecins "au bout du rouleau", dont les heures supplémentaires ne sont plus payées et qui travaillent dans un hôpital où les travaux de rénovation ont été suspendus, dénonce le docteur Dubois. Une grève pourrait démarrer la semaine prochaine.

C’est loin d’être la première fois qu’ils demandent à être entendus : les praticiens hospitaliers de Uturoa ont déposé ce mercredi un préavis de grève.

Leurs revendications, au nombre de 5, n’ont pas beaucoup évolué ces derniers mois. Ils déplorent notamment un manque de personnel, et des heures supplémentaires non payées. « À l’heure où je vous parle, le service des urgences, le service de chirurgie, la pédiatrie, la maternité, la radiologie risquent de fermer dans les prochains jours par manque de praticiens, alerte taote Dubois, secrétaire général du syndicat du personnel de santé des iles Sous-le-Vent affilié à la CSTP-FO. Nous avons un manque de praticiens alors que les choses sont connues depuis des mois et des mois. On a essayé d’en informer les tutelles, il n’y a jamais eu de réponse« .

Un sixième poste aux urgences serait notamment essentiel pour que le service puisse fonctionner normalement estime le médecin.

« On a un praticien d’urgence qui a prévenu en juillet 2023 qu’il s’en allait. Là, en juillet 2024, on n’a personne pour le remplacer « .

Pour lui, des recrutements doivent être faits au plus vite, d’autant que l’administration aurait été prévenue il y a plusieurs mois du départ de certains : « on a un praticien d’urgence qui a prévenu en juillet 2023 qu’il s’en allait. Là, en juillet 2024, on n’a personne pour le remplacer, alors que l’administration avait un an pour prévoir son remplacement. »

Pour parer ces lenteurs administratives, le personnel souhaite que l’hôpital devienne « autonome en dehors de la direction de la Santé. »

Par ailleurs, selon lui, le personnel n’a pas eu d’heures supplémentaires payées depuis décembre dernier. Et pourtant, ils en font : « À l’heure actuelle, ça fonctionne parce que les praticiens font des heures supplémentaires de manière importante. Ils font jusqu’à 3-4 gardes de plus par mois. Quand on parle des gardes, c’est une garde de 12 heures. Donc, ils sont épuisés. Ils s’en vont parce qu’ils n’en peuvent plus.« 

Des praticiens au bout du rouleau qui finissent par craquer, et quitter le navire : « Aujourd’hui, au niveau de la radiologie, on a une radiologue qui est partie, parce qu’effectivement, elle n’en pouvait plus. Donc, elle nous a quittés. Elle n’est pas remplacée. L’autre praticienne qui est, elle aussi, au bout du rouleau, quand je vous dis au bout du rouleau, c’est au bout du rouleau, elle part, elle n’en peut plus, elle veut partir en congés. Sauf que rien n’est prévu pour son remplacement. Donc là, on va se retrouver avec un service de radiologie vide, sans radiologue. »

Les praticiens hospitaliers demandent aussi à être rémunérés en fonction de leurs heures : « c’est notre troisième revendication, c’est qu’effectivement les gens qui sont d’astreinte, soient rémunérés en fonction des heures qu’ils font ».

Lire aussi : La colère monte à l’hôpital de Uturoa

La colère monte depuis déjà plusieurs mois à l’hôpital de Uturoa. En début d’année dernière, une grève avait déjà eu lieu. À la suite de ce mouvement, des moyens ont été accordés, du « personnel paramédical principalement et quelques personnels administratifs ». Pas assez donc, selon le représentant syndical. « On est dans une pénurie qui est immense, qui est énorme. (…) Et aujourd’hui, on a des statuts qui sont totalement désuets et qui sont un frein au recrutement des professionnels de santé. Et donc nous, à CSTP -FO, on a des propositions à faire. Sur ce marché du travail, il faut que la Polynésie, elle évolue ». Selon le médecin, si le personnel recruté ne reste pas, c’est en partie à cause de ce statut « d’un autre siècle ». « On a malheureusement une fuite, on a une fuite du personnel médical, paramédical, tout le monde s’en va, parce qu’on a des statuts qui sont tellement dépassés qu’ils datent de 1995. »

Ultime point de revendication des futurs grévistes : que l’hôpital soit rénové. Des travaux avaient été entamés, mais sont stoppés depuis plusieurs mois… « Aujourd’hui, depuis 18 mois maintenant, tout est arrêté, il n’y a plus rien, et on n’a même pas 20 % de l’hôpital qui a été rénové… même pas 20% » répète le taote.

Sans accord, la grève devrait prendre effet mardi à 0h. Pour les patients qui s’inquiéteraient d’un arrêt complet des soins à l’hôpital de Uturoa durant le mouvement, le docteur Dubois rappelle que « dans la fonction publique, en particulier dans le secteur hospitalier, nous avons un devoir d’activité minimale. Pour faire tourner encore l’hôpital en assurant la prise en charge des patients, on aura des gens qui, lors de la grève, seront réquisitionnés ».

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