« Ses propos me sont allés droit au cœur et, j’ai regardé mes collègues de la mission, certains avaient les larmes aux yeux ». C’est ainsi qu’Edouard Fritch, le sourire aux lèvres, confie avoir été rassuré par le Président Emmanuel Macron, vis-à-vis de l’avenir de la Polynésie, dont le peuple se trouve aujourd’hui divisé après 30 ans d’essais nucléaires.
Car la rencontre avec le Président de la République était très certainement le moment le plus attendu de cette première journée de table ronde. Selon Edouard Fritch, Emmanuel Macron a d’ailleurs confirmé sa venue en Polynésie du 25 au 28 juillet. Et si Macron ne s’est pas exprimé devant la presse, il s’est engagé à déclassifier les archives.
« Il a effectivement répondu à une de mes demandes concernant la présence de la Polynésie, par un spécialiste ou quelqu’un que nous choisirons, dans le comité qui sera chargé de faire le toilettage de ces archives », explique le Président du Pays. « Et bien sûr, qu’il mettra tous les moyens, que ce soit des moyens humains ou éventuellement financiers, pour que le plus rapidement possible, nous puissions construire l’Histoire qui sera déposée au centre de mémoire de la Polynésie française ».
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Une annonce décisive alors qu’aujourd’hui encore, une loi rend inaccessibles la plupart des documents liés au nucléaire, comme l’explique Renaud Meltz, professeur d’Histoire. « Normalement, ce qui a trait au nucléaire, c’est ce qui a trait à la fabrication ou à l’identification de secret nucléaire. Elle nous est parfois opposée cette loi pour nous empêcher de voir des archives qui ont trait aux conséquences sanitaires, aux oppositions politiques, aux chocs éventuellement culturels qu’il pouvait y avoir entre les Polynésiens et les métropolitains qui arrivent au CEP ».
Et en effet, comme le confirme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée à la Mémoire et aux Anciens combattants, « il y a des documents qui ne seront jamais déclassifiés, parce qu’il en va de la sécurité de la France et de la sécurité du monde. […] Mais tout le reste sera complètement communicable et déclassifié le plus rapidement possible pour que les historiens puissent avoir accès à toutes ces archives ».
Plutôt ouverte sur la déclassification des archives, Geneviève Darrieussecq pose une ligne rouge en refusant d’évoquer un pardon de la France. Elle va même plus loin en contestant que la France a menti, ce qu’affirment pourtant les historiens ou le livre Toxique.
« Il n’y a pas eu de mensonge d’Etat, il y a eu des interprétations. Et cet après-midi, il a pu être dit que ces interprétations n’étaient pas de bonnes interprétations. Et je crois que c’est ça qu’il faut remettre à l’endroit. Si on prend pour argent comptant des choses qui sont fausses, c’est effectivement difficile. On a besoin de redonner de la confiance, et pour redonner de la confiance, on a besoin de vérité dans les chiffres. C’est ce qui a été fait cet après-midi ».
Demain, la délégation Reko Tika se retrouvera pour les deux derniers chapitres de la table ronde : la santé et les effets sur le territoire, qu’ils soient sociétaux, économiques et environnementaux.
Une rencontre qui devrait permettre, à son issue, de « panser les plaies du peuple polynésien pour réparer un destin qu’il n’avait pas choisi », comme l’écrit dans sa chronique au Monde, Stéphanie Atger, coordinatrice de la délégation aux Outre-mer à l’Assemblée nationale…